"Il y a des entreprises, disons ... asiatiques [chinoises, ndlr], qui prennent des marchés de la façon la plus éhontée alors même que des entreprises françaises sont capables d'offrir aussi bien voire mieux", s'énerve Jean-François Gendron président du réseau international de chambres de commerce et d'industries françaises. "Notre ambition commune est de déployer des coopérations triangulaires avec des sociétés marocaines vers l'Afrique subsaharienne et francophone", avait annoncé, quelques minutes plus tôt, Jean-Paul Bacquet, président d'Ubifrance, agence française de promotion du commerce extérieur, en ouverture du Forum de partenariat France Maroc destiné à encourager les relations commerciales entre les entreprises des deux pays. Il se tient aujourd'hui, mardi 20 mai, et demain à Casablanca.
La stratégie africaine du Maroc, marquée par le voyage du roi en Afrique francophone en février, attire l'intérêt de la France. Par l'expression (malheureuse au vu de son histoire) de 'commerce triangulaire', les différentes institutions françaises de promotion du commerce extérieur travaillent à ce qu'entreprises françaises et marocaines se partagent la chaine de valeur et répondent ensemble à des appels d'offre en Afrique subsaharienne et y prennent des marchés ensemble.
"Chasser en meute" à l'export
"On espère que ça va se concrétiser aujourd'hui lors des rencontre b2b entre la délégation d'entreprise françaises et les entreprises marocaines invitées", explique Laarbi Bourabaa, directeur marketing de Maroc Export. "On est dans la logique de chasser en meute. Des entreprises peuvent être concurrentes sur leur marché local et pourtant partir ensemble à l'export. Cela crée plutôt des complémentarités. C'est cette logique que nous souhaitons répéter entre entreprises françaises et entreprises marocaines", explique Jean-François Gendron.
L'Afrique fait donc partie des perspectives majeures de la stratégie des entreprises françaises au Maroc. Cette dernière est au cœur des préoccupation des différentes instances françaises depuis que la France a perdu sa place de premier fournisseur du royaume au profit de l'Espagne, en 2012. "Notre part de marché a baissé de moitié depuis la fin des années 1990. Elle est passée de 25% à 12,5% aujourd'hui avec l'apparition de nouveaux concurrents comme la Chine, la Turquie ou les pays du Golfe en plus de ses anciens concurrents européens", a reconnu Charles Fries, l'ambassadeur de France au Maroc.
"Si nous voulons garder notre statut de premier partenaire économique nous devons nous adapter. Depuis deux ans environ, ma priorité est à la diplomatie économique. Je préside un conseil économique composé de chefs d'entreprises françaises, une instance de pilotage de la politique économique française au Maroc", a expliqué l'ambassadeur de France au Maroc. "L'Equipe de France de l'export n'est pas une abstraction vous l'avez devant vous", a conclu Jean-François Gendron.
Tensions entre le Maroc et la France
La France veut donc plus que jamais reconquérir sa place dans les échanges internationaux de l'Afrique par l'entremise du Maroc, mais le royaume n'est pas des mieux disposés actuellement. La violation de l'accord agricole par la réforme de la procédure douanière appliquées aux importations de produits agricoles marocains par l'UE a soulevé la colère du gouvernement il y a un mois. En réaction à la convocation du patron du contre-espionnage marocain, Abdellatif Hammouchi, pour "torture" et "complicité de torture" par un juge d'instruction français à Paris, le Maroc a suspendu unilatéralement les accords de coopération judiciaires bilatéraux.
Enfin, l'ouverture du grand forum de partenariat aujourd'hui a vu, en l'absence de Meriem Bensalah Cheqroun, présidente de la CGEM, la participation de deux représentants marocains : Laarbi Bourabaa, directeur marketing de Maroc Export et Mamoun Bouhdoud, ministre délégué auprès du ministre de l'Industrie pour la petite et moyenne entreprise. Deux personnalités importantes mais de faible envergure pour semblable rencontre avec les représentants de celle qui reste pour quelques temps encore la première partenaire économique du royaume : la France.