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Grand Angle

Maroc / Immobilier : Le ministère de l’Intérieur va faire la chasse au foncier…privé

Est-il possible de débattre plus de 2 heures durant sur un sujet d’actualité – en l’occurrence la conjoncture du secteur immobilier - sans apporter de visibilité (et de lisibilité), de contenu et de profondeur d’analyse ? A priori, c’est…possible. Mme Lahlou, directrice du pôle immobilier au ministère de l’habitat et à l’Aménagement du territoire, Noureddine Charkani, Dg de Wafa Immobilier et Jawad Ziyat, directeur général d’Addoha, le 1er groupe immobilier du pays, ont réussi cet exploit.

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Etats des lieux, constats, théories, discours creux, vision restreinte,… ont été exprimés et étalés par les uns et par les autres. Toutes les questions que ce soit sur le plan de la pro activité ou dans le domaine du transfert de responsabilité ont été bottées en touche avec une aisance et une technicité déconcertantes.

A la question, quelle est la conjoncture du secteur ? Ils ont déclaré en chœur que le secteur connaît un «certain ralentissement mais que le terme de crise est inapproprié à la situation». «Les indicateurs macroéconomiques ne sont pas au rouge. Il n’y a qu’à voir les encours de crédits, l’activité des cimenteries ou encore la production de logements», a affirmé Mme Lahlou.

Une perception de la réalité que ne semble pas partager des acteurs du secteurs. «Une ville comme Marrakech est en panne sèche. Au-delà des conséquences urbanistiques pour la ville, totalement défigurée, sans âme, dû à l’absence des services de l’Etat. Il y a des projets immobiliers à l’arrêt et d’autres à l’abandon. En outre, il faut savoir que l’Etat vient de prendre la décision de suspendre toute autorisation de projets immobiliers à Marrakech pour une durée de…20 ans. C’est dire l’ampleur de la situation», indique un promoteur immobilier.

«Comment parler de crise alors que le déficit en logements s’élève à 1 millions d'unités?», lâche un des 3 intervenants. De qui parle-t-on ? Est-ce que le million de ménages (sur les 6 millions existants) a la capacité d’endettement suffisante pour accéder à la propriété ? Quel est le profil de cette population ? Est-elle éligible au crédit ?

Pis ? Cette catégorie de populations, particulièrement (très) vulnérable, a-t-elle les moyens de faire l’acquisition d’un bien immobilier à environ 300 000 dirhams TTC ? Y compris avec l’aide de l’Etat. Pas si sûr. A qui est réellement destinée cette mesure ?

Et dire que le logement social, pivot du secteur et moteur de croissance - il représente 60 % de l’activité global du secteur – bât de l’aile (voir article sur Yabiladi sur le logement social) depuis le printemps 2009. Et ce créneau n'est pas prêt de se relancer car peu de projets de construction de logements sociaux sont prévus en 2010.

Cela a poussé au réveil tardif de l’Etat qui a décidé d’introduire de nouvelles dispositions dans la cadre de le loi de Finances 2010. Et ceci après que Salaheddine Mezzouar, ministre de l’Economie et des Finances, ait déclaré, en octobre 2009, que «le secteur immobilier ne bénéficiera pas de dispositions particulières car le secteur se porte bien».

Certains observateurs avertis expliquent ce revirement de situation sur «instructions royales». Pour d’autres, c’est une démarche déguisée pour venir en aide au 1er groupe immobilier du pays, Addoha, en proie à des difficultés (trésorerie dans le rouge) et afin de réamorcer la pompe et donner un coup de fouet au marché. Où les deux à la fois ?

Autre «nouveauté» avec une décision prise au plus haut sommet de l’Etat et piloté par le ministère de l’Intérieur. Ainsi, l’Etat a décidé d’inverser la vapeur en se portant acquéreur de foncier…privé alors que la tendance était à son contraire avec des promoteurs privés en quête de foncier public.

L’objectif ? Mobiliser et libérer un maximum de foncier pour relancer le secteur et mettre un terme à la spéculation et à la folie des grandeurs. Une «opération» qui ne devrait pas manquer de faire grincer des dents…

Quant au fléau de la corruption, de plus en plus développé, du «noir», toujours aussi répandu, de villes sous équipées, de réseaux de transport inexistant, de communes totalement désemparées et impuissantes,…pas de réponses apportées par les orateurs du jour.

Si ce n’est la réponse de la représentante du ministère en charge de l’Habitat. «Le transport est une prérogative des communes, pas du ministère». Comme si elle ignorait l’état des finances des communes. Bel élan de responsabilité et de…solidarité.

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