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Grand Angle

« L'émigration réduit la pauvreté et les inégalités », Hillel Rapoport [Interview]

Hillel Rapoport a présidé la commission de sélection des articles des chercheurs internationaux présentés lors de la conférence internationale sur la migration et le développement organisée par la Banque mondiale, hier et aujourd’hui, dimanche 19 mai, à l’université Al Akhawayne d’Ifrane. Chercheur à l’université de Lille 1, chercheur associé à Harvard, spécialiste des rapports entre migration et développement, il détaille les effets positifs, mais parfois aussi négatifs, des migrations sur le développement des pays d’origine comme des pays d’accueil.

Publié
/DR Frank Schischefsky/fotograf-kiel.de
Temps de lecture: 3'

Yabiladi : Comment a évolué la perception des migrations, depuis le début des migrations internationales contemporaines dans les années 70 et 80 ?

Hillel Rapoport : A l’époque, les gens soulignaient les problèmes provoqués par la migration : la destructuration des familles, ainsi que l’augmentation des inégalités car seuls ceux qui en avaient les moyens pouvaient émigrer et gagner ainsi la possibilité de s’enrichir encore plus à l’étranger ; on les accusait de verser dans la consommation ostentatoire dans leur pays d’origine. On pointait aussi du doigt le ‘risque moral’ entraîné par des revenus assurés sans travail : certains préfèrent ne pas travailler et vivre grâce au soutien financier des transferts d’un membre de leur famille.

Aujourd’hui, nous avons plus de recul et il est possible d’analyser le processus dynamique. L’argent qui est transféré a un effet positif sur la croissance locale dans le pays d’origine. C’est un effet d’équilibre général où la richesse - les transferts - se diffuse et bénéficie à toute la société. Avec la formation, le coût de la migration a également eu tendance à baisser et émigrer est devenu accessible à des personnes plus pauvres et les transferts se diffusent donc parmi les couches les plus pauvres de la société d’origine. Avec le recul, on peut donc dire que les effets sont plutôt bons. La pauvreté et même les inégalités sont réduites.

Vous dites que les effets de la migration sont globalement positifs, mais n’existe-t-il pas des effets pervers ?

Pour certains domaines comme la santé et l’éducation qui produisent des externalités positives, il faut intégrer le contexte de la migration pour déterminer ses effets. On a constaté, par exemple, que les enfants d’émigrants, au Mexique, ont tendance à choisir de ne pas faire d’études alors qu’ils en ont les moyens, plus que d’autres, grâce aux transferts de leurs parents. Leur choix est déterminé par leur principale perspective : émigrer illégalement comme leurs parents aux Etats Unis. Puisqu’ils prévoient qu’ils seront des clandestins, ils savent qu’ils seront cantonnés, aux Etats Unis, à des emplois de plombiers, de jardiniers, de femmes de ménage ... Ils ne voient donc pas l’intérêt d’investir dans leur éducation sachant qu’elle ne servira à rien aux Etats Unis. Dans ce cas, c’est le contexte institutionnel de la migration qui provoque un effet négatif sur la société du pays d’origine.

Quel est le contexte institutionnel nécessaire pour permettre que la migration produise majoritairement des effets positifs ?

Certaines conditions relèvent du bon sens, comme la mise en place d’un système financier transparent qui assure un faible coût de transaction pour pouvoir faire circuler facilement l’argent. De la même façon, la migration illégale a un impact négatif : elle est souvent associée, dans les pays d’accueil, à la délinquance ; elle empêche l’investissement dans l’éducation. Etre en situation irrégulière empêche également de revenir dans son pays d’origine comme on le veut parce qu’on a tellement investi pour émigrer qu’on ne veut pas tout perdre en revenant sans avoir la possibilité de re-émigrer une nouvelle fois si besoin était. Pour établir ce contexte institutionnel, il faut une cogestion plus intelligente de la migration ente pays de départ et d’accueil.

Nous dirigeons nous vraiment vers l’établissement de ce contexte institutionnel favorable ? L’Union européenne ne cesse de fermer ses frontières et renforcer ainsi l’illégalité de l’immigration.

