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Rapport de l'OCDE sur le conflit du Sahara, de 1975 à 2007

Dans la récente mini-crise diplomatique entre les Etats-Unis et le Maroc, le conflit du Sahara occidental ainsi que la Minurso sont revenus au coeur de toutes les attentions. Néanmoins, beaucoup de lecteurs ignorent les aspects historiques, les protagonistes du conflit et les enjeux réels ou supposés de ce dossier ô combien stratégique pour le Maroc. Nous vous proposons donc un texte issu du rapport de l'OCDE qui passe en revue les évènements sécuritaires au Sahel entre 1967 et 2007, avec un focus assez complet sur le Sahara occidental. 

Publié
Hassan II en tenue militaire /DR
Temps de lecture: 5'

Le Sahara occidental est un territoire de 266.000 km² du nord-ouest de l’Afrique saharienne, bordé par le Maroc au nord, l’Algérie au nord-est, la Mauritanie à l’est et au sud, tandis que sa portion ouest s’ouvre sur l’Océan Atlantique. Territoire non autonome selon l’ONU, cette ancienne colonie espagnole n’a toujours pas trouvé de statut définitif sur le plan juridique, plus de trente ans après le départ des Espagnols en 1976. Le Sahara occidental est en proie à un conflit reflétant à la fois la lutte de certains sahraouis pour leur indépendance et la rivalité hégémonique du Maroc et de l’Algérie dans cette région. Devenu un enjeu global, le dossier saharien bloque toujours la construction de l’Union du Maghreb arabe (UMA).

En 1884, l’Espagne y établit un protectorat, confirmé par la conférence de Berlin de 1884–1885. Elle commença par établir des comptoirs commerciaux et une présence militaire. Les frontières n’étaient pas clairement définies, jusqu’au traité entre la France et l’Espagne, datant du début du XXème siècle. Les tribus locales luttèrent contre la puissance coloniale avec l’aide du Maroc. Cet appui cessa lorsque le royaume chérifien devint un protectorat français en 1912. Le Sahara espagnol fut créé à partir des territoires de Río de Oro et de Saguia el-Hamra en 1924. Il était administré séparément des territoires placés sous la dénomination de «Maroc espagnol».

Dès 1965, l’ONU poussa l’Espagne à décoloniser ce territoire et engager des consultations avec le Maroc, en association avec l’enclave d’Ifni. Mais l’Algérie était alors en conflit ouvert avec le Maroc au sujet du tracé de leur frontière commune et le Maroc et la Mauritanie avaient aussi des revendications territoriales opposées sur ce territoire. De ce fait, les trois voisins du Sahara occidental ne parvinrent pas à créer un front commun face à l’Espagne qui perpétua ainsi sa domination.

Le règlement du conflit algéro-marocain et un accord conclu entre le Maroc et la Mauritanie permirent d’unifier le front anti-espagnol (Front de libération et de l’unité (FLU), pro-marocain) Parallèlement, plusieurs groupes locaux se lancèrent dans la résistance armée aidés par l’armée de libération nationale marocaine issue de la lutte populaire marocaine contre l’occupation hispano-française du Maroc.

Eléments déclencheur du conflit et déroulement

En 1975, un avis consultatif de la Cour internationale de justice confirme l’existence de liens historiques entre les populations du Sahara occidental, le Maroc, et l’ensemble mauritanien, mais conclut qu’ils ne sont pas de nature à empêcher un référendum d’autodétermination.

Quelques jours après cet avis, le Maroc organise la Marche Verte (6 novembre 1975) pour marquer la volonté d’une souveraineté marocaine sur ce territoire. Ceci amène l’Espagne à signer les accords de Madrid avec le Maroc et la Mauritanie, le 14 novembre 1975, pour officialiser le partage du territoire. Le Maroc obtient les deux tiers nord, et la Mauritanie le tiers sud ; l’Algérie et les sahraouis ne sont pas consultés au cours de ces négociations. Le retrait des troupes espagnoles, décidé peu avant la mort de Franco, s’effectue entre 1975 et 1976.

Le 27 février 1976, la République arabe sahraouie démocratique (RASD) est proclamée par le Front Polisario à Bir Lehlou, au lendemain du départ du dernier soldat espagnol du territoire. Dans le même temps, le Front Polisario attaque par des incursions éclairs les forces marocaines et mauritaniennes qu’il considère comme de nouvelles forces d’occupation. La bataille d’Amgala en 1976 entre forces marocaines et algériennes sur le territoire du Sahara Occidental montre le soutien actif qu’offre l’Algérie au Front Polisario.

