«Face à une vague de contestation dévalant des douars de montagne et submergeant les villes du littoral, confondant militaires et civils, Arabes et Berbères, laïcs et islamistes, le roi s'est mis à l'écart in extremis – en demandant également à tous les membres de sa famille de se tenir à l'écart». La scène «se passe» au Maroc en 2018. C’est une prophétie du prince Hicham, le cousin du roi Mohammed VI.
Une projection dans un futur proche dans laquelle le pays vient d’être rattrapé par le printemps arabe. Une révolution du cumin a, dans une certaine mesure, bouleversé l’ordre établi. Seules cinq petites années, toutefois bien entamées, nous séparent de la fin du Makhzen, comme le suggère le prince rouge dans un nouveau texte publié dans le mensuel «Pouvoirs» et que la version française du site lakome a diffusé avec l’autorisation de l’auteur.
Une révolution qui garde la monarchie
«Cela frôle le miracle, le pays est toujours un royaume. «Royaume du Maroc». Rien n'a été débaptisé et repeint aux couleurs du nouveau régime», jubile le prince Hicham. Un changement à la marocaine dans lequel le peuple soutenu par l’armée a réussi, par le biais d’une assemblée constituante, une idée chère au prince qu’il avait lancé au tout début de ce siècle, à instaurer les bases d’un nouveau régime dans lequel «Le roi incarne l'unité nationale et la volonté de vivre ensemble. La gestion de la cité relève des citoyens et de leurs élus». Une monarchie constitutionnelle telle prônée par certaines formations de gauche dite non-gouvernementale pour se distinguer de l’USFP et du PPS, lors des négociations sur la réforme constitutionnelle de 2011.
Le Makhzen, «le double infâme de la monarchie» serait mort!
Si le Maroc est toujours une monarchie dans le Maroc de 2018, il a réussi à se défaire du Makhzen. La révolution du cumin a débarrassé la monarchie, «clé de voûte de notre unité nationale, de son «sosie prédateur, son double infâme», prédit le prince Hicham. Il faut dire qu’entre le Makhzen et le cousin du roi, les relations sont très tendues. Les empoignades, par presse interposées, entre les deux sont légion. Dans son texte, le prince accuse le Makhzen d’être à l’«origine de la brouille» avec Mohammed VI et du coup de son départ vers les Etats-Unis.
Et Mohammed VI ?
Le récit de son retour au Maroc, de trois jours, se termine, comme il a commencé, à l’aéroport Mohammed V de Casablanca. C’est le moment choisi par le prince pour parler de l’avenir de son cousin, le roi Mohammed VI. «Dans la salle d'embarquement, je pense pour la première fois au roi. Non pas à Mohammed VI, mon cousin et ami d'enfance, mais au monarque en tant qu'institution dans le nouvel ordre politique, qui réconcilie enfin légitimité historique et populaire». Il faut bien lire le papier pour savoir que le roi dans le Maroc de la révolution du cumin de 2018 a cédé nombre de ses prérogatives au gouvernement : L’armée «est placée sous la responsabilité d'un ministre de la Défense, un civil», et la «baya a cédé sa place à la wala'a, une cérémonie rendant hommage à l'unité nationale autour du roi qui, bien entendu, n'est plus seul à cheval et dont la liste civile est fixée et votée chaque année par le Parlement». Même le protocole a changé « la cour» qui «avait codifié la soumission a été revu de fond en comble pour servir le prestige de l'État».