Le Maroc est préoccupé par la présence de Daesh au Sahel, affirme le directeur du Bureau Central d’investigations judiciaires (BCIJ), Habboub Cherkaoui, dans une interview accordée à l’agence de presse EFE. «Ce qui agace et inquiète, actuellement, le Maroc est la région du Sahel, devenue un sanctuaire sûr et fertile pour les réseaux terroristes (...) et où l’Organisation de l’Etat Islamique s’est déplacée après sa déroute en Syrie et en Irak», a-t-il souligné.
Le Sahel, précise Cherkaoui, est un espace où prolifère l’activité de différents réseaux criminels organisés spécialisés dans la traite des êtres humains, l’immigration illégale, la contrebande et le trafic d’armes et de drogues. «Le Maroc est préoccupé par la collusion entre le terrorisme et les réseaux criminels qui peuvent financer des organisations terroristes grâce à leurs profits», a-t-il prévenu.
Le chef du BCIJ a reconnu que l'idéologie de Daesh continue de «séduire des adeptes au Maroc et les personnes fidèles à ce groupe nourrissent l’ambition d'aller dans les points chauds des conflits, particulièrement dans la région du Sahel». Face à ces menaces, les services de sécurité marocains agissent «efficacement dans le cadre de leur stratégie d'anticipation», en arrêtant ceux qui envisagent de rejoindre ces zones ou de mener des attaquer's au Maroc.
Pas de coopération avec l’Algérie
Le BCIJ a détecté ces dernières années des liens entre des jihadistes arrêtées au royaume et la zone du Sahel. Ainsi, la majorité des armes à feu saisies proviennent de cette région subsaharienne.
Habboub Cherkaoui a, par ailleurs, pointé du doigt la passivité des autorités algériennes à «collaborer avec les Marocains dans la lutte contre le terrorisme». Abdelhak Khiame, le premier directeur du BCIJ entre 2015 à 2020, avait déjà exprimé les mêmes critiques, et ce, bien avant la rupture des relations diplomatiques entre les deux pays, le 24 août 2021.
«Nous sommes préoccupés par la proximité de notre territoire avec les camps du Front Polisario à Tindouf (dans le sud-ouest algérien), car il est confirmé qu'il y a des jeunes qui y ont été recrutés par des imams locaux et envoyés dans les rangs de Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI)», précise le directeur du BCIJ.
Pour rappel en septembre 2017, un média proche du Polisario avait réservé un long article aux recrutements des jeunes des camps de Tindouf par les groupes terroristes opérant au Sahel. Du pain béni pour les cellules terroristes qui essaiment dans la région, disposant ainsi de jihadistes ayant une formation dans le maniement des armes, la fabrication des explosifs, de surcroît parfaitement adaptés aux conditions de vie au Sahara.
«Le Sahel est une grande préoccupation tant aux niveaux régional et international, et constitue une menace non seulement pour les pays africains mais aussi pour les pays arabes et européens.»
En mettant l’accent sur la menace terroriste émanant du Sahel, le directeur du BCIJ s’inscrit sur la même ligne défendue par les autorités espagnoles. En effet, le gouvernement ibérique ne cache pas ses inquiétudes face à l’expansion des groupes terroristes dans la région. Madrid a d’ailleurs accueilli, le 4 avril, la 3e Assemblée générale de l'Alliance Sahel. Une réunion présidée par le ministre des Affaires étrangères, José Manuel Albares, et qui a connu l’adhésion des Etats-Unis, le Canada et la Suède.
En pleine crise des relations avec l’Espagne en 2021, le Maroc n'a pas suspendu sa coopération sécuritaire avec l’Espagne.