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Grand Angle

Madrid a toujours fermé les yeux sur les crimes du Polisario contre des Espagnols de souche

L’Espagne a fait preuve de fermeté vis-à-vis de l’organisation indépendantiste basque, ETA, ordonnant l’emprisonnement de ses membres ou créant un escadron de la mort, appelée «GAL», pour assassiner les ténors de ce mouvement. En revanche, Madrid se montre très indulgente avec le Polisario, passant sous silence ces attentas meurtrières contre des ressortissants espagnols. 

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Le chalutier canarien «Cruz del Mar» attaqué par le Polisario en novembre 1978. / DR
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L’Espagne a toujours traité avec égards le Polisario et ses dirigeants. L’affaire de l’accueil de Brahim Ghali, sous une fausse identité et en catimini, parait si banale comparée à une autre, datant de l’automne 1985, plus grave à cause de son bilan humain et politique.

En effet, le 23 septembre 1985, le représentant du Front en Espagne, Ahmed Boukhari revendique, dans un appel téléphonique avec la rédaction d’El Pais, les attaques survenues trois jours plus tôt dans les eaux entre le Maroc et les Iles Canaries, contre le chalutier El Junquito et le patrouilleur de l’armée espagnole Togomago. Le bilan de ces actes est de deux morts de nationalité espagnole, un civil et un militaire, et une dizaine de détenus dans les rangs de l’équipage du bateau de pêche.

Une revendication qui n’a pas suscité de réaction immédiate du gouvernement socialiste que présidait alors Felipe Gonzalez. L'exécutif a lancé des négociations avec la direction du Polisario en vue d’assurer la libération des marins d’El Junquito, emmenés de force à Tindouf, sur le territoire algérien. Un objectif qui se concrétise le 28 septembre 1985, grâce à une médiation de l’Algérie. Pour rappel, en 1980, le Front avait enlevé 38 pêcheurs des Iles Canaries.

La justice espagnole ferme les yeux sur ces attaques

Au lendemain de cette libération, le gouvernement socialiste décrète l’expulsion du représentant du Front en Espagne, Ahmed Boukahri. L’entrée en vigueur de cette décision accusera du retard, car ce n’est que dans la nuit du 1er au 2 octobre 1985 qu’une escouade de policiers fait irruption dans un hôtel où un dîner est organisé en l’honneur de Boukhari pour le conduire à l’aéroport de Barajas à Madrid et lui signifier l’ordre de son expulsion. Une décision, contestée par le parti communiste espagnol et une partie de l’aile radicale au sein du PSOE.

Malgré cette double attaque, ayant fait deux morts espagnols, la justice n’a pas jugé bon ouvrir une enquête contre les milices du Polisario, se montrant très indulgente avec le Polisario. En revanche, elle a affiché une fermeté avec l’organisation indépendantiste basque ETA. Pire, des médias ibériques ont brillé par leur traitement partial de cette affaire. Dans son édition du 29 septembre 1985, El Pais écrit que le fils du marin tué dans l’attaque contre le chalutier El Juquito «ne garde aucune rancœur contre le Polisario (…) Dans un mois, les choses vont se calmer et tout continuera comme auparavant». Et de prétendre qu'après leur libération, les pêcheurs canariens détenus par le Front «se sont convertis en les meilleurs propagandistes du Front sahraoui».

Les attaques de septembre 1985 du Polisario contre des civils et des intérêts espagnols, s’inscrivent dans une longue liste d’attentas perpétrés par les milices du mouvement séparatiste. L’Association canarienne des victimes du Polisario (ACAVITE), créée en 2006 à Las Palmas, indique que 300 familles canariennes sont affectées par les attentas du Front contre des pêcheurs de l’archipel. Parmi ces attaques figurent le mitraillage du chalutier canarien «Cruz del Mar» en novembre 1978 au cours duquel sept membres d'équipage ont péri, ou la disparition, deux ans plus tard, du «Mencey de Abona» avec à son bord 14 marins pêcheurs.

Après l’expulsion d’Ahmed Boujari, le 2 octobre 1985, la représentation du Polisario en Espagne est restée fermée jusqu’à son réouverture en 1989. Les victimes des attaques d’El Junquito et du patrouilleur Togomago sont, depuis, oubliées.

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