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Grand Angle

France : Bernard Lugan, un «africaniste contesté» choisi comme conseiller par Zemmour

Dans sa liste des «conseillers aux Affaires étrangères», le candidat à l’élection présidentielle française a choisi comme référence Bernard Lugan. Historien controversé et africaniste contesté, il est l’une des figures de l’extrême droite européennes avec lesquels le Maroc entretient des relations.

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Bernard Lugan, ex-militant de l’Action française et membre du Conseil national de résistance européenne. / RT
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Le candidat à l’élection présidentielle française, Éric Zemmour a dévoilé sa liste des «conseillers aux Affaires étrangères». Des «experts diplomatiques» dont les noms ne manqueront pas de provoquer des grincements de dents en France, mais également des applaudissements dans les milieux militaires de l’Hexagone et même au Maroc.

Pour les questions africaines, Zemmour sera appuyé par l’historien Bernard Lugan, monarchiste et ex-militant de l’Action française, révèle Le Canard Enchaîné, dans l'édition de cette semaine. «Fasciné par le régime de l’apartheid sud-africain, cet incurable humaniste a été jusqu’à préconiser la création d’un Etat afrikaner, seul capable, à ses yeux, de garantir la "survie de l’identité blanche"», rappelle l’hebdomadaire français.

Né à Meknès en 1946 alors que le Maroc est sous le Protectorat français, Bernard Lugan a quitté le pays en 1959 pour Paris. En 1968, il devient membre de l’Action française, mouvement politique nationaliste et royaliste d’extrême droite. «Après la fac, en 1972, il part au Rwanda en tant que coopérant, afin d’y enseigner l’histoire et la géographie. En 1982, bénéficiant d’une procédure spéciale qui permet à des anciens coopérants de rejoindre l’enseignement supérieur, il trouve un poste de maître de conférence à Lyon III», rappelle la revenue Afrique XXI, dans un article paru le mois dernier.

L’université est alors connue pour abriter «un petit groupe d’enseignants engagés à l’extrême droite, parmi lesquels figurent des membres du Grece (Groupement de recherche et d’études pour la civilisation européenne), un mouvement qui développe des thèses inspirées du racisme "scientifique" du XIXe siècle», précise-t-on.

Une figure de l’extrême droite connue au Maroc

Un lien qui se confirme aux fils du temps. Ainsi, en 1990, il anime une conférence à la demande de l’Association pour défendre la mémoire du maréchal Pétain. En août 2013, il prend part à une conférence avec Alain Soral pour débattre sur l’Afrique.

Sa promotion de «maître de conférence hors classe» à l’université Lyon III, en mars 2001, avait créé un tollé dans les milieux universitaires, à l’origine d’une pétition signée par plus de cinquante africanistes français parmi les plus connus dénonçant une distinction «susceptible de jeter le discrédit sur l’ensemble des études africanistes en France». Ses collègues dénonçant notamment le fait que ses écrits restent bourrés de «facilités intellectuelles».

En 2010, ses propos sur Nelson Mandela, l’homme qui a «tout raté» avait même été jugés «monstrueux» et «moralement insupportables» par l'actuel maire RN de Béziers, Robert Ménard. Huit ans plus tard, Bernard Lugan rallie le Conseil national de résistance européenne, collectif des admirateurs de Renaud Camus, auteur de la théorie raciste du «grand remplacement», qui a même inspiré le terroriste de Christchurch en Nouvelle Zélande. Une instance qui a pour vocation d’«œuvrer à la défense de la civilisation européenne» et contre le «phénomène de substitution de peuples actuellement à l’œuvre» en Europe.

Et bien qu'il soit qualifié d'«imposteur» par ses pairs, Bernard Lugan reste très populaire chez les officiers de l’armée française. D'ailleurs, en mars 2021, il a même été auditionné à huis clos par la mission d’information de l'Assemblée nationale française sur l’opération Barkhane menée au Sahel et au Sahara par l'Armée française. Un choix ayant suscité l'émoi au sein de la communauté des chercheurs spécialistes du Sahel et de l’Afrique, écrit Mediapart.

Le choix doit toutefois réconforter le Maroc. En effet, l’«africaniste contesté» avait assuré en mars 2015, qu’«à l’exception du Maroc, toute l’Afrique du Nord est en guerre». Chroniqueur pour Le360, il est aussi l’auteur de «Histoire du Maroc - Des origines à nos jours» et de plusieurs livres citant le royaume. Il est surtout l’une des figures de l’extrême droite en Europe avec lesquels le royaume entretient d'étroites relations.

Article modifié le 16/02/2022 à 17h18

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