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Grand Angle

Maroc : Le rapport annuel de l’AMDH insiste sur la protection du droit à la vie

Traitant de grandes thématiques liées à l’éducation, à l’égalité, aux libertés publiques et individuelles, le dernier rapport annuel de l’AMDH a consacré aussi une importante partie au droit à la vie, dans diverses dimensions. En filigrane, il a rappelé les engagements du Maroc qui devraient conduire à l’abolition de la peine de mort.

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Photo d'illustration / DR.
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Sur la base des recommandations de l’Instance équité et réconciliation (IER) depuis 2004, ainsi que du deuxième Protocole facultatif au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, l’Association marocaine des droits humains (AMDH) estime que les voies sont ouvertes pour une prise de décision politique afin d’abolir la peine de mort au Maroc, d’autant que l’article 20 de la Constitution prévoit la protection du droit à la vie. Dans son dernier rapport annuel pour 2021, dévoilé mardi, l’ONG a rappelé que les tribunaux du pays continuaient à rendre des condamnations à mort. «L’État marocain s’abstient toujours de voter en faveur d’un moratoire contre l’application de la peine de mort, sachant qu’aucune condamnation n’a été exécutée depuis près de trois décennies (1993)», a rappelé l’organisation.

Compte tenu du rapport annuel du Conseil national des droits de l’Homme (CNDH) ainsi que des données fournies par le Ministère public en ouverture de la Conférence de la Coalition marocaine pour l’abolition de la peine de mort, «le total des condamnés à mort à la fin de 2020 s’est établi à 74 personnes, dont deux femmes». «A la fin de 2021, leur nombre était de 78 (selon le CNDH) ou 79 (selon le Ministère public) et étant donné qu’aucun n’a bénéficié d’une grâce et qu’aucun décès n’a été enregistré, on peut conclure que le nombre de condamnations à mort prononcées en 2021 a été de quatre ou cinq», a noté l’AMDH.

Les suicides, un tabou du droit à la vie

Concernant les décès par suicide, «bien que des données officielles ne soient disponibles au Maroc, un rapport de l’OMS de 2016 sur le sujet annonçait un nombre de 1 014 suicides et un taux de 2,9 pour 100 000 habitants», indique le rapport de l’AMDH. «Les chercheurs et les personnes qui s’intéressent au phénomène s’accordent à dire que la région de Tanger-Tétouan-Al Hoceïma connaît le plus grand nombre de cas de décès par suicide», note le rapport.

«Quant aux causes, les spécialistes estiment que mettre fin à la vie traduit une détérioration fondamentale de l’état psychologique, liée à des facteurs sanitaires et sociaux se chevauchant avec les facteurs économiques», constate l’association. Cette dernière estime que «cela exige que l’État améliore le système de santé mentale, comme le souligne l’OMS dans ses recommandations qui mettent la santé physique et mentale sur un pied d’égalité».

Les cas suivis par l’AMDH en 2021 «ne représentent qu’une faible proportion du total», mais ils sont de 168, répartis selon les régions suivantes : Tanger-Tétouan-Al Hoceima (49, soit 29,17%), Beni-Mellal-Khénifra (33, soit 19,64%), Casablanca-Settat (17, soit 10,12%), Souss-Massa (17, soit 10,12%), Marrakech-Safi (15, soit 8,93%), Fès-Meknès (14, soit 8,33%), l’Oriental (8, soit 4,76%), Rabat-Salé-Kénitra (5, soit 2,98%), Drâa-Tafilalet 4 cas (2,38%), Guelmim-Oued Noun (4, soit 2,38%), Laâyoune-Es Sakia El Hamra (1, soit 0,6%) et Dakhla-Oued Ed-Dahab (1, soit 0,6%).

L’environnement, une dimension saillante du droit à la vie

Transitions environnementale, démographique et socio-économique sont en cours au Maroc depuis une dizaine d’années, multipliant les défis en termes de droits humains qui incluent la dimension climatique. C’est ainsi que le rapport annuel de l’AMDH a consacré une section exhaustive qui fait état de «la détérioration des ressources naturelles du pays». Le «niveau alarmant et critique dans certaines zones fragiles» entrave désormais une partie des acquis économiques et sociaux, mettant à mal «les conditions de vie et le bien-être des générations actuelles et futures», a alerté l’ONG.

Prônant le droit à un environnement sain et au développement durable au Maroc, l’association s’est basée sur une analyse des données publiques recueillies depuis 2020, y compris à travers les médias. «Cette lecture a permis de mettre en évidence la fragilité de l’environnement, encore exacerbée par les multiples pressions exercées par les activités humaines ou des facteurs émergents comme le changement climatique», observe l’organisation. Cette dernière note notamment la raréfaction des ressources naturelles, principalement l’eau, ainsi que la dégradation des composantes de l’environnement et de la qualité de l’air par région.

«La part des ressources en eau par habitant est passée de 2 560 m² par an en 1960 à 620 m² actuellement. Si la tendance actuelle se confirme, cette part atteindra 500 m² par habitant et par an dans les prochaines années», alerte l’AMDH. «La biodiversité souffre également d’une dégradation croissante du domaine écologique, notamment en lien avec la perte d’environ 17 000 hectares de forêts par an», constate encore l’association, ajoutant que l’«attrait pour toutes sortes d’activités dans le littoral a conduit à sa surexploitation».

Des mesures globales à prendre en urgence

«Ces diverses manifestations de dégradation environnementale entraînent plusieurs effets sur le cadre de vie de la population, ce qui a creusé le déficit environnemental du pays pour atteindre 1 hectare par personne, tandis que le Maroc jouissait d’une réserve confortable à l’aube de son indépendance», analyse encore l’ONG. Pour elle, les divers problèmes affectant le milieu naturel résultent de facteurs directs et indirects, avec des dimensions liées à «la gouvernance, la croissance démographique, la justice environnementale et la pauvreté». «Le droit à un environnement sain est étroitement lié à l’être humain et au droit à la vie (…) la communauté internationale et les Nations unies ont pris conscience de la détérioration qui affecte quotidiennement l’environnement et qui est due aux facteurs climatiques», rappelle le rapport.

Dans ce document, l’AMDH préconise de déployer des efforts efficients «pour élaborer un plan d’action législatif visant à protéger l’environnement de toutes les formes de détérioration et de pollution et garantir un cadre de vie sain, écologiquement stable, par la mise en place et la signature d’accords internationaux dans ce domaine». Dans ce sens, «les droits humains doivent être placés au centre de l’action climatique, en préservant la nature, en luttant contre la pollution et en doublant la prévention de futures épidémies», insiste la même source.

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