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Maroc : Le stade ultime de la violence

N’étaient-ils pas des centaines, ces jeunes, armés de sabres, de couteaux, formant une horde, comme une sorte de vague de barbarie, qui a déferlé sur une équipe de football – le Wydad de Casablanca – dont les membres s’entrainaient, ce jeudi-là, au stade Benjelloun...

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Arrestation de jeunes armés de sabres / Archives -DR
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Alors, avant d’aller plus loin, posons une question simple : comment ces faiseurs de saccage sont-ils parvenus, sans qu’on tente de les en empêcher, à s’en prendre à des installations sportives et à des joueurs, un jour d’entrainement ? Une horde, cela se remarque de loin...

Alors, comment le piège se sera-t-il refermé sur des sportifs professionnels, ayant essuyé une défaite, - le Wydad avait en effet perdu un match contre l’équipe de Tétouan, mais qui n’avaient pas pour autant mérités qu’on s’en prenne à leur intégrité physique… 

Qu’on les dépouille, sabre à la main, de leurs biens, téléphones portables, qu’on casse leur voiture, qu’on les menace où qu’on les frappe à l’arme blanche.

Cela pose plusieurs questions. Qu’est le football devenu ? Le football, dont les fondements, au-delà de relever des lois sacro-saintes du sport et de son éthique universelle reposent sur les principes de la socialisation. 

Peut-on concevoir que les enjeux symboliques du ballon rond aient mutés, au point de faire du sport le plus populaire du monde, l’objet qui cristallise aujourd’hui à la fois l’espoir et le ressentiment de classes défavorisées ? 

Du rêve au cauchemar social

Le football, c’est l’argent et la gloire. Oui, mais pour une poignée seulement… Drôle de combinaison, celle de la promotion sociale et de l’élection, du possible et de l’injustice, qui voit peut-être des jeunes, passer aussi bien de l’adulation à la haine… Le ballon rond, objet de fantasmes de tous les enfants de notre petite planète serait-il l’objet par lequel le rêve et le cauchemar social arrivent… 

Et les joueurs, trop adorés pour ne pas être haïs, voués à n’être plus que les victimes expiatoires d’une profonde et violente ambivalence à laquelle, il va falloir, qu’à leur corps défendant, ils s’habituent… 

Cette violence, il faut y réfléchir, il faut tâcher de la comprendre, pour tâcher de la réduire, et pas seulement par la violence légitime de la prison – certes, les vandales doivent être punis – mais la prison, école d’une violence autre, n’y suffira pas. 

Car cette violence ne nait pas sur les terrains gazonnés, mais bien ailleurs, là où nos responsables politiques feraient bien de se rendre, tâcher de la voir, d’en comprendre les causes, avant qu’elle n’atteigne le stade ultime.

Tribune

Driss Jaydane
Ecrivain - Collection Le Royaume des Idées
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