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Grand Angle

Diaspo #198 : Abderrahmane Chabib œuvre pour rapprocher davantage le Maroc de l’Italie

Alors qu’il voulait devenir pilote, Abderrahmane Chabib s'est finalement orienté vers la politique. Il a mené une carrière diplomatique qui lui valut d’être nommé Chevalier de l’Ordre du mérite de la République italienne.

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Le Maroco-italien Abderrahmane Chabib. / DR
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En avril dernier, le président de la République italienne Sergio Mattarella l'a fait Chevalier de l’Ordre du mérite. Abderrahmane Chabib devient ainsi le premier Marocain à recevoir cette distinction. Une reconnaissance de l’Italie pour le travail mené par ce talentueux diplomate aux multiples casquettes, notamment auprès des Nations unies et dans le monde.

Né à Casablanca en 1984, au sein d’une famille nombreuse composée d’un père travaillant dans le BTP et d’une mère au foyer, deux frères et trois sœurs, il a émigré en Italie avec sa famille en 1992, alors qu’il n’avait que 7 ans, pour s’installer à Vérone. «Mes parents insistaient toujours sur l’importance de suivre des études. C’est ainsi qu’après les études à l’école élémentaire, j’ai choisi de faire le lycée aéronautique pour devenir pilote», confie-t-il à Yabiladi. Un rêve d’enfant qui ne se réalisera jamais.

Au lycée aéronautique payant, Abderrahmane Chabib est obligé à travailler en tant que serveur pour financer ses études. Une fois diplômé, à l’âge de 18 ans, l’objectif de continuer dans cette branche, en intégrant l’académie aéronautique, se heurte à un autre obstacle : celui de disposer de la nationalité italienne. «Cela a créé en moi un sentiment d’injustice», confie le jeune maroco-italien.

Des sciences politiques à l’Académie diplomatique italienne

C’est alors qu’il opte pour les sciences politiques, domaine qui ne tarde pas à le pousser jusqu’au bout. Ainsi, à 19 ans, il devient conseiller junior pour la pluralité religieuse auprès du ministre de l’Intérieur d’Italie. Habitué à travailler parallèlement à ses études, le jeune est alors représentant d’une banque marocaine en Italie, chargé des ouvertures de compte bancaire auprès de la communauté marocaine dans le nord-est du pays, puis publicitaire pour une télévision italienne. «Cela m’a permis d’acquérir plusieurs compétences, notamment en négociation et en vente», souligne-t-il. Son cursus avançant, Abderrahmane Chabib choisit de se spécialiser.

Il suit alors des cours en Italie mais également en Egypte et au Royaume-Uni. A la fin de son cursus, il se rend à Bangkok pour un stage, qui se transforme en poste permanant d’expert associé et analyste des politiques publiques à Asean Regional Center of Excellence on MDGs (ARCMDG).

«Ma carrière venait ainsi de démarrer dans le domaine des relations internationales. Cette expérience m’a aussi permis de me construire rapidement un réseau. J'ai ainsi passé deux ans entre Bangkok, Vérone et Bruxelles.»

Abderrahmane Chabib

Durant la même période, le jeune travaille aussi avec la Commission européenne, ce qui le pousse à intégrer un master à l’Université libre de Bruxelles (ULB), en diplomatie européenne et candidater, plus tard, pour un doctorat au Collège d’Europe de Bruges (Belgique), pour se spécialiser dans les relations Europe et Afrique du Nord, et réaliser une thèse sur le Maroc.

C’est grâce à son dévouement et son engagement qu’il parvient ainsi à intégrer l’Académie diplomatique italienne en tant que responsable de la formation. En 2016, il devient même directeur exécutif de cette institution, qui recevra la première médaille de la présidence de la République italienne, puis une deuxième du Parlement italien. «Ses initiatives ont même été saluées par l’ancien secrétaire général de l’ONU, M. Ban Ki-moon et qualifiées par lui d’exemple de relations entre l’institut académique et les Nations unies», nous confie-t-il fièrement.

Avec le leader politique italien, Matteo Salvini. / DRAvec le leader de l'extrême droite italienne, Matteo Salvini. / DR

Accorder de l’attention à l’Italie et à la diaspora marocaine

Deux ans plus tard, Abderrahmane Chabib crée le Conseil mondial pour la jeunesse et la diplomatie. Il donne aussi, depuis 2018, des cours de diplomatie économique à l’Université de Vérone en Italie, mais également à l’Université internationale de Rabat, à l’ENCG de Marrakech et l’ENCG de Tanger. En mars 2019, il a même obtenu un doctorat honoris causa de l’Université Analitica Constructivista du Mexique, avant d’être nommé, récemment, secrétaire général de l’association des Nations unies au Maroc. Une nomination qui confirme son attachement à son pays d’origine.

«Je saisis chaque occasion pour pouvoir apporter une visibilité positive au Maroc et une perspective différente des relations internationales. Toutefois, la communauté marocaine en Italie est fragile et ce n’est que maintenant que nous commençons à voir des jeunes, qui se distinguent.»

Abderrahmane Chabib

Car pour ce jeune maroco-italien, «le Maroc a toujours délaissé le potentiel italien, à cause de la langue ou d’autres intérêts et cela a contribué à isoler la communauté marocaine en Italie». Ainsi, dès que l’occasion se présente, Abderrahmane Chabib souligne que «l’Italie peut être un meilleur partenaire pour le Maroc, que d’autres pays». «L’Italie mérite autant d’attention du Maroc que la France, le Royaume Uni ou l’Allemagne», insiste-t-il.

Avec l'ambassadeur du Maroc Omar Hilale lors d'un événement à l'ONU. / DRAvec l'ambassadeur du Maroc Omar Hilale lors d'un événement à l'ONU. / DR

Abderrahmane Chabib regrette, à cet égard, l’absence de MRE dans les centres décisionnels au pays de la Botte. Malgré cela, il affirme que les jeunes générations de Marocains poursuivent leurs études et se spécialisent de plus en plus. «Les Marocains sont des combattants qui n’ont besoin que d’appuis et je pense que le Maroc a une part de responsabilité. Nous aimerons voir les instances marocaines intervenir, notamment les consulats et l’ambassade, pour les accompagner», plaide-t-il. «Il fut un temps où nous n’avions pas de ressources pour gérer les besoins de la communauté marocaine en Italie. Aujourd’hui, nous en avons assez et l’Etat a l’opportunité de choisir des ressources humaines qui conviennent à la communauté italienne», conclut-il.

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