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Grand Angle

Provinces du Sud : Une étude plaide pour la «fin de l'assistanat et l'économie de rente»

En évaluant l’impact des actions de l’agence pour la promotion et le développement économique et social des provinces du sud, deux chercheurs de l’EHTP et l’Université Ibn Tofail affirment que la nouvelle génération de Sahraouis est «plutôt encline à vouloir privilégier un nouveau mode de gouvernance territoriale.

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Photo d'illustration. / DR
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Comme la plupart des régions du monde, le Maroc a redoublé d'efforts pour rendre ses territoires plus attractifs, notamment ceux du Sud. Pour cela, une agence pour la promotion et le développement économique et social des provinces du sud du royaume (ADPS) a été créé avec comme mission d'accompagner les acteurs locaux dans la proposition et la réalisation de projets de développement. Ainsi, les projets mis en place par l’agence ont été réalisés à 70% selon le chiffre communiqué par le gouvernement en novembre dernier.

Dans un article publié dans la Revue d’étude en management et finances d’organisation (REMFO) de janvier 2021 et repris par le portail IMIST, Mohammed Haichar enseignant chercheur à l’Ecole Hassania des Travaux Publics (EHTP) et Sanae Haouari, docteure en Sciences de gestion à la Faculté des Sciences économiques, juridiques et sociales Ibn Tofail de Kénitra se sont penchés sur l’évaluation de l'impact des actions de l’ADPS. Intitulée «Economic intelligence : Case of the Agency for the promotion and the economic and social development of the southern provinces», l’étude analyse son bilan selon le modèle de l’intelligence territoriale.

Les «élites locales» ne sont plus un écran ou une interface avec les citoyens

Dans ce sens, les deux chercheurs  que «l'agence a initié un nouveau modèle de développement intégré qui vise la gestion durable des ressources naturelles, la valorisation du patrimoine culturel, la création de connectivité et de complémentarité entre les régions du sud et le renforcement de la gouvernance locale au service de la transparence et de la démocratie pour créer un climat favorable pour les investisseurs potentiels». Ils constatent cependant une «mauvaise gouvernance publique locale», en expliquant que «la gestion des affaires publiques est soumise au non-respect de la loi par une catégorie d'élites politiques, ce qui entraîne une perte de confiance, des tensions sociales, de la corruption, etc».

«La dialectique basée sur des relations purement matérielles (promotion nationale, terrains viabilisés, soutien en espèces, privilèges divers ...), considérant les "élites locales" comme un écran et comme une interface avec les citoyens, notamment en période de tension, a montré ses limites, tant l'encadrement ainsi préconisé semble inadapté et interrogé par la nouvelle génération, plutôt encline à vouloir privilégier un nouveau mode de gouvernance territoriale répondant aux attentes de toutes les couches sociales.»

Extrait de l’étude

De plus, ils pointent «un développement urbain basé sur l'opérationnalisation des infrastructures et leur réalisation comme une fin en soi sans prise en compte des besoins de la population, ce qui entraîne un gaspillage des dépenses publiques». «L'approche basée à la fois sur des visions sectorielles et sur une politique d'apaisement des revendications locales est privilégiée, au détriment d'une analyse objective du diagnostic de la situation actuelle, au mépris des enjeux politiques et des considérations ethniques», regrettent-ils encore.

Repenser les principes de base du cadre conventionnel traditionnel

Afin de rendre l'offre territoriale de l'agence pour la promotion et le développement économique et social des provinces du sud plus «cohérente et efficace», les deux chercheurs proposent un certain nombre de mesures à adopter. Ainsi, ils suggèrent de «revoir le système d'aide en le focalisant davantage sur les populations les plus vulnérables». «L'accélération du rythme de développement attendu ne dépendra certainement pas de la taille des fonds mobilisables par les pouvoirs publics ou le secteur privé, mais plutôt du dynamisme, l'engagement des élites locales, une plus grande implication du secteur privé et la perception du nouveau cadre institutionnel, prévoyant notamment la déconcentration des ressources de financement et de gestion, afin de garantir l'efficience et l'efficacité des actions de développement recommandées», arguent-ils.

Pour eux, «les facteurs de succès dépendront de la démarche adoptée, qui consiste à répondre à des besoins urgents préalablement ciblés et identifiés par l'agence du sud en concertation avec les élus locaux, notamment la réduction des déficits dans les domaines de la santé, de l'éducation, des infrastructures routières, et eau potable, électricité et logements sociaux».

L’étude appelle aussi à «atténuer l'accent systématique des aspects politiques et tribaux au niveau local en tant que "prélude" à toute action de développement recommandée» et à «prendre en compte la spécificité locale en termes de développement urbain et économique». Et d’expliquer que «le développement urbain doit être conçu en tenant compte des besoins réels des populations locales, plutôt que de favoriser la tendance à créer des agglomérations ne répondant pas aux besoins préalablement identifiés ou n'ayant pas de réel enracinement économique par rapport aux potentialités locales».

Les deux chercheurs estiment enfin que «l'agence doit repenser les principes de base du cadre conventionnel traditionnel, régissant ses relations publiques avec les élus locaux et les associations, en mettant fin à la démarche d'assistanat et d'économie de la rente, adoptées comme solutions palliatives permanentes» et proposent de «mettre en place un cadre attractif pour les investissements privés».  

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