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Grand Angle

Travail des petites filles : Oxfam Maroc appelle à des efforts sur le plan politique et social

Dans un Policy paper, Oxfam Maroc relance le débat sur le «travail domestique des petites filles». Dans ses recommandations, l’ONG propose notamment d’«investir dans l’éducation des filles pour prévenir le travail domestique forcé».

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Photo d'illustration. / DR
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Oxfam Maroc a publié, ce vendredi, un nouveau Policy paper sur le «travail domestique des petites filles». Intitulé «Petites mains, grandes corvées», il ambitionne de «relancer le débat sur les inégalités au Maroc ainsi que sur les normes sociales qui perpétuent ces inégalités et dont les femmes et les filles sont les premières victimes».

Le Policy paper rappelle ainsi que le Maroc a été désigné pays «le plus inégalitaire du Nord de l’Afrique et dans la moitié la plus inégalitaire des pays de la planète» dans le rapport d’Oxfam sur les inégalités mondiales publié traditionnellement la veille du Forum économique de Davos en Suisse. Il cite aussi le rapport «Global Inequality 2022» qui note que seuls 10% de la population marocaine possèdent plus de 63% de la richesse totale, tandis que 50% en possèdent moins de 5%.  De ce fait, «la pauvreté et les normes sociales continuent à perpétuer les inégalités dont les femmes et les filles sont les premières victimes et à creuser davantage le fossé entre les riches et les plus pauvres», poursuit la même source.

Une loi 19-12 sur le travail domestique insuffisante

Celle-ci évoque également l’analyse des dernières données de l’Enquête nationale sur l’emploi (HCP) qui a relevé qu’en 2021, 148 000 enfants sont économiquement actifs parmi les 7 493 000 enfants âgés de 7 à 17 ans, ce qui représente 2% de cette catégorie de population.  Mais en plus de la pauvreté, il y a beaucoup d’autres facteurs «pousseurs» ou déclencheurs, poursuit Oxfam Maroc, qui cite «la discrimination entre hommes et femmes, l’exclusion sociale, le manque de possibilités d’études, la violence domestique, la fuite d’un mariage forcé, la migration rurale ou urbaine, les déplacements ou la perte de membres de la famille proche». Des facteurs «exacerbés par les motivations culturelles des parents d’envoyer leurs filles vers des lieux ‘’sûrs’’ et adaptés avant leur vie de femmes mariées», poursuit la même source.

«Parallèlement, la participation croissante espérée des femmes au monde du travail a entraîné une demande considérable de travail domestique. Beaucoup d’employeur(e)s choisissent des travailleuses mineures parce que celles-ci coûtent moins cher et sont réputées plus obéissantes à leurs demandes.»

Oxfam Maroc

Le Policy paper reconnaît qu’avec l’entrée en vigueur en octobre 2018 de la loi 19-12 sur le travail domestique, le Maroc a rempli un vide juridique dans le code du travail de 2004 qui ne prend pas en considération les employé.e.s de maison. «Toutefois, la loi ne peut franchir les portes pour suivre et contrôler les foyers afin de veiller à sa bonne application et reste ainsi inapplicable sauf dans le cas d’implication de la justice, ce qui traduit une insuffisance qu’il est temps de combler», explique l’ONG. Celle-ci ajoute aussi que «l’accès des marocain·e·s à la justice n’est pas toujours garanti» alors que «la corruption et le clientélisme sont perçus comme des pratiques courantes du système, et la méfiance envers les institutions décourage les femmes et les hommes d’user de leur droit de recours à la justice en cas de conflit, d’injustice ou de violence».

Investir dans l’éducation des filles pour prévenir le travail domestique forcé

Oxam Maroc estime que la réduction du travail domestique forcé des petites filles au Maroc et l'application effective de la loi 19-12 exigent des «efforts concertés à la fois sur le plan social, économique et politique». Dans ses recommandations, l’ONG propose de renforcer la sensibilisation de la population marocaine sur le travail domestique forcé des petites filles et sur les conséquences néfastes de cette pratique sur leur développement et leur bienêtre.

Elle suggère de renforcer la protection juridique pour les filles qui sont victimes de travail domestique forcé en appliquant efficacement la loi 19-12 sur la lutte contre la traite des êtres humains. «Les mesures de protection devraient inclure des procédures d'identification, de prise en charge et de réadaptation pour les victimes», estime-t-elle.

Il s’agit aussi d’investir dans leur éducation pour prévenir le travail domestique forcé et dans le développement économique des régions pauvres du Maroc. Le Policy paper propose également d’impliquer les communautés locales et renforcer la collaboration entre les différents acteurs pour une réponse efficace à la lutte contre le travail domestique forcé des petites filles. L’ONG plaide enfin pour des programmes régionaux pluriannuels avec des objectifs compatibles avec les exigences de la situation dans les différentes régions du pays.

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