«Nous sommes en train de mettre en place une nouvelle stratégie nationale pour les Marocains résidant à l’étranger», a annoncé Abdellatif Maazouz, ministre délégué en charge de la Communauté marocaine résidant à l’étranger, hier, jeudi 16 mai, lors de l’ouverture de la 6e conférence internationale sur la migration et le développement, organisée par la Banque mondiale. Cette première journée, organisée à l’université internationale de Rabat, a été consacrée aux politiques publiques en direction de la diaspora.
A l’écoute des différentes interventions, il est clair que cette stratégie ne va pas changer : il s’agit toujours, en premier lieu, de mobiliser les compétences et les richesses qu’elle peut offrir au Maroc. Pourtant, le chercheur Hein de Haas, co-directeur de l'Institut pour les Migrations Internationales (IMI) à l'université d'Oxford, insiste : «il ne faut pas placer trop d’espoirs dans la migration. Au niveau local, les migrants ont amené une augmentation réelle du niveau de vie, mais croire que la migration peut permettre de résoudre les problèmes structurels du Maroc, c’est aussi prendre le risque d’entretenir une dépendance structurelle vis-à-vis de la migration voire de renforcer parfois le sous-développement.»
Migrants de travail et investisseurs ?
La dépendance du Maroc aux transferts des MRE n’est plus à prouver. «Ils représentent 7% du PIB, soit deux fois l’aide publique au développement reçu par le pays et couvre 40% du déficit commercial», rappelle Abdelfettah Sahibi, secrétaire général du ministère des MRE. Aujourd’hui, le ministère veut élargir les apports de la diaspora aux ressources humaines. «Les transferts ont pendant longtemps occulté la question du transfert de savoir faire et des programmes de mobilisation des compétences sont restés à un stage mitigée», estime-t-il. L’objectif est de leur faire passer un nouveau cap. «Nous avons mis en place Maghribcom, et nous encourageons les investissements par un accompagnement adapté», indique-t-il.
Nombreux ont été ceux qui, lors de cette première journée, ont rappelé qu’il était particulièrement difficile de transformer l’épargne des MRE en investissements directs au Maroc. Aujourd’hui, un pourcentage très marginal des transferts va aux investissements. «Il y a un fantasme sur la capacité des MRE à devenir des investisseurs au Maroc, mais il ne faut pas oublier que ce ne sont pas tous des créateurs d’entreprise. En 7 ans, nous avons sélectionné et accompagné 35 projets d’entreprises, un peu moins de 15 ont effectivement débouché sur une création d’entreprise et seul 6 d’entre elles ont dépassé le cap des 3 ans», explique Omar Agodim, président de l'association Maroc Entrepreneur.
Maâzouz optimiste
«Je suis beaucoup plus optimiste, affirme pourtant Abdellatif Maâzouz, sur la part des transferts consacrés aux investissements car les chiffres que nous avons sont ceux de l’office des changes, or avant d’investir les MRE épargnent leur argent et l’office des changes le comptabilise comme tel même s’il est ensuite investi.» D’autre part, il existe selon lui des moyens de mobiliser cette épargne de façon productive sans que les MRE prennent le risque de créer une entreprise. «Nous avons discuté avec la Banque populaire pour voir quels produits d’investissements seraient les mieux adaptés à la diaspora. L’objectif est de travailler sur une offre d’emploi de leur épargne qui leur permette d’investir au Maroc de façon indirecte», détaille Abdellatif Maâzouz.