A Marrakech, la discrimination des femmes s’étend désormais même à l’hôtel lorsqu’elles sont célibataires et/ou non accompagnées. Un constat qui paraît absurde dans le Maroc du XXIe siècle. Pourtant, les faits se sont déroulés ce mardi, lorsqu’un groupe de personnes composées de deux familles avec des enfants et quatre femmes dont des célibataires, s’est vu refuser l’hébergement dans un hôtel 5 étoiles à Marrakech.
«Nous avons fait la réservation sur une plateforme, qui a été ensuite confirmée», nous confie ce mercredi Samed, l’un des membres du groupe. Marié et papa de deux enfants, il ajoute qu'en lisant le règlement intérieur de l’hôtel, le groupe a été surpris par une condition qui le pousse à contacter l’établissement. En fait, la plateforme envoie automatiquement, en cas de confirmation de la réservation, un mail avec les conditions du séjour, le règlement ainsi que différentes brochures. La plateforme précautionneuse précise que «l'établissement assume l'entière responsabilité du contenu de ce message envoyé via (la plateforme)», indique-t-on dans le mail consulté par Yabiladi.
Oui aux familles, non aux femmes célibataires !
Car ce règlement peut contenir des conditions spéciales ou des services à payer en supplément, mais surtout des clauses qui peuvent s’avérer discriminatoires, comme dans ce cas. «Nous avons par hasard découvert le règlement qui, dans sa première phrase, annonce que l’établissement n’accepte pas les femmes de nationalité marocaine, non accompagnées par leurs maris ou un membre de la famille», nous explique Laila B., l’une des filles célibataires du groupe. Sous la mention «remarques importantes», l’hôtel déclare en effet qu'il applique «strictement la législation du Royaume du Maroc en matière de tourisme» et confirme sa position dans le document accompagnant la réservation.
«L’accès à l’établissement se verra strictement refusé à toute femme de nationalité Marocaine n’étant pas accompagnée de son mari ou de sa famille. Des preuves et justifications seront demandées lors du check-in.»
Samed précise que le groupe a «appelé l’hôtel pour vérifier si cette condition s’applique». La réceptionniste leur a dit alors de patienter le temps de consulter le manager avant de revenir vers eux et confirmer cette clause. «Elle nous a indiqué que les filles célibataires n’ont pas le droit de venir», poursuit-il, en ajoutant que l’hôtel a maintenu sa position en leur suggérant même d’annuler la réservation. «On leur a donc demandé de nous écrire cela par mail, chose qu’ils ont faite. Nous étions indignés», indique-t-il.
Laila de compléter : «Au début, on s’est dit que l’hôtel souhaite peut-être garder un aspect familial. L’amie qui a réservé a donc appelé pour expliquer notre situation. Ils ont répondu que les deux familles peuvent venir… mais pas les autres. Choquées, les filles célibataires ont ressenti une atteinte à leur droit.»
«Nous avons trouvé cela bizarre car il n’y a aucune loi au Maroc qui nous prive du droit de prendre une chambre d’hôtel. On n’a pas compris pourquoi nous, filles célibataires, devons être exclues sans raison.»
Des excuses inachevées
Les ennuis du groupe avec ledit établissement ne se sont pas arrêtés à ce niveau. En publiant des captures d’écran sur les réseaux sociaux, chose qui a provoqué une vive polémique, l’hôtel a adressé un message pour «présenter des excuses et évoquer une mauvaise formulation», rapporte Samed. Son amie précise, de son côté, que «le patron de l’hôtel a appelé la maman qui a fait la réservation et lui a d'abord dit qu’il compte nous proposer un arrangement et trouver une solution pour que tout le monde puisse venir». «On lui a répondu que par principe, nous ne venons plus», poursuit Laila. Suite aux informations publiées sur les réseaux sociaux quant à l'incident et les réactions des internautes, le patron de l’hôtel est monté au créneau. «Il a commencé à menacer de nous poursuivre en justice en indiquant que son établissement mandatera un avocat pour nous attaquer», ajoute la jeune femme. Pour Laila, le groupe s’attendait «à des excuses» de la part de l’hôtel suite à cette discrimination et cette mesure «contraire à la loi marocaine».
Yabiladi a tenté à plusieurs reprises de joindre l’hôtel Domaine Abiad ce mercredi, en vain.