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Grand Angle

France : Le gouvernement expose son plan de lutte contre les discriminations et le racisme

Le plan national contre le racisme, l’antisémitisme et les discriminations liées à l’origine (2023-2026) en France a été présenté, ce lundi, à l’Institut du monde arabe par la première ministre Elisabeth Borne et la ministre déléguée chargée de l’Egalité, de la diversité et de l’égalité des chances, Isabelle Rome. Le texte se veut «une réponse globale et concrète à ces fléaux qui fragilisent le pacte républicain».

Publié
La Première ministre française Elisabeth Borne / Ph. Emmanuel Dunand - AFP
Temps de lecture: 4'

La Première ministre française Elisabeth Borne a dévoilé, ce lundi 30 janvier, le plan national contre le racisme, l’antisémitisme et les discriminations liées à l’origine. Lors d’une conférence de presse tenue à l’Institut du monde arabe (IMA), elle a indiqué qu’au total, 80 mesures concerneraient plusieurs secteurs, surtout l’éducation, l’emploi, la justice et le sport, pour la période de 2023 à 2026. Elle devront permettre de «mieux nommer et de mieux mesurer» l’ampleur de ces problématiques, en plus de «mieux éduquer et former, de mieux sanctionner les auteurs de propos ou d’actes inacceptables et enfin de toujours mieux accompagner les victimes».

Cette initiative est née du constat selon lequel chaque année, 1,2 million de victimes subissent une discrimination ou une atteinte à caractère raciste ou antisémite dans le pays. «Cette statistique démontre la nécessité, pour le Gouvernement, d’agir encore plus fortement pour quantifier, prévenir et sanctionner ces phénomènes», indique l’exécutif sur son site Internet. Les mesures du plan ont été détaillées par la cheffe de l’exécutif et la ministre chargée de l’Egalité des chances, Isabelle Rome, en présence de dix autres ministres.

«Aujourd’hui, les actes sont trop souvent cachés et sous-estimés. Nous voulons donc développer et améliorer les enquêtes de victimation, pour qu’elles intègrent des questions spécifiques aux faits et aux discriminations racistes ou antisémites.»

Elisabeth Borne

Les testings, cheval de bataille contre les discriminations à l’emploi ?

Dévoilé en conférence de presse, le plan national repose sur cinq piliers, autour desquels s’articuleront les 80 actions à mener. Il s’agit de «mesurer la réalité du racisme, de l’antisémitisme et des discriminations ; oser nommer la réalité de la haine ; mieux éduquer et former ; sanctionner les auteurs et accompagner les victimes». Parmi les points saillants, il est prévu de systématiser les testings sur les discriminations à l’emploi dans le privé et le public, «en concertation avec les organisations syndicales, patronales et les associations».

Dans une «logique graduée», s’il ressort que les pratiques discriminatoires perdurent, les sanctions peuvent être accompagnées de «name and shame», en nommant publiquement les entreprises mises en cause. Est prévue aussi l’aggravation de peines, en cas d’«infractions non publiques à caractère raciste ou antisémite commises dans l’exercice de leur fonction par des personnes dépositaires de l’autorité publique ou chargées d’une mission de service public».

Depuis plusieurs années, la discrimination à l’embauche a particulièrement été pointée par des organisations de la société civile en France, ainsi que par des enquêtes sociologiques et économiques, à travers des testings dont les résultats ont souvent été unanimes quant à l’ampleur du phénomène. Invité ce lundi sur Franceinfo, le président de SOS Racisme, Dominique Sopo, a estimé salutaire de faire davantage de testings. Mais il recommande de ne pas s’arrêter là. «Evidemment, il ne faut pas que l’Etat se contente de faire du name and shame, mais qu’il développe une vraie politique de lutte contre les discriminations raciales», a-t-il plaidé.

«Ce que l’on attend de l’Etat, au-delà de financer davantage de testings, c’est de faire en sorte de développer une vraie politique publique, de se comporter en Etat régalien qui vote des lois, qui développe des aggravations de peines, ou encore qui fait en sorte de rendre des formations obligatoires pour que les personnes comprennent ce que sont les discriminations et ne soient pas agissantes en la matière.»

Dominique Sopo sur Franceinfo

L’une des propositions de SOS Racisme est notamment de «faire en sorte que lorsqu’une entreprise est condamnée pour discrimination, le juge puisse de façon complémentaire lui interdire pendant un certain temps l’accès au marché public». Une telle mesure ne figure pas encore dans le plan gouvernemental, mais ce dernier tient compte de l’importance de la formation auprès des différents intervenants dans la lutte contre les différentes formes de discrimination.

Intégrer la lutte contre les discriminations à l’éducation et la formation

C’est ainsi que le plan ambitionne notamment de sécuriser le dépôt de plainte par les victimes de discriminations. A cet effet, le gouvernement appelle les forces de l’ordre à une meilleure prise en charge dans le recueil et le traitement, avec une «anonymisation partielle» ou «une grille d’évaluation». Pare la même occasion, l’exécutif envisage d’inscrire dans la loi «la possibilité d’émettre un mandat d’arrêt», en cas de «condamnations à caractère raciste ou antisémite», de «contestation de crime contre l’humanité» ou d’«apologie de crime contre l’humanité ou de crime de guerre», de manière à permettre l’exécution des peines «lorsque les auteurs condamnés pensent y échapper en fuyant à l’étranger».

Le plan ambitionne, par ailleurs, de rendre possible «l’organisation d’une visite d’histoire ou de mémoire liée au racisme, l’antisémitisme ou l’antitsiganisme pour chaque élève durant sa scolarité». Il inclut aussi le «renforcement» de la formation, des enseignants et des fonctionnaires d’Etat, y compris les forces de sécurité et les agents d’accueil Pôle emploi. Dans le cadre de la promotion de «la citoyenneté numérique», il est notamment prévu d’impliquer «les plateformes et les influenceurs, dans un travail collaboratif, pour élaborer des outils visant à améliorer les comportements des internautes».

Qualifiant ce chantier de «combat collectif», Elisabeth Borne a souligné que des enquêtes d’opinion seraient menées par les ministères de l’Intérieur et de l’Education nationale, afin de questionner régulièrement «les citoyens de tous âges sur les faits racistes ressentis et/ou vécus». Les préfets et des procureurs seront associés de près pour veiller à l’application de toutes les mesures du plan. «En lien avec les associations et les élus locaux, ils dresseront un bilan annuel des actions réalisées, en métropole comme en outre-mer», souligne le gouvernement.

Par ailleurs, ce plan devra bénéficier d’un suivi semestriel. Si beaucoup de mesures n’impliquent pas de dispositions législatives, elles seront inscrites «au fil des opportunités des textes». Au niveau budgétaire, chaque ministère concerné s’est engagé, mais l’enveloppe globale n’est pas communiquée.

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