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Grand Angle

Combattants belges en Syrie : Les musulmans réprouvent sans être entendus

Dans le climat de peur suscitée par le départ de dizaines de jeunes Belges pour la Syrie, des associations musulmanes s’expriment et réprouvent, pourtant leurs réponses peines à être entendues.

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 «L’islam semble avoir bon dos pour justifier et manipuler des individus… Il importe de se positionner», affirme le théologien Mohamed Ramousi, interrogé par le quotidien belge, le Soir, hier, dimanche 14 avril.. Le départ de près de 70 jeunes Belges, dont des Belgo-marocains, pour la Syrie afin de combattre aux côtés des rebelles fait très peur en Belgique. Enrôlés par l’intermédiaire de groupes salafistes jihadistes, le mode de recrutement de ces jeunes musulmans rappelle celui des cellules jihadistes terroristes qui prennent pour cibles les intérêts «occidentaux». Sujets d’un amalgame facile, interpelés directement ou non par la presse et les hommes politiques qui pointent aisément du doigt «les mosquées», plusieurs personnalités et associations musulmanes ont commencé à réagir et prendre position publiquement.

Dès le 24 mars, le Centre euro-méditerranéen Migration et Développement (EMCEMO) organise, loin des caméras, toutefois, une grande rencontre à la Grande mosquée d’Amsterdam. «Il y avait de nombreux parents très inquiets. Des jihadistes salafistes étaient aussi présents et nous avons parlé, dans le cadre d’un débat démocratique, pour contrer leurs arguments, raconte Abdou Menebhi, président du EMCEMO. Nous avons expliqué que la guerre en Syrie n’était pas un combat de l’islam, car ceux contre qui se battent les rebelles sont aussi des musulmans».

Executif des musulmans de Belgique

Le 4 avril, l’association des musulmans progressistes de Belgique relaie l’inquiétude générale et interpelle les institutions musulmanes belges. Elle demande que les mosquées de Belgique se positionnent clairement par rapport aux discours sectaires qui incitent certains jeunes Belges à partir combattre en Syrie et que l’Etat belge encadre ces jeunes à leur retour «Leur endoctrinement et cette volonté incompréhensible de mourir au combat doivent nous inquiéter. Il faut un contre-discours des autorités religieuses reconnues en Belgique pour prévenir ce type de départ vers la Syrie», a déclaré jeudi son président, Fouad Benyekhlef, à l'agence Belga.

Une semaine plus tard, le 10 avril, l’organe officiel représentatif des musulmans de Belgique, l’Exécutif des musulmans de Belgique (EMB), publie un communiqué officiel dans lequel il «réprouve fermement le départ de jeunes musulmans belges». «Bien que l’implication des mosquées dans le processus de radicalisation et de recrutement de ces jeunes n’est pas démontrée, l’EMB tient à souligner qu’il a toujours enjoint les imams et les responsables des mosquées à tenir, auprès des fidèles, des discours pacifiques, en phase avec l’Islam et notre démocratie, et encourageant le savoir-vivre ensemble», veut rassurer Semsettin Ugurlu, président de l’EMB. Ensuite, il précise : «c’est en-dehors de tout cadre officiel et contrôlé, que ces jeunes, décrits comme «sans repère», seraient enrôlés.» Il insiste également sur les facteurs sociaux et la mobilisation internationale en faveur de la rébellion syrienne qui ont facilité, selon lui, l’enrôlement des jeunes belges.

Un centre fermé

2 jours plus tard, l’imam d’Anvers, Nordine Taouil, condamne de même les départs pour la Syrie et rappelle à son tour que «ce sont principalement ceux qui n'ont rien à faire qui tombent dans les griffes de la radicalisation». Il appelle à une meilleure formation des imams. «Nous ne sommes que trois imams reconnus et néerlandophones à Anvers. Les jeunes vont donc régulièrement sur internet à la recherche d'informations», explique-t-il. Il va beaucoup plus loin que l’EMB ; il un centre d’internement pour ces combattants à leur retour en Belgique. «Ces jeunes reviennent avec un sentiment de revanche. Dans un centre fermé, ils pourraient être aidés par des théologiens, sociologues et psychologues», estime-t-il.

En dépit de ses prises de positions nettes - probablement ni les premières, ni les plus fortes, mais du moins les audibles médiatiquement - de ces «porte-paroles» des musulmans de Belgique, le quotidien national belge Le Soir n’en a pas moins publié, hier, un article commençant par les mots «Pour la première fois, une organisation religieuse musulmane condamne le phénomène des jeunes belges partis combattre en Syrie». Le quotidien relaie le discours de Mohamed Ramousi, théologien, membre du Forum Musulmans et Société (FMS), pour qui : «nombre d’associations musulmanes et mosquées ainsi que les cadres religieux ont tout à gagner en rompant avec le charme contre-productif de «la politique de l’autruche» voire du déni de réalité.» De la même façon, le journal de la RTBF, principale chaîne belge, a interviewé le théologien, comme s’il était la première personnalité musulmane à s’exprimer pour réprouver les départs des jeunes belges pour la Syrie.

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