Entre fin 1975 et 1976, des dizaines de milliers de sahraouis quittent le Sahara Occidental vers les camps de réfugiés de Tindouf en Algérie, encadrés par le Polisario et l’armée algérienne.

Le Maroc récupère de fait le reste du territoire en 1979, à la suite du retrait de la Mauritanie. Dans les années 1980, le Maroc érige un mur de défense qui sépare le territoire en deux, le quart oriental étant désormais sous le contrôle du Front Polisario. Une guerre d’embuscades avec le Front Polisario prend fin en 1991 suite à un cessez-le-feu favorisé par la médiation de l’Organisation des Nations unies ; un référendum organisé par les Nations unies sur le statut final a été reporté à plusieurs reprises.

Facteurs aggravants

Le problème du référendum sur l’autodétermination et des opérations de recensement des sahraouis. Le territoire est revendiqué à la fois par le Maroc – qui l’appelle «Sahara marocain» – et par la République Arabe Sahraouie Démocratique (RASD), fondée par le Front Polisario en 1976.

L’existence d’une frontière minée et de camps de réfugiés oubliés. Le Sahara occidental est frontalier de l’Algérie sur 42 kilomètres, de la Mauritanie sur 1.561 kilomètres, et du Maroc sur 443 kilomètres. Depuis le cessez-le-feu de 1991, le Maroc contrôle et administre environ 80% du territoire, tandis que le Front Polisario en contrôle 20 % laissée par le Maroc derrière une longue ceinture de sécurité. Les zones de contrôle du Maroc (à l’ouest) et du Polisario sont séparées par un mur de sable, construit par les Marocains. Par ailleurs, 300.000 réfugiés demeurent depuis parfois 1976 dans le camp algérien frontalier de Tindouf.

L’enjeu du contrôle des ressources naturelles. Le Sahara occidental est riche en fer, en phosphate et en ressources halieutiques mais aussi probablement en hydrocarbures, plusieurs compagnies pétrolières ayant d’ailleurs été autorisées à prospecter. Ces ressources aiguisent les appétits des protagonistes, empêchent un règlement définitif du conflit et enveniment les relations entre l’Algérie et le Maroc. Ce dernier accuse l’Algérie de chercher une ouverture sur la mer en apportant son soutien au Front Polisario.

L’internationalisation du conflit. Le Sahara occidental est un enjeu majeur de la rivalité entre le Maroc et l’Algérie depuis plus de trente ans. Contre le projet «d’expansionnisme chérifien», qui constitue un «grave danger» pour tous les voisins de l’est et du sud, le Front Polisario a pu compter durant toute la Guerre Froide sur le soutien du Bloc de l’Est, notamment l’URSS et la Libye tandis que le Maroc pouvait compter sur la complicité de l’Europe occidentale, des États-Unis, des monarchies du golfe Persique ainsi que d’Israël.

Ces ralliements, en créant un équilibre dans le rapport de force entre les belligérants, ont empêché une résolution rapide du conflit à la fin des années 70 et durant la décennie 80. Les solutions diplomatiques – notamment l’organisation du référendum sur l’autodétermination–  ont été régulièrement ajournées depuis 1992.

Etat des lieux depuis 1991

En 1991, le conseil de sécurité de l’ONU met en place la MINURSO qui a notamment pour mandat de faire respecter le cessez-le-feu, de faciliter les échanges de prisonniers de guerre, d’aider au rapatriement des réfugiés, d’identifier les électeurs, de les inscrire et d’organiser le référendum.

À partir de 2003, certains documents de l’ONU qualifient le Maroc d’«autorité administrante», ce qui lui donnerait le droit d’exploiter les ressources naturelles du territoire, par exemple d’autoriser des concessions pétrolières. Le gouvernement de la RASD se revendique lui aussi puissance administrante du territoire En 2002, un avis de droit de Hans Corell, vice et que celle-ci depuis la rétrocession du territoire par l’Espagne ayant été confiée à une administration tripartite temporaire. Si le cessez-le-feu est respecté et que le Front Polisario libère 300 prisonniers marocains en novembre 2003, un désaccord subsiste entre Maroc et sahraouis pour savoir qui aura le droit de vote. Le problème du retour des réfugiés de Tindouf qui constitue un enjeu essentiel pour l’organisation du référendum, ne trouve pas de solution acceptable pour les protagonistes.

Depuis 2007, les Etats-Unis semblent privilégier encore plus nettement la position du royaume chérifien. L’endiguement d’Al Quaïda au Maghreb Islamique constitue en effet une nouvelle donne géopolitique qui risque bien de durcir encore davantage les positions respectives des belligérants. 

:: Télécharger le rapport complet (Pdf)

Visiter le site de l'auteur: http://www.oecd.org/fr/

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