Le calvaire de Kalima Arbouche commence fin mai dernier. Âgée de 62 ans et atteinte d’une maladie grave, elle décide de prendre la route de Strasbourg direction le sud du marocain pour remettre un convoi humanitaire composé de matériel médical et de fournitures scolaires à l’association Fobdec située dans la ville de Beni Zoli près de Zagora. Néanmoins, la source du problème est que l’association n’envoie pas à Kalima le bon de franchise, un document essentiel, signé par l’association et légalisé par les autorités de Beni Zoli qui lui permettra de passer son convoi aux douanes marocaines. L’association promet d’envoyer ce papier par mail à Kalima et cette dernière prend la route pensant que l’association tiendra sa promesse. «Si les gens de l’association m’avaient expliqué qu’ils n’arrivaient pas à avoir ce bon de franchise, je n’aurais jamais pris la route», lance désespérée Kalima contactée cet après-midi.
Le consulat marocain d'Algeciras lui délivre un document inutile
Après deux jours de route, elle arrive à Algeciras, prête à prendre le bateau pour le Maroc mais ne reçoit toujours pas le fameux sésame dans son mail. Elle prend contact avec l’association Fobdec et cette dernière lui explique qu’elle va devoir attendre plusieurs jours car il est extrêmement difficile d’avoir ce papier. Les jours passent et Kalima est bloquée. De plus, elle se fait volée son sac à main contenant de l’argent et son passeport français dans le parking d’un supermarché. Manquant d’argent, elle ne peut faire marche arrière et revenir à Strasbourg, un retour en arrière estimé à 1200 euros. Elle n’a pas d’autres choix que de continuer son odyssée.
Après près de deux mois d’attente à Algesiras, elle décide de se rendre au consulat marocain d’Algésiras. Ce dernier lui délivre un document signé par le consul lui promettant qu’elle pourra passer sans soucis les frontières marocaines. «Je suis allée voir les prix des billets du bateau et le billet le moins cher que je trouve est pour Sebta à 135 euros contre 165 euros pour Tanger, j’ai donc été obligée de prendre le moins cher», explique-t-elle. «Pour moi, ce bateau est celui de la délivrance», lâche-t-elle. Néanmoins, la délivrance est encore bien loin. Arrivée à la douane de Sebta, les douaniers marocains refusent de la laisser passer car elle ne possède pas le fameux bon de franchise. «J’ai lu votre papier provenant du consulat marocain d’Algeciras et il n’a aucune valeur ici. J’exige le bon de franchise pour vous laisser passer. La loi c’est la loi», lui crie un douanier, explique-t-elle.
Remarques racistes
Par ailleurs, étant Française d’origine algérienne, Kalima confie qu’elle a également subi des remarques racistes de la part de certains douaniers marocains qui se demandaient comment une «Algérienne poulait aider une association marocaine». Sous un soleil de plomb, sans boire ni manger, Kalima ne peut bouger attendant sur le parking de la douane. Totalement désespérée, elle décide d’appeler Yabiladi pour lui faire part de sa situation et lui demander de contacter des journaux espagnols. La rédaction envoie plusieurs mails à des publications espagnoles basées à Sebta pour les informer de l’histoire de Kalima. Une seule journaliste de «El Faro de Ceuta» répondra positivement à ce message et se déplacera directement à la douane pour rencontrer Kalima et faire un article sur sa situation. «C’était un véritable soulagement de rencontrer Beatriz, la journaliste», déclare-t-elle.
La journaliste emmène également Kalima à la Croix Rouge situé à près d’un kilomètre de la frontière, association qui va lui payer trois jours d’hôtel. Mais les trois jours sont passés et Kalima est toujours dans ce même hôtel qu’elle paie avec son propre argent. «Aujourd’hui, il ne me reste plus que 15 euros. Je suis obligée de ne faire qu’un repas par jour dans une petite cantine pas très loin pour 8 euros. Je vais envoyer un message à des amis et membres de ma famille pour qu’ils m’envoient de l’argent. Je suis complètement désespérée. Je ne suis pas dans un état de conscience normal», lance-t-elle. Elle ajoute qu’elle a tenté de joindre par téléphone le ministre des Affaires étrangères et celui des Marocains résident à l’étranger, mais sans résultat. Kalima rencontre ce soir une nouvelle association pour lui expliquer sa situation, un rendez-vous qui la laisse complétement sceptique.