Dans les semaines à venir, le Maroc connaîtra le lancement d’une large campagne de vaccination contre le nouveau coronavirus, conformément aux instructions royales données lundi 9 novembre, à l’issue d’une séance de travail consacrée à la stratégie qui sera adoptée dans ce sens. Ce processus devