Les ONG et victimes de la guerre du Rif ont adressé des lettres au roi d’Espagne, Felipe VI ainsi qu’au président français François Hollande «pour qu’ils reconnaissent ce crime contre l’humanité» qu’a été la Guerre du Rif et acceptent de le réparer en contribuant à la mise en place d’un hôpital. C’est ce que rapporte El Pais dans un article paru hier, mardi 3 février.
Ils réagissent ainsi après la récente publication du juriste marocain, Mimoun Charqi, d’une demi-douzaine d’études génétiques d'experts américains, japonais, anglais et italien sur les liens du cancer avec l'utilisation d'armes chimiques. Une confirmation de plus qui s’ajoute aux multiples alertes de chercheurs marocains sur l’origine des cancers dont souffrent abondamment les populations du nord.
L’Espagne voulait «exterminer» les Marocains
Lors de cette guerre menée entre 1924 et 1927, 700 000 soldats français et 26 000 soldats espagnols avaient été déployés contre la rébellion dirigée par le légendaire Mohamed ben Abdelkrim El Khattabi. Dans sa publication, Mimoun Charqi révèle une déclaration du roi d’Espagne de l’époque, Alphonse XIII, qui bouleverse les habitants du nord. «Laissez-nous les considérations humanitaires de côté, parce qu'avec l'aide de gaz les plus nocifs nous sauverons beaucoup de vies. Le plus important est de les exterminer comme des ennemis, comme on le fait avec les bêtes féroces». Ainsi, les soldats français et espagnols n’ont pas hésité à utiliser le gaz moutarde, le phosgène, le diphosgène et la chloropicrine.
Aujourd’hui, 90 ans après la guerre, les régions du Nord sont les plus touchées par le cancer. En effet, près de 80% des adultes et 50% des enfants atteints de cancer traités à l'hôpital d'oncologie de Rabat sont originaire du Rif.
Paris et Madrid appelés à construire un hôpital d’oncologie à Nador
L'association de défense des victimes de gaz toxiques dans le Rif dénonce l’usage de ces bombes alors que les Espagnols et Français savaient que les conséquences seraient désastreuses pour la santé des futures générations dans cette région du Maroc. Son président, Rachid Raha, dont 5 membres de la famille sont aujourd’hui atteint d’un cancer, appelle Paris et Madrid à «réparer les dégâts».
En 2012, Rabat avait manifesté sa volonté d’ouvrir un débat avec l’Espagne sur l’utilisation des armes chimiques lors de la guerre du Rif. Mais depuis, les choses n’ont pas avancé. Les populations ont donc pris les devants. Une rencontre aura lieu samedi prochain entre experts et malades du cancer considérés comme des «victimes» de la guerre du Rif. A cette occasion, ils comptent exiger des autorités marocaines, françaises et espagnoles la construction d’un hôpital d’oncologie dans la région de Nador, pour que les malades n’aient plus à aller jusqu’à Rabat.