Les flux migratoires se définissent en fonction de trois caractéristiques : le nombre de migrants, leur niveau de qualification et la diversité de leurs origines. Une immigration plus qualifiée et plus diversifiée sera mieux acceptée dans le pays d’accueil et pourra donc être plus importante en nombre. Si elle est peu qualifiée, peu diverse, et donc peu importante, elle produira un cercle vicieux, c’est le modèle européen ; et si elle est qualifiée, diverse et plus importante, elle produira un cercle vertueux, c’est le modèle canadien. Il s’agit donc de parvenir à mettre en place des voies d’entrées comme le font, par exemple, les Etats Unis avec leur loterie destinée aux pays qui exportent spontanément le moins de migrants chez eux, comme la politique de l’immigration choisie lancée par Nicolas Sarkozy, mais qui n’a pas été achevée.

Inégalités sociales - Fondamentaux pragmatiques
Auteur : Claudec
Date : le 20 mai 2013 à 08h53
L'article qui suit est inspiré du blog : http://claudec-abominablepyramidesociale.blogspot.com


La pauvreté – comme la richesse – est une composante de la société, structurelle et mécanique, aussi relative qu'incontournable ; et les inégalités de toutes sortes en résultent. En prendre conscience serait le premier pas à faire pour atténuer cette pauvreté et ces inégalités, voire les maîtriser, à défaut de pouvoir les éradiquer. La preuve a en été largement administrée depuis plus 20 siècles, durant lesquels les raisonnements, les doctrines ainsi que les méthodes et les moyens appliqués pour les combattre n'ont fait que les augmenter et les exacerber.

En occident comme ailleurs, dans les pays développés comme dans les autres, la société des hommes est, a toujours été et sera jusqu’à sa fin, faite d’inégalités. L’exception y domine la masse ; le pouvoir y domine le peuple, la force la faiblesse, l’intelligence la sottise, le savoir l’ignorance , la richesse la pauvreté etc. ; dans tous leurs aspects. Et plus les richesses augmentent – qu’elles soient d’ordre matériel ou immatériel –, plus s’accroît l’écart entre le sommet d'une pyramide sociale qui n’a pas d’autres limites que l'ambition humaine et les capacités de la planète et, à l’opposé, une base où règnent la pauvreté absolue et l'indignité, dernier état de la condition humaine.

Il existe des chiffres et un mécanisme vieux comme le monde, dont il faudrait pourtant avoir clairement conscience avant de tenter quoi que ce soit d’utile pour secourir durablement les plus nécessiteux d’entre nous, qu'il s'agisse de continents, de nations, de régions, comme d'individus.

À l’aube de notre ère, la Terre était peuplée d’environ 250 millions d’êtres humains. Elle en compte plus de 7 milliards aujourd’hui, dont 1,5 milliard vivent dans un état de pauvreté profonde. L’homme et le progrès dont il est porteur ont ainsi créé, en 20 siècles, 5 fois plus de miséreux qu’il n’y avait d’individus de toutes conditions sur terre au début de leur entreprise. Et la population augmente, quotidiennement, de 220 à 250 000 âmes qui viennent dans leur grande majorité surpeupler la base d’une pyramide sociale dans laquelle le "descenseur social" prend le pas sur l’ascenseur du même nom démontrant, s'il en était besoin, que la pauvreté est plus facile à partager que la richesse.

