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Grand Angle

Fragilités économiques du Maroc : Le soutien aux ménages « n’est plus une politique viable » selon Natixis

Rabat sous pression au deuxième semestre 2013 ? Après le rapport saillant du Fonds monétaire international (FMI) sur l’état de l’économie marocaine en avril dernier, c’est la banque française Natixis qui pointe les «fragilités» contre lesquelles «l’économie marocaine doit lutter depuis quelques années». Le soutien aux ménages est, une nouvelle fois, jugée inadaptée à la situation qui prévaut. La caisse de compensation, objet de tous les maux ?

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«Maroc : des faiblesses à surmonter et des défis à relever pour une croissance plus équilibrée». Tel est l’intitulé de la note de Natixis, banque de financement, de gestion et de services financiers du groupe bancaire français BPCE, publiée à mis juin, sur la situation économique du royaume.

D’entrée de jeu, la banque relève le niveau de croissance élevé du Maroc au cours des dix dernières années, et même «supérieure à celle de ses voisins du Maghreb». Et d'ajouter que ces performances sont cependant «mises à mal par les vulnérabilités internes au pays (dépendance au secteur agricole notamment) et par les chocs extérieurs à répétition (récession en Europe, augmentation des prix des matières premières)».

Le secteur industriel touche le fond

Si le Maroc peut compter sur une meilleure compagne agricole cette année, le secteur touristique a «perdu son dynamisme», note Natixis. Pire, l’industrie, un secteur qui pourrait être un véritable moteur pour l'économie, souffre tant sur le plan conjoncturel que structurel, relève la banque. Il doit faire face non seulement à la baisse de la demande européenne, notamment la France et l’Espagne, mais aussi à une offre peu diversifiée et à faible valeur ajoutée (produits minéraux bruts et semi-finis, de l’habillement, des produits agroalimentaires et des biens d’équipement). De ce fait, l’industrie marocaine est moins compétitive que ses concurrentes des pays émergents, selon la banque. Cet état du secteur est à l’origine du ralentissement de la croissance de la production industrielle depuis 2012.

Natixis revient sur les irrégularités qui posent généralement problème, à savoir, l’accentuation des déficits jumeaux. Une situation due à l’évolution négative des principaux agrégats économiques. De plus, note la banque, la mauvaise santé économique du pays est marquée par le déficit de la balance courante qui se creuse davantage en raison de la détérioration continue de la balance commerciale.

Le soutien aux ménages «n’est plus une politique viable»

Selon la banque, la solution adoptée par le gouvernement chérifien qui a consisté en une politique de soutien à la consommation des ménages «n’est plus viable». Si elle «a permis de contenir le mécontentement social né du Printemps arabe et de stimuler la croissance dans un contexte de déficit de la demande extérieure, cela s’est traduit par une forte dégradation des finances publiques et par l’accentuation de déséquilibres macroéconomiques», note Natixis, relevant qu’elle n’a même pas pu avoir un impact positif sur le chômage. Lequel reste élevé (un chiffre officiel de 9%), surtout chez les jeunes en milieu urbain (32% pour les 15-24 ans) ainsi que les diplômés du supérieur (19%).

Bank Al Maghrib table sur une croissance située entre 4,5 et 5,5% en 2013. Pour y arriver, la filiale du groupe français BPCE recommande vivement au gouvernement Benkirane de respecter les engagements pris dans la dans le projet de Loi de finances 2013. Il s’agit entre autres, le rétablissement de la compétitivité de l’offre marocaine et l’amélioration de sa qualité via un investissement accru et mieux orienté, tout en préservant ses finances. La stabilité économique du royaume en «dépendra», assure Natixis.

Rabat fléchit

Le rapport de cette banque internationale apparait pratiquement deux mois après celui du FMI qui pointait quasiment les mêmes points. L’institution de Bretton Woods «conseillait» au Maroc d’augmenter les prix des produits de base pour alléger les finances publiques, après avoir octroyé une ligne de précaution et de liquidité de 6 milliards de dollars au royaume.

L’économiste marocain Najib Akesbi n’a cessé de dire et redire que le Maroc «a perdu sa souveraineté» en allant chercher le financement sur les marchés internationaux. La manière dont les choses se passent semble confirmer cela. En effet, outre cette ligne de crédit, le Maroc compte à son actif deux sorties sur le marché du dollar à fin 2012 et courant 2013.

Malgré tout, le gouvernement a réitéré plusieurs fois qu’il maintiendrait son soutien à la consommation des ménages. Mais le 21 juin dernier, deux jours seulement après la publication du rapport de Natixis, le ministre délégué aux Affaires générales et à la Gouvernance, Mohamed Najib Boulif, annonçait la réduction des subventions sur le pétrole et le sucre qui devrait s’opérer avant le ramadan. Pourtant, le gouvernement n'est pas sans ignorer la sensibilité de la question au sein de la société civile. A une semaine du mois sacré, le gouvernement ne s’est plus exprimé sur la question. Cèdera-t-il aux contraintes budgétaires en réformant la caisse de compensation ou bien gagnera-t-il encore un peu de temps pour ne pas attiser le feu de la grogne sociale en plein Ramadan ?

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