Habiba croyait avoir suffisamment donné d’elle-même à son travail pour pourvoir y rester jusqu’à son départ à la retraite. Hélas, après 14 ans de service au Centre public d’action sociale (CPAS) de Saint-Josse (une commune de la région de Bruxelles-Capitale), cette MRE de Belgique âgée de 56 ans, vient d’être brusquement licenciée, rapporte Le Soir. Elle est accusé d’avoir parlé l’arabe et prié durant ses heures de travail.
Est-ce choquant de parler arabe ?
Habiba avoue s’être exprimée en arabe avec certaines nettoyeuses dont elle avait la responsabilité, ainsi que des pensionnaires marocains nostalgiques de leur pays. «Mais est-ce que c’est choquant ?, s’interroge-t-elle. Certaines nettoyeuses ne parlent quasiment pas le français, comment voulez-vous que je m’exprime et que je me fasse comprendre ? Quant aux résidents, certains viennent du Maroc, ils sont tout simplement contents de pouvoir parler dans leur langue. Je ne vois vraiment pas où est le mal».
Il y a quelques mois, Habiba avait été dénoncée à sa hiérarchie pour avoir apporté le repas du soir à l’un des pensionnaires chaque jour. «Il avait vécu au Maroc et y occupait une fonction auprès du Roi. Ici, il se sentait seul, c’était ma façon à moi de l’aider», se défend-t-elle.
«Jamais, je n’ai prié sur les lieux de mon travail»
Outre cela, la quinquagénaire est accusée d’avoir prié sur son lieu de travail. Ce qu’elle dément avec force. «Jamais, je n’ai prié sur les lieux de mon travail, […] tout simplement, car c’est interdit !», affirme-t-elle ajoutant que pour prier, il lui faut avoir les bras, les jambes et les cheveux couverts, ainsi qu’un tapis. De plus, il n’y a pas de salle de prière sur le lieu de son service, or entant que femme, Habiba ne peut prier devant un homme. «Ma religion, je la vis en privé, pas sur le lieu de mon travail», insiste cette femme qui ne porte pas le voile.
Selon le CPAS qui affirme disposer de témoignages «solides», Habiba aurait eu un mauvais comportement vis-à-vis de ses collègues ou certains pensionnaires et ne ferait pas bien son travail. Des accusations que cette quinquagénaire ne comprend absolument pas. Elle pense être victime d’un complot. «En tant que chef de service, je faisais mon travail. Je disais ce qui allait mais également ce qui n’allait pas. Je pense que certains collègues, ceux qui ont déposé plainte contre moi, n’ont pas accepté cela», défend la dame qui est également accusée d’avoir insulté ses collègues et interdit aux pensionnaires de boire de l’alcool.
Dépôt de plainte
«Tout cela est complètement faux !», clame Habiba qui a du mal à comprendre ce licenciement brusque. «Pourquoi, si on estime que j’ai commis des erreurs, ne pas m’avoir donné un blâme, une sanction, ou même me déplacer dans un autre service ?», s’interroge-t-elle. De son côté, le CPAS affirme avoir fait ce qu’il fallait. «Le Conseil d’aide sociale a considéré que parmi les sanctions prévues par la loi, la démission d’office était la plus appropriée», indique une source interne. Même le Conseil d'Etat a approuvé ce licenciement.
«Aujourd’hui, je n’ai plus rien. Plus de travail, plus de salaire, plus rien. J’ai 56 ans, comment voulez-vous que je retrouve du travail à mon âge ?», désespère la dame. Estimant être victime d’une injustice, elle a engagé une action en justice contre le CPAS de Saint-Josse. Son avocat, maître Olivier Martins, a déjà déposé une double plainte et un spécialiste du droit du travail étudie actuellement cette affaire. En attendant éventuellement d’obtenir gain de cause, Habiba est financièrement soutenue par ses deux enfants.