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Tribune

Chibanis de France : Histoire d’une vie confisquée

Il y a quelque temps, Hassan Oumada, fils d’un ouvrier marocain embauché dans les mines du nord de la France, a assisté à l’avant-première du film documentaire produit par France télévision Bretagne, et réalisé par Pierrick Guinard, «Chibanis d’ici» sur les travailleurs émigrés marocains dans cette région, les retraités en particulier appelés affectueusement les «Chibanis». 

Publié
/DR Bondy Blog
Temps de lecture: 3'

En regardant «Chibanis d’ici », des sentiments contradictoires s’entremêlaient en moi : un semblant de satisfaction et de joie à voir enfin le pays d’accueil commencer à assumer une partie de cette histoire complexe, en reconnaissant d’une manière certes indirecte les sacrifices de ces gens et ce qu’ils ont apporté à la croissance et au développement de la France ; et l’envie de crier ma rage à la vue de tout le temps qu’il a fallu pour lancer un regard - aussi timide soit-il - sur la vie de ces personnes,

La diplomatie de mon cher pays y était conviée. Le discours de son consul général servit au public présent, marqué de l’habileté oratoire que l’on connait à nos diplomates, évoque toujours plus le thé à la menthe et les pâtisseries orientales qu’autre chose.

Chair à canon dans les mines du nord

En arrivant dans la salle de projection, sans grande conviction, mon regard se promenait dans les recoins de la pièce. Chercher un peu de vie sur les visages de ces personnes abimées par l’exil et l’attente du néant qu’on leur a promis le jour où ils sont partis pour servir de chair à canon dans les mines du nord de la France au début des années soixante.

Mes yeux ont fini par croiser un groupe de «chibanis» en train de s’aventurer dans la salle. Il y avait des sièges de libres dans les rangées du devant, mais aucun d’eux n’a osé y prendre place. Ils ont tous eu le même reflexe digne d’une expérience scientifique. Tous se sont dirigés vers les sièges se trouvant à l’arrière, comme s’ils n’avaient pas envie de gêner. Vouloir passer inaperçus et surtout ne pas se faire remarquer en toutes circonstances.

Sièges du fonds

Un sentiment d’humiliation me gagne en ce moment précis ; l’image de mon père a traversé mon esprit. Il a consommé sa vie dans les mines et les chantiers du bâtiment de ce pays, puis il est mort des suites d’une succession d’hémorragies peu de temps après sa retraite. Il n’a même pas eu le temps de se reposer de son long calvaire d’ouvrier marchant dans l’ombre des villes qu’il a bâti avec tant d’autres «bras» venant des «anciens» territoires de la France coloniale.

Devant cette scène caricaturale, je me suis retrouvé figé sans vraiment comprendre ce qu’il se passait. Ces visages sans nom ni voix avaient bien appris leur leçon : le jour où l’on est venu les chercher dans leurs petits villages, on avait bien insisté sur le fait qu’ils partaient pour travailler et rien d’autre, vivre dans l’ombre de la société d’accueil, rester transparents si c’est possible, et surtout ne jamais oublier que le silence est d’«or».

Des yeux qui racontent le souvenir d’une existence de bohème où la jeunesse a épousé la désolation de l’exil pour enfanter le silence et l’indifférence. Des regards battus qui ne cessent pas de chercher un horizon plus lumineux qui pourrait leur apporter des réponses sur un périple qui refuse d’arriver à son terme. Des ombres qui se déplacent dans un silence pesant qui dit tout sur l’existence qu’on leur a prescrit.

Vendre le printemps de sa vie

La saison de migration vers le nord a été fructueuse sur tous les plans, il faut bien le reconnaitre. Les marchands de chimères ont bien fait leur travail. Ils ont réussi à vendre le printemps de la vie de milliers de personne, à les obliger à mendier un semblant d’existence dans une terre manquant de chaleur et de soleil pour éclairer leurs rêves. Ils étaient partis sans certitude d’un retour possible un jour.

