Ce n’est pas la première fois qu’un cinéaste met à l’écran un personnage arabe homosexuel. Et pourtant, le premier long métrage de l’écrivain marocain Abdellah Taïa est décrit comme «une révolution pour le cinéma arabe». «L’Armée du salut», dont la sortie en salles est prévue pour début 2014 en France, est actuellement en compétition à la 70e Mostra de Venise, dans le cadre de la 28e Semana della critica. Une reconnaissance pour ce film qui n’a pas beaucoup fait parler de lui au Maroc.
Et pour cause, «L’Armée du salut», adaptation du roman autobiographique du même nom, écrit par Abdellah Taïa, paru en 2006 aux éditions du Seuil, aborde un sujet encore tabou au Maroc : l’homosexualité. Son auteur, homosexuel assumé, y raconte ses souvenirs d’enfance, son adolescence, son éveil sexuel au milieu d’une société marocaine traditionnelle et l’amour impossible qu’il ressent pour son grand frère. «Je suis tout à fait conscient du fait que ce sujet est tabou dans le monde arabe», a confié Abdellah Taïa à Associated Press, en marge de la 70e Mostra de Venise.
La vérité intime
Ce «sujet est peut-être scandaleux pour certains, mais il s'agit d'abord et avant tout d'une œuvre inspirée par le monde marocain, par les rapports entre les Marocains et les impossibilités que rencontrent les individus pour se découvrir, s'affirmer (ou pas) malgré le regard réprobateur de la société», expliquait l’écrivain et cinéaste marocain, dans un entretien accordé, en avril dernier, à Yabiladi.
«Ce film parle d'un ‘je’ marocain, d'une réalité marocaine, populaire, pauvre. J'ai veillé à ce que la représentation du Maroc, de la vie marocaine telle que je la connais intimement, soit la plus juste possible», confiait-il. Et de poursuivre : «Dans le scénario, j'ai changé beaucoup de choses. La base vient de ce que j'ai au fond de moi : la vérité intime. Et, pour l'exprimer, je passe par les moyens techniques du cinéma». «Pour approcher la vérité, il faut avoir une distance énorme, même quand cette vérité est autobiographique», estime-t-il.
Après Venise, Toronto
En tout cas, le film de Taïa a su séduire quelques uns des plus importants organisateurs de festivals cinématographiques dans le monde. Après la Mostra de Venise, «L’Armée du salut» est, en effet, attendue au Canada, où doit se dérouler, du 5 au 15 septembre prochains, la 38e édition du Festival international du film de Toronto.
Extrait du film