Les objections ne manqueront pas, à commencer par le reproche de voir la bouteille en partie vide plutôt qu’en partie pleine et de faire ainsi preuve d’un pessimisme exagéré. À supposer que tous les hommes aient été pauvres au début de notre ère, ce qui ne saurait être le cas du simple fait de le relativité de la pauvreté – comme de la richesse bien entendu –, alors que le nombre de ces pauvres a été multiplié seulement par 4 à 5, celui de la population totale l’a été par 28. De quoi effectivement dédramatiser leur augmentation en nombre ! D’autant que le même raisonnement conduit, en supposant qu’il n’y ait eu que des non pauvres au début de notre ère – ce qui ne saurait davantage être le cas que le contraire – le nombre en est passé, par différence, de : 250 millions à 7 milliards - 1.4 milliards = 5.6 milliards, soit une multiplication par 22.4, d’où raison supplémentaire de se réjouir. Mais ce qui nous préoccupe ici est la pauvreté et sa progression en nombre ; et non leur progression dans ce qu'elles ont de relatif. Ce qui est important et prioritaire n’est pas de savoir si la civilisation a créé plus de riches que de pauvres mais de savoir quels ont été ses effets sur la pauvreté. Quand bien même il n’existerait qu’une poignée de miséreux sur terre, c’est leur sort qui nous intéresse et non celui des heureux élus qui ont le bonheur d’y échapper. Or l’observation est indiscutable : le nombre de pauvres profonds a augmenté de un milliard et demi en vingt siècles, si nous ne chipotons pas sur quelques dizaines de millions.

Quant à savoir si cette variation a connu des fluctuations ; quels en ont été les pics ou les baisses, il s’agit d’autres aspects de la question. Il suffit de réaliser qu’à un moment donné de l’histoire des hommes – en l’an 2000 – le nombre d’êtres humains atteints de misère profonde est inacceptable, même s’il est communément admis qu’il ne représente que 14% de la population totale de la planète ; certains prétendant que la réalité est bien supérieure

En dépit du véritable escamotage du facteur démographique par la plupart de ceux qui se penchent sur le cas des pauvres, la pyramide sociale, pour aussi schématique qu’elle soit, met pourtant en évidence le fait que les pauvres des uns sont les riches des autres, dans une relativité universelle que non seulement les uns et les autres négligent, mais qu’ils contribuent à masquer avec un égoïsme comparable à celui des riches du sommet qu’ils ne font le plus souvent qu’imiter et jalouser dans leur impuissance. Ceux qui confondent richesse avec confort et bonheur avec richesse, démontrent ainsi que le sort d’un milliard et demi de pauvres réels et profonds leur importe moins que les enjeux de leur propre lutte, reprochant aux riches d'être nés ce qu'ils sont et tentant de leur arracher ce qu’ils leur envient, avec une rapacité obstinée. En dépit de leurs généreux principes, ils méprisent ainsi ceux dont ils sont eux-mêmes les riches tout en s'en prétendant les défenseurs. Ils ignorent, dans un égoïsme médian qui vaut n'importe quel autre, que tout ce qu'ils parviennent à obtenir pour améliorer leur propre confort est autant de moins pour plus pauvres qu'eux et, in fine, pour ces pauvres et miséreux authentiques qu'ils contribuent ainsi, la conscience plus ou moins tranquille, à priver de leur pain.

Face à ce constat, s’il est possible de penser que l’accroissement de la population est porteuse de progrès, il est aussi permis d’imaginer qu’il peut avoir d’autres effets ? N’est-il pas en tout cas surprenant que si peu parlent de démographie ? Ne devons-nous pas, tous autant que nous sommes, ouvrir les yeux et en débattre sérieusement si nous voulons véritablement, sincèrement, offrir avec lucidité et réalisme quelques chances aux plus malheureux d’entre nous de voir s’améliorer durablement leur sort et au-delà celui de leur descendance ?

Apprécier la mesure dans laquelle leur nombre influence le sort des hommes, tel est le vrai sujet. Car s’il est possible aux individus qui bénéficient d’un confort matériel évident de se livrer avec un certain recul à une telle réflexion, tout se passe dans l’opacité d’une misère aggravée par une démographie galopante pour les autres. Les nantis faisant par ailleurs cette opinion qui dénonce la pauvreté, n’est-il pas utile d’y réfléchir, spécialement à l’époque où la population du globe a franchi le cap des 7 milliards ? Nul doute que ce soit d’autant plus indiqué que cette dénonciation repose sur des critères d’évaluation contestables – et contestés.