Aujourd’hui, ils sont bien là Beaucoup d’âmes ont péri sans avoir le temps de comprendre la raison même de leur exil. D’autres continuent à perpétuer la «tradition» : vivre et mourir dans le silence, ne jamais crier sa douleur. Sur les murs de leur exil, ils avaient vu défiler leurs vies, marchander leur jeunesse et celles de bien d’autres… Ceux qui avaient vécu leur périple dans le bruit des mines et des chantiers du bâtiment et d’autres qui n’avaient que le sang pour raconter leur histoire.

Visiter le site de l'auteur: http://oumada.wordpress.com/

Tribune

Hassan Oumada
Blogueur
Juste des mots en errance perpétuelle…
Oui effectivement
Auteur : aitmada
Date : le 06 mars 2013 à 01h19
Merci de regarder mon commentaire d'en bas.

J'aime pas qu'on me dit à chaque fois : regarder notre pays, c'est encore pire. Ici en parle de la FRANCE, un pays qui est sensé être un pays de DROITS et pas autre choses. Il faut pas comparer l'incomparable.

Pour le reste de votre question, j'ai déjà répondu à Mr George la dessus.

Merci

Bien à vous.

Quel drôle de définition
Auteur : aitmada
Date : le 06 mars 2013 à 01h10
Bonsoir Monsieur Georges;

Personne n'a dis le contraire, La citoyenneté n'est pas seulement d'avoir un numéro de sécurité sociale et un salaire. La définition du citoyen c'est d'exister et d'avoir une dignité. Je m'explique. Avez-vous une idée sur la façon dont ces personnes sont venues en France. JE vous donne un aperçu de l'histoire, sauf si vous la connaissiez déjà.

Je vous parlerais du contexte du sud marocain que je connais très bien. Entre 1957 et 1970; les autorité françaises ont envoyé un certain Félix Mora ( ancien officier des affaires indigènes au Maroc devenu cadre des houillères et chef de service de la main d’œuvre étrangère du Nord-Pas-de-Calais) pour recruter pas moin de 78 000 jeunes dans les petits villages du sud marocains. Pourquoi ces petits villages, parce que la quasi totalité de la population y est analphabète et aussi car le pouvoir central voulait réglé des comptes avec la population de cette région ( faite un tour sur les cause du protectorat français 1912). Donc pour un patron français c'est une obène: qui dit analphabète, dit méconnaissance des droits, ouvrier maniable et exploitable comme il faut.

Je vais vous parler un peu des conditions de recrutement. L'officier français venais dans les petits villages avec un commis de l'Etat marocain pour récupérer des bras biens faites, à l'entrée de skoura ( une petite ville au sud marocain), on rassemblait tout le monde, on les scrutait en ouvrant leur bouches, et tous les tripotages qu'il faut pour vérifier qu'ils sont bien construit. A l'issu de cess "examens" on les tamponent sur la poitrine pour leur montrer qu'ils sont bien sélectionnés. Il y a ceux qui n(ont pas pu se laver pendant des semaines car ils avaient peurs que le tampon de sélection s'effaça. ça vous rappelle quelque chose. Une image de la traite négrière qui ne dit pas son nom, sauf qu'il manquait juste les chaines et la boucle est bouclée.

ça d'un côté, d'un autre côté vous savez que ces personnes là étaient souvent largement moins payé par rapport à leurs "collègues" français. Vous savez pourquoi? , leur patrons leurs suggèrent et même interdisent d'être syndiqués au risque de perdre leurs emplois. Comme on faisait d'eux un moyen de pression, car on les utilisait comme briseur de grèves. Comme l'était le cas par exemple lors de la grève de l'usine citroène en 1968 dans la région parisienne. Cela était déjà le cas des ouvriers émigrés italiens dans les années 1880 exploité par l'industrie marseillaise..

Sans oublié qu'ils bénéficiaient pas des formations professionnelles comme le suggère la loi. Comme ça ils restent en bas de l’échelle et auront le sentiment que c'est leur place à vie.

Celà en grande partie, vous me parlez de la notion de citoyenneté, quelle drôle de définitions. Vous savez qu'il y a encore des milliers de retraités étrangers qui ne bénéficient pas de LA LIBERTE DE CIRCULATION au risque de perdre leurs droites sociaux; faite un tour chez les travailleurs retraités de Perpignan et Bordeaux si vous voulez mettre un visage sur cette tragédie humaine.
C'est vrai que ce genre de sujet fait toujours grincer les dents car on aime pas trops creuser les plais, et surtout comprendre qu'on doit bien à ces gens là la reconnaissance qu'il faut. J'ai pas envie de rentrer dans le débat historiques sur les tirailleurs sénégalais et nords afriquains qui sont passés sous le silence. Mais c vrai ils ont un salaire il faut qu'on la ferme !!!!!
Pour l'exemple de Monsieur Tayron, j'aurais aimé que ça soit la norme, au lieu que ça soit l’exception visible, car les autres ont été mis sous silence. Ils ont pas voix, car il meurent à petit feu dans les foyers, souvent insalubre. Vous voulez des exemples j'en ai ( faites un tour un Puteaux en 92 ou à saint ouen en 93 ) vous aurez la réponse.

Pour ce qui est du salaire, vous que vous parliez de Walou, peut-être qu'il vivaient de rien, mais leur vie leur appartenait et surtout de la dignité.

Merci pour votre intervention.

Bien à vous

Hassan OUMADA
Dernière modification le 06/03/2013 01:23
CHIBANI
Auteur : fahil khire
Date : le 05 mars 2013 à 22h33
BONSOIR,
En lisant cet article on a l'impression que les retraités sont mal récompenser, mais non monsieur l’Europe en générale est bien recomposer ses citoyens de différentes origines. Je suis d'accord avec vous il y a toujours des exceptions mais ça lié au destin de chacun de nous.
Regardant notre pays, moi mon père militaire 25 ans au services,il a vécu la guerre de 77, 78, 79 contre le polizario hospitalisé des graves blessures résultat un retraite de 1500 dirhamme avec 3 garçons à charges. Ici au moins il y a d'aide pour les enfants des anciennes combattants.
il faut arrêter de jouer la victime en essayant d’être des bonnes citoyens et en espérant le mieux pour notre pays
chibanis
Auteur : georges
Date : le 05 mars 2013 à 10h50

En effet ILS ONT EU DU TRAVAIL UN SALAIRE, ils etaient citoyens , non plus serfs d'un seigneur local ,ou d'un Caid.
Il faut arreter de pleurer , dans les mines ,il y avait deja
des français , comme dans les trains conduite a la vapeur , charger le charbon durant des heures !!! dur,
des polonais
des italiens
des espagnols,
des marocains , algeriens ,
pourquoi ? car chez les derniers , walou pas de travail ou bien la misere ,comme aujourdhui , kif kif .
Avez vous des forums ou les polonais se plaignent ???
et les italiens maçons ?? alors ,
Bien d'accord avec certains , les Marocains de france de cette generation sont des bosseurs , qui meritent le respect, et ce qu'il ont de biens au soleil.
Et c'est vrai tayron , bien vu .
enfin d'accord
Auteur : tayron 91
Date : le 04 mars 2013 à 17h41
Je tiens a vous remercier de votre réponse sans langue de bois . J'ai un exemple concret de retraité immigrés en bonne santé mon père .Il est venu dans les années 70 en France et a travailler dure pour que nous ne vivions pas dans des cités hlm . Mais son seul regret et de ne pas avoir investie son argent en France dans l'immobilier etc. Nous avons de belles maisons au Maroc mais malheureusement nous n'y allons plus et Même lui n'y retourne que une fois tout les 3 ans pour 1 mois maximum car il a compris qu'il s'était fait berner par le Maroc et a 65 ans il est partit demander sa naturalisation il est heureux avec ses enfants et ses petits enfants proche des siens et étranger au Maroc . Cordialement a vous Monsieur Oumada et bon courage a vous...
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