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Grand Angle

La droite espagnole instrumentalise l’affaire de l’ilot Perejil pour fustiger l’«abandon» du Sahara par Sanchez

Cette année, la droite espagnole ne s’est pas contentée de célébrer le dénouement de la crise de l’ilot Perejil de juillet 2002. Elle s’est emparée de l’événement pour couvrir d’éloges la politique de l’ancien Premier ministre José Maria Aznar et condamner l’«abandon» par Pedro Sanchez du Sahara occidental au Maroc.

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Aznar et Trillo, lors du défilé des troupes à la base de Rabasa, à Alicante. / Ph. EFE
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La commémoration, ce lundi 11 juillet, du 20e anniversaire de la crise de l’ilot Perejil intervient alors que les relations entre le Maroc et l’Espagne entament «une nouvelle phase», depuis le 14 mars dernier.

A Madrid, les milieux de droite l’ont instrumentalisé pour attaquer le chef du gouvernement, comparant l’action de 2002 de José Maria Aznar, alors Premier ministre et chef du Parti Populaire, et l’ «abandon» par le socialiste Pedro Sanchez du Sahara occidental au Maroc.

L’ex-ministre de la Défense, Federico Trillo (28 avril 2000 – 18 avril 2004), a multiplié à cette occasion les sorties médiatiques. Après des éloges à la gestion d’Aznar du dossier Perejil, il a déclaré, dans une interview donnée à El Debate, que «le chef du gouvernement Sanchez devra rendre compte de ce qui s'est passé dans les coulisses diplomatiques, en renonçant aux principes et aux résolutions des Nations unies et à la responsabilité de l'Espagne en tant que puissance colonisatrice du Sahara occidental».

Même son de cloche auprès de l’universitaire Emilio Sáenz-Fracés qui estime dans des déclarations à la publication Heraldo.es que «l'histoire montre que l'Espagne n'a pas su utiliser les leçons supposément apprises lors de l’affaire Perejil».

Une opinion à laquelle adhère l’ancien ministre Trillo. La dernière crise avec le Maroc, de l’exode de milliers de Marocains de mai 2021 vers Ceuta, «a été résolue, comme cela arrive toujours avec les gouvernements du PSOE, en présentant des excuses au Maroc pour avoir défendu nos droits», a-t-il affirmé dans une autre interview accordée à l’agence de presse EFE.

Perejil et le Sahara, le contexte international a changé

La commémoration du 20e anniversaire de l’affaire Perejil a servi de joker pour la droite pour condamner l’appui de Pedro Sanchez au plan marocain d’autonomie au Sahara occidental. «Sanchez a personnellement écrit une lettre au roi du Maroc et a convenu d'une "nouvelle relation basée sur la confiance et le respect mutuel"», rappelle Heraldo.es.

Le directeur de l’Institut royal Elcano, Charles Powell, affirme que José Maria Aznar bénéficiait en 2002 «de la majorité absolue au Parlement. En revanche, Sanchez a dû faire face à sa crise avec le Parlement le plus fragmenté de l'histoire de l'Espagne, avec le premier gouvernement de coalition de l'histoire» de l’Espagne.

A ce facteur domestique, il y a celui du contexte international qui «était différend» notait l’universitaire Sáenz-Francés. Et d’expliquer que «sous Aznar, l'Espagne avait une relation très étroite avec les Etats-Unis alors qu’aujourd'hui c'est le Maroc qui bénéficie de cette relation particulière et qui a bien su jouer ses cartes. A l'échelle mondiale, nous sommes moins forts, nous avons une position plus faible et un problème de crédibilité en politique étrangère qui nous fait toujours recourir à l'Europe».

Pour mémoire, les Etats-Unis ont accordé au Maroc le statut d'allié majeur hors OTAN en juin 2004, soit quelques mois après la décision du socialiste José Luis Rodriguez Zapatero de retirer l'armée espagnole de l’Irak.

«Européaniser» les conflits de l’Espagne avec ses pays voisins de la rive sud de la Méditerranée «n'est pas la panacée. Il faut être ferme et avoir des alliés puissants qui vous soutiennent», indique pour sa part Charles Powell de l’Institut royal Elcano.

En effet, après l’exode de milliers de Marocains à Ceuta en 2021 et la suspension par l’Algérie de son traité d’amitié avec l’Espagne, conclu en novembre 2002, soit trois mois après la crise Perejil, Madrid a immédiatement sollicité l’appui de Bruxelles face à Rabat et Alger.

Pour rappel, le 11 juillet 2021, le ministre marocain des Affaires étrangères, Nasser Bourita, avait condamné les «tentatives de l’Espagne d’européaniser» la crise migratoire avec le Maroc de mai 2021.

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