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Grand Angle

Maroc : Un rapport accablant pour les hôpitaux à Fès-Meknès

La mission parlementaire exploratoire ayant visité, en novembre et décembre derniers, les infrastructures hospitalières à Fès-Meknès, a rendu sa copie, faisant état d’une pénurie alarmante du personnel médical, en plus de l’absentéisme et du clientélisme qui entravent l’accès aux soins.

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Les membres de la mission parlementaire avec les responsables de la Santé de la région Fès-Meknès. / DR
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La mission parlementaire exploratoire temporaire, constituée le 2 novembre 2020 par la Chambre des conseillers, a rendu cette semaine son rapport après avoir visité, les hôpitaux de la région de Fès-Meknès, en novembre et décembre dernier. Dans son rapport, consulté ce vendredi par Yabiladi, elle regrette, bien que la région dispose d’un centre hospitalier universitaire (constitué de 4 hôpitaux), d’un centre hospitalier régional (constitué de 3 hôpitaux), de 7 centres hospitaliers provinciaux et deux hôpitaux de proximité, Fès-Meknès souffre encore d’un manque de lits avec une moyenne de 6,8 lits seulement pour 10 000 habitants. La région est classée à la 7e place nationale et l’avant dernière parmi celles disposant d’un CHU.

Disparité, pénurie et manques d’équipements

Le rapport pointe du doigt, à plusieurs reprises, la pénurie des médecins (4 pour 10 000 habitants) et des infirmiers (10,8 pour 10 000 habitants). De plus, les disparités entre provinces restent criantes. «Les provinces de Moulay Yacoub, El Hajeb, Taza et Sefrou souffrent d’une pénurie alarmante, que ce soit pour le nombre de lits ou celui du personnel médical, dont les indicateurs restent en deçà des moyennes régionales», constate la mission parlementaire.

Les préfectures de Fès et Meknès ne sont pas non plus épargnées. Selon le rapport, elles «manquent d’établissements de soins primaires, surtout en zone urbaine, ce qui pose des problématiques quant au parcours de soins, censé commencer par ces centres». «Cela provoque une grande pression sur les centres hospitaliers universitaire, régional et provincial», regrette-t-on. A Taounate, où 86% des habitants sont ruraux ou encore à El Hajeb (plus de la moitié des habitants sont ruraux), le nombre de ces établissements reste insuffisant.

La mission pointe aussi du doigt le fait que la préfecture de Fès dispose de 8 hôpitaux, alors que la province de Moulay Yacoub est privée d’hôpital. S’ajoute à cela le fait l’hôpital de Sefrou qui n’est «plus adapté à offrir les services de soin nécessaires à ses habitants», tandis que celui d’El Hajeb «ne répond pas aux critères d’un hôpital provincial».

En ce qui concerne les équipements et le matériel, la région ne dispose que d'un seul appareil d’imagerie par résonance magnétique (IRM), 10 scanners répartis entre les deux préfectures et les différentes provinces et 11 appareils d'écho-doppler. Pour ses laboratoires, la plupart d'entre eux «n'ont pas assez d'équipements nécessaires pour effectuer les analyses». «La province d'El Hajeb est considérée comme la plus pauvre en équipement, suivie d'Ifrane et de Sefrou», indique le rapport.

Quand clientélisme et absentéisme deviennent les maîtres mots

Durant leurs déplacements dans les hôpitaux de la région, les conseillers et membres de la mission ont constaté plusieurs dysfonctionnements, à commencer par un fort taux d’absentéisme de cadres et médecins et de graves problématiques de gestion des ressources humaines. A Boulemane par exemple, le directeur provincial de la Santé dans la région a lui-même reconnu l’existence d’une sorte de «clientélisme partisan». Interrogé par les membres de la mission sur un courtier qui tire profit des rendez-vous à la porte de l’hôpital provincial de Missour, il confirme en indiquant que les autorités locales ont été saisies à propos de cette personne. Les conseillers ont, eux, dénoncé les répercussions du clientélisme, poussant plusieurs cadres venant d’être investis à quitter aussitôt les centres de soin de la province vers d’autres hôpitaux, ce qui privent des citoyens de leur accès aux soins.  

Dans l’hôpital provincial de Taounate, les membres de la mission ont constaté un «écart entre les patients covid-19 déclaré (3) et ceux présents sur place (6)» en plus de la «non-conformité des équipements de protection, y compris la tenue de protection». Le rapport confirme aussi un «accès aux soins et aux repas» ne répondant pas aux normes ou encore la présence de proches de patients «qui résident avec eux dans les mêmes chambres sans protection».

Quant à Taza, son hôpital provincial Ibn Baja, la rapporteuse de la mission, la conseillère Rajaa Kessab (CDT) a constaté que les patients covid-19 sont répartis sur deux étages, laissant entendre une répartition par classe sociale. L’état du premier était «bon et comprend des chambres bien équipées, avec deux lits par chambre, (...) ses patients ont exprimé leur satisfaction de la prise en charge et des soins». Mais au niveau inférieur, composé de grandes salles avec 4 lits chacune, et qui restent différentes du premier notamment en termes d’équipements, les patients ont fait part de leur insatisfaction des soins et de leur prise en charge», écrit la mission.

Celle-ci insiste d’ailleurs, dans ses recommandations, sur la nécessité de veiller à une bonne prise en charge des patients dans les hôpitaux, d’éviter la présence de leurs proches afin de limiter la propagation du coronavirus et de suivre les patients effectuant un isolement sanitaire chez eux.

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