Soulevant davantage de questions qu’ayant la prétention d’apporter de réponses, les présents propos émanent d’un profane, selon le terme servant aussi bien aux scientifiques qu’aux religieux à désigner ceux qui n’appartiennent pas à leurs communautés. Néanmoins curieux de sociologie et interpellé par une misère omniprésente que la démographie entretient sans vergogne au vu et au su de tous, Candide voudrait partager les sentiments que lui inspire le croisement de ces deux disciplines. Son ambition de partage et de vulgarisation d’idées touchant à ce qu’il considère comme l’aspect fondamental de la vie en société et de ses difficultés, pourrait-elle lui être reprochée ?

Les évidences auxquelles sa réflexion renvoie, déterminent en tout cas les conditions et contraintes sous lesquelles est placé un équilibrage dont la société moderne a le plus grand besoin :
- La richesse et la pauvreté sont relatives et existent l’une par l’autre.
- Chacun d'entre nous hérite à sa naissance de sa part de l'une et de l'autre.
- La structure pyramidale de la société humaine est non seulement inéluctable mais incontournablement assortie de sa distance – variable il est vrai – entre sa base, la pauvreté, et son sommet
- Si la richesse n’a pas de limites, la misère a la sienne, qui est le fondement même de la condition humaine, là où elle est le plus concernée par la démographie ; là où, absolue, elle peut descendre au niveau zéro, au-dessous duquel règne l’inexistence sociale.
- Du fait de la structure pyramidale de la société, la croissance démographique s'accompagne d'une augmentation exponentielle du nombre de pauvres par rapport à celui des plus riches occupant son sommet.
- Lutter contre l'enrichissement de la société aggrave d'abord le sort des pauvres, sans pour autant les faire bénéficier du partage qui pourrait en résulter.

Aucune résignation dans ce qui précède, mais bien au contraire un appel à regarder la pauvreté pour ce qu’elle est réellement, à une échelle planétaire qui concerne dorénavant chacun d’entre nous, du plus humble au plus riche. L’histoire nous enseigne qu’une révolution chasse l’autre ... jusqu’à celle d’après, aucune n’ayant jamais changé durablement quoi que ce soit à un ordre établi dont il serait temps de prendre conscience et de tenir compte avec l’intelligence dont l’homme est censé être doté.

Une conviction par contre : si l'éradication de la pauvreté est un mythe, son endiguement dans des limites aussi tolérables que possible, ainsi que l'élimination de la misère profonde sont à sa portée. Niant une décroissance contraire au progrès qui distingue l'espèce, autant qu'une course irresponsable au "toujours plus", de tels objectifs passent toutefois, inéluctablement, par une croissance démographique maîtrisée, au profit d'une population contrôlée et pour le plus grand bien d'une planète qui n'en peut plus.


Visiter attentivement à ce sujet : http://claudec-abominablepyramidesociale.blogspot.com (articles et schémas). Agnostique et apolitique, la simple observation d’une réalité démographique, y est mise en relation avec la pauvreté et les inégalités sociales, en laissant à chacun la liberté d’en prendre ce qu’il jugera compatible avec ses propres convictions, aussi bien religieuses que philosophiques ou politiques.
La pauvreté aussi se mondialise
Auteur : Claudec
Date : le 19 mai 2013 à 19h26
Les politiques économiques et sociales des États et notamment leurs aspects écologiques, migratoires et de l'emploi ne peuvent avoir de sens que si sont pris en compte les fondamentaux de la démographie mondiale et les problèmes (dont la pauvreté et les atteintes à l'environnement) qu'elle génère inexorablement.
Signe de la vanité et de l'insuffisance des mesures prises depuis que l'homme existe pour se guérir de cette pauvreté : ses véritables causes demeurent ignorées des docteurs en tous genres qui l'étudient et prétendent la combattre.
Avant de prôner quelque solution que ce soit aux problèmes posés par la pauvreté et à ses conséquences pour tous les pays du monde, invitation à méditer sur le sujet avec :
http://claudec-abominablepyramidesociale.blogspot.com
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