Demain, samedi 8 décembre, le Haut Commissariat aux Eaux et Forêts et à la lutte contre la Désertification organise une battue à partir d’Aderous dans le Moyen-Atlas, dans le cadre d’une stratégie dont l’objectif est de réduire le nombre de sangliers dans la région. Etant des animaux qui se prolifèrent rapidement et de plus, omnivores, ils saccagent tout sur leur passage, détruisent les cultures, piétinent et re-labourent les champs agricoles et même causent des accidents de la route.
«Quand il y a des prédateurs, il y a une régulation naturelle qui s’opère. Mais en l’absence de prédateurs, comme la baisse du nombre de chacals au Maroc, il faut une intervention humaine pour réguler cette population de sangliers», explique Mohamed Endichi, directeur de la Protection de la nature et la lutte contre la désertification, au Haut commissariat aux eaux et forêts, contacté par Yabiladi.
Face à une urbanisation massive des campagnes et des espaces verts, l’habitat naturel de l’animal s’est vu rétréci d’un coup. Au lieu d'avoir à sa disposition de vastes espaces, le sanglier finit par se concentrer dans un tout petit perimètre, créant une surpopulation. En 2012, 8800 sangliers ont été abattus contre 5100 en 2010, souligne l’Economiste dans son édition d’aujourd’hui. La battue nécessite un budget de 409 000 dirhams.
Gachis
Mais une fois abattus que deviennent les sangliers ? «Tout ce qui est chassé est ensuite enterré dans des fosses creusées sur les lieux de la battue avec toutes les précautions sanitaires que cela demande. Le service vétérinaire du ministère de l’Agriculture est sur place pour y veiller», répond-il. «En tout cas, les sangliers abattus ne sont pas consommés au Maroc», poursuit-il en faisant référence aux restrictions imposées par la religion de ne pas manger la viande de porc.
«Quel gachis !», déplore Jean-Pierre Capel, chef français. Installé depuis plus de 20 ans au Maroc, il est le chef et propriétaire du restaurant Le Relais de Saint Exupéry dans la ville d’Ouarzazate. Il propose dans sa carte des plats cuisinés avec du sanglier, notamment du tajine de sanglier ou des tagliatelles cuisinés avec le gibier. Un sanglier du Maroc qu’un fournisseur de Marrakech lui vend.
Pour Jean-Pierre Chapel, il est dommage que le Maroc ne puisse pas vendre les sangliers abbatus ou de les exporter vers l’étranger. Selon lui, la viande de sanglier est pleine de protéines et pourrait au moins être transformée en nourriture pour animaux et vendue par la suite à l’étranger. «On n’en est pas encore là», lance de son côté Mohamed Endichi. «Le nombre de sangliers abattus n’est pas suffisant pour prévoir un investissement pour cette fin-là. Mais si un investisseur nous fait une proposition, on l’étudiera», ajoute-t-il.
En leur âme et conscience
Alors que la clientèle principale du restaurant de Jean-Pierre Capel est en majorité constituée de touristes étrangers ou des équipes de tournage de film, le chef confie que certains Marocains commandent du sanglier dans son établissement. «Lorsqu’un Marocain commande du sanglier, je lui rappelle bien que c’est du cochon sauvage et s’il décide tout de même d’en prendre, c’est en son âme et conscience», explique-t-il. «Mais il est rare qu’un Marocain en mange», précise-t-il.
En l’espace de trois mois, seuls 2 ou 3 clients marocains en ont commandé. «Pour beaucoup de Marocains boire du vin n’est pas un problème. Par contre, pour les mêmes personnes, manger du sanglier leur donnera mauvaise conscience. Le vin est entré dans les coutumes. Pas encore le sanglier», conclut-il.