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Interview

Fayçal Ziraoui, le polytechnicien qui pense avoir identifié le «Zodiac Killer» [Interview]

Zodiac Killer est le surnom du tueur en série qui a hanté et terrorisé la Californie, durant les années 1960 et 1970. Bien que son portrait robot soit établi, son identité n’a jamais pu être découverte par le FBI. Après avoir inspiré le septième art, le mystère de ce «serial killer» a peut-être été percé par un polytechnicien franco-marocain... INTERVIEW.

Publié
Fayçal Ziraoui / DR.
Temps de lecture: 3'

Comment avez-vous découvert l’énigme du Zodiac Killer ?

Je me suis intéressé à l’affaire du tueur du Zodiac fin décembre 2020, quand j’ai appris qu’un code secret que le tueur avait adressé au FBI il y a 50 ans, venait d’être résolu par une équipe internationale. J’apprenais aussi à ce moment-là que d’autres codes restaient à résoudre, réputés indéchiffrables. Mais l’enjeu était de taille, l’un d’eux renfermerait l’identité du tueur qui a terrorisé la Californie dans les années 1970.

Mes vacances de confiné démarraient, et en guise d’occupation je décidai d’y jeter un œil. J’ignorais que deux semaines plus tard, je découvrirais la possible identité du Zodiac.

Mais par où démarrer face à une dizaine de symboles cryptiques ? En fait l’idée de départ était simple : les codes sont théoriquement quasi impossibles à résoudre, si on les analyse individuellement. Mais en étant pragmatique, on se rappelle que les codes sont l’œuvre du même auteur. Ce sont leurs points communs et le contexte global de l’affaire qui m’ont aidé.

Un des cryptogrammes du tueur du Zodiaque / DR.Un des cryptogrammes du tueur du Zodiaque / DR.

Par exemple, le Zodiac avait disséminé des indices dans ses lettres, un peu comme une charade. «Pole magnétique», «Méridien», «Angle»... bingo, je comprends qu’il faut trouver des coordonnées géomagnétiques d’un lieu. Et en effet, l’un des deux codes indiquait le lieu (et le jour) d’une attaque à la bombe contre des écoliers et dont le Zodiac menaçait régulièrement la population.

Il me restait alors à m’atteler au principal défi, trouver l’identité du tueur, qui à le croire, était renfermée dans le code le plus difficile. Sur les forums, je me rendais compte que des gens passionnés avait passé des années à accumuler des informations, et construire des théories sur tel ou tel suspect (parfois leur propre père !). Bizarrement, ce code me semble beaucoup moins complexe que le premier, peut-être parce qu’il lui emprunte quelques similarités, et qu’il fait appel à des notions d’électronique qui ne me sont pas étrangères.

Il pointait un individu nommé Lawrence Kaye, ou Larry Kay comme il aimait à se faire appeler. Cette découverte déclencha un choc d’adrénaline. Un temps suspecté d’avoir été le Zodiac, il habitait non loin de l’école visée par la menace d’explosion. Trop tard en revanche, il est mort en 2010.

Portrait robot du suspect qui serait le Zodiac KillerPortrait robot du suspect qui serait le Zodiac Killer

Avez-vous essayé de vous mettre dans la peau du personnage pour mieux percer son mystère ?

En vérité, il était difficile de se mettre dans sa peau, car sa personnalité est un mystère pour beaucoup de monde. Certains le qualifient de génie, d’autres de personne tout à fait moyenne, voire attardée. Il se déguisait, variait ses modes opératoires, et aimait cultiver une image de mystère : impossible de le «mettre dans une case» comme on dit. C’est peut-être aussi pour cela que cette histoire fascine.

Cependant, chaque nouvelle découverte que je faisais était un pas de plus dans l’obscurité de ses pensées, une descente aux enfers orchestrée il y a 50 ans et dont je décodais la partition... au point que c’est devenu franchement flippant. Progressivement, je me rendais compte que ce n’était pas un jeu et que les victimes étaient bien réelles.

Inscriptions sur la voiture de l'acteur Bryan Hartnell, un des survivants parmi les victimes du tueur en série, le 27 septembre 1969Inscriptions sur la voiture de l'acteur Bryan Hartnell, un des survivants parmi les victimes du tueur en série, le 27 septembre 1969

Pensez-vous qu’il serait utile aujourd’hui de dévoiler son identité ?

Quand j’ai compris que ces découvertes pouvaient faire basculer l’affaire après tant d’années, j’ai envoyé par courrier mes résultats au FBI. J’attends leur retour mais, vous savez, ils n’ont pas coutume de commenter les dossiers en cours. La police de San Francisco a quant à elle accusé réception de mes travaux, et un officier en charge des homicides m’a indiqué qu’il reviendrait vers moi.

Je pense que cette histoire pourrait être le dernier chapitre de l’affaire du Zodiac et aider les familles des victimes à faire le deuil de leurs disparus. En tous cas, l’enquête est toujours ouverte et j’espère que ma contribution aidera à faire toute la lumière sur celle-ci.

Pourquoi ne pas raconter cette aventure dans un livre ou la développer dans un nouveau scénario sur le Zodiac Killer ?

Comme l’histoire d’un type ordinaire qui traque un tueur en série à ses heures perdues ? Faut voir… (rires) Plus sérieusement, si ces résultats sont confirmés par le FBI, ils raconteraient une histoire bien différente de l’excellent film de David Fincher, «Zodiac» (je ne vais pas vous spoiler). Donc pourquoi pas ?

Mais il est surement un peu tôt, dans tous les cas, et je ne vous cache pas que ma plus forte envie à court terme sera de retrouver mes proches à Casablanca, et de retrouver les saveurs de mon pays.

Les crimes attribués au tueur du Zodiaque

Au cours des enquêtes menées depuis les premiers meurtres soupçonnés d’être commis par le Zodiac Killer, ou tueur du Zodiaque, cinq assassinats lui ont été attribués de façon certaine, deux tentatives de meurtre et un enlèvement. En plus des faits avérés, il est soupçonné d’avoir commis plusieurs autres meurtres, entre 1966 et 1978.

Dans un ouvrage inspiré de cette histoire et de celle des victimes, l’écrivain et dessinateur Robert Graysmith, qui s’est beaucoup intéressé au Zodiac Killer, a établi une liste de 49 noms. Pour sa part, le tueur a revendiqué les meurtres de 37 victimes. Ces dernières sont souvent de jeunes couples âgés entre 17 et 30 ans, trouvés dans leur voiture au parking ou dans des endroits en retrait des centres d’activité (bord de lac, entrée de forêt...).

Certains survivants ont pu raconter les scènes ou ils ont failli être enlevés ou tués, ce qui a confirmé le modus operandi du tueur, sans pour autant permettre de l’identifier.

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