C’est le moins que l’on puisse dire dans la municipalité de la Kasbah de Mehdia, près de Kénitra. Hommes, femmes, vieillards et enfants ne peuvent plus sortir de leur domicile sans craindre pour leur sécurité, tellement les attaques de chiens errants sont devenues monnaie courante. «Les agressions journalières ne se comptent plus et elles se multiplient à l’approche des grosses chaleurs», indique à Yabiladi Réda Ferssiwi dont le fils de 2 ans en a récemment payé les frais.
La défiguration d’un enfant de 2 ans brise le silence
Le petit Raïd avait accompagné sa mère au marché le 14 mai dernier. Alors qu’il tenait la main de sa mère sur le chemin du retour, une chienne s’est inopinément jetée sur le petit enfant. Celle-ci n’a lâché l’enfant que lorsqu’une voisine qui accompagnait sa mère l’a assenée d’un coup de melon. Mais en dépit de cet effort, Raïd s’est retrouvé défiguré, sa joue et sa lèvre déchirées par les morsures de l’animal.
Le lendemain, une jeune fille a failli subir le même sort. A la descente du bus, elle s’est retrouvée encerclée par une meute de chiens. Heureusement, elle a été sauvée par des jeunes garçons qui lançaient des pierres sur les animaux pour qu’ils s’en aillent. Un peu plus de 24 heures plus tard, un jeune homme aurait également pu avoir des ennuis, s’il n’avait pas eu l’occasion de ramasser de grosses pierres pour se défendre face aux trois chiens qui le pourchassaient. Quelques jours plutôt, un homme âgé de retour de la mosquée a mis plus de dix minutes pour reprendre son souffle après avoir échappé à des chiens. Il a été sauvé grâce à l’intervention de deux jeunes hommes alertés par ses cris et qui lancèrent des pierres contre les bêtes. Et des faits similaires, il y’en a tellement que Reda Ferssiwi ne peut pas tous les citer.
Les autorités locales, «coupables de non-assistance à personne en danger»
Ce qui met encore plus la population hors d’elle, c’est l’attitude des responsables communaux face à cette situation alarmante. «Les agressions journalières sont favorisées par l’inertie décadente des autorités locales qui sont plus en proie au désengagement total, qu’à la réalisation de leurs devoirs d’élus», s’indigne M. Ferssiwi. «Leur impardonnable incompétence, devenue notoire, les rend coupables au plus haut degré de non-assistance à personne en danger, en atteste ce que vit la population civile au quotidien», ajoute-t-il.
En effet, ce père de famille rapporte qu’au lendemain de l’agression de son fils, sa femme s’est rendue à la commune pour se plaindre de cette insécurité. Mardi dernier, elle a été une nouvelle fois reçue par des agents municipaux. «Toujours aussi imperturbables, ils lui disent sans remords : ’’l’éradicateur ne veut plus tuer les chiens errants et le fusil en notre possession est enrayée et doit être réparé’’», rapporte M. Ferssiwi. «Pour en rajouter à la gravité de leur irresponsabilité avérée, ils lui demandent avec impudence : ’’mais qu’attendez-vous de nous ?’’», ajoute-t-il ensuite. Pour avoir la version de la commune de Mehdia, nous avons en vain tenté de les joindre. Au niveau de la province aussi, aucun responsable n'était disponible pour nous parler.
Pétition et dépôt de plainte en cours de préparation
Pour leur part, les habitants de la Kasbah de Mehdia ne comptent pas baisser les bras. Sous l’impulsion de Reda Ferssiwi et son épouse, ils sont en train de constituer une pétition qui compte déjà plusieurs signatures. Le couple est aussi en train de monter un dossier de plainte qui sera certainement déposé d’ici la semaine prochaine.
M. Ferssiwi a un autre enfant scolarisé dans la municipalité. «Il sort tous les jours, je ne veux pas qu’il lui arrive la même chose que son petit-frère qui a d'ailleurs été sauvé de justesse», dit-il. Et cet état d’esprit est partagé par de nombreux habitants. «Tout le monde ici ne parle que de ça. La plupart des gens ont peur pour eux et pour leurs enfants. Ma fille de 13 ans qui a assisté à l’agression de Raïd ne veut plus sortir seule», témoigne à Yabiladi Bochra El Aorch, la dame qui a frappé d’un melon la chienne qui s’est attaquée au petit Raïd. L’enfant est encore entre les mains des médecins. Il a subi une opération ce jeudi matin.
Mme la Gouverneure, appelée en renfort
Cet après-midi, la famille devrait rencontrer le Gouverneur de la province de Kenitra, Zineb El Adaoui, qui a promis de les recevoir. «Nous espérons qu’elle fera quelque chose, car les communes c’est pas la peine. Idem pour le Pacha qui nous a reçus la semaine dernière. Il a appelé les gens de la commune et les a sermonnés devant nous. Mais, ce n’était que du cinéma, puisque rien n’a été fait».