Arrivé à lundi soir depuis Bruxelles, l’avocat international belge Christophe Marchand a été arrêté et placé en zone de transit à l’aéroport Mohammed V de Casablanca, en attente de son expulsion qui a eu lieu dans la mi-journée, ce mardi. Le spécialiste en droit pénal avait prévu d’assister à l’audience du journaliste Omar Radi, tenue ce 29 juin à la Cour d’appel de la ville.
Dans un communiqué parvenu à Yabiladi, son cabinet JusCogens à Bruxelles a indiqué que les autorités marocaines auraient notifié à l’avocat qu’«il ne pouvait pas rentrer sur le territoire» et qu’il serait, de ce fait, expulsé. «Il a passé la nuit sur un banc en zone de transit, son passeport lui ayant été confisqué. Il serait expulsé par avion dans le courant de la journée», a ajouté la même source. Christophe Marchand avait fait un appel urgent au rapporteur spécial des Nations unies pour l’indépendance des juges et des avocats, Diego García-Sayán Larrabure, par ailleurs ancien président de la Cour interaméricaine des droits de l’Homme. Dans la lettre, consultée par Yabiladi, le responsable onusien a été saisi pour qu’«il invite le Maroc à laisser l’avocat rentrer dans le royaume chérifien» et «y exercer son travail».
A l’international, l’avocat Christophe Marchand est connu pour avoir fait partie de la défense du lanceur d’alerte Edward Snowden. Son cabinet fait partie de ceux saisis du dossier du fondateur de Wikileaks, Julian Assange. Me Marchand est également l’avocat des indépendantistes catalans, Carles Puigdemont et Lluis Puig, réclamés par la justice espagnole, ainsi que des revenants de Daech en Belgique.
Auprès de la Cour européenne des droits de l’Homme, l’avocat a fait partie de ceux ayant obtenu une jurisprudence sur la lutte contre la torture, qui a concerné le Maroc, entre autres pays. Après un rejet de l’appel, l’arrêté a établi l’impossibilité pour la justice européenne d’utiliser comme preuves, dans un procès pénal, des informations que l’on pense être obtenues sous la torture dans un Etat tiers à l’Europe.
Les autorités marocaines invoquent «une décision souveraine»
Pour leur part, les autorités marocaines ont invoqué une décision souveraine, soulignant que Me Christophe Marchand était déjà concerné par une interdiction d’entrée sur le territoire depuis le 24 février dernier. «Ses positions hostiles envers le Maroc, notamment celles attentatoires à son intégrité territoriale» en seraient la cause. Selon les autorités, cette mesure a donc été prise conformément aux dispositions de l’article 4 de la loi 02.03 relative à l’entrée et au séjour des étrangers, à l’émigration et à l’immigration irrégulières. Le texte prévoit une expulsion, notamment en cas d’interdiction du territoire.
Dans un communiqué publié plus tard dans la journée, la Délégation interministérielle aux droits de l’Homme (DIDH) a indiqué que l’autorisation accordée aux observateurs étrangers pour accéder au territoire national et suivre un procès en cours s’inscrivait dans le cadre des garanties d’une «observation impartiale et indépendante».
La même source a indiqué que même si Me Christophe Marchand avait préalablement connaissance de son interdiction, il se serait «obstiné à se rendre au Maroc dans une tentative d’imposer le fait accompli», ou encore de saisir l’occasion de sa présence pour rédiger des «rapports partiaux et non objectifs». Selon des informations recueillies par Yabiladi, Me Marchand aurait été accompagné d’avocats qui ont été autorisés à accéder au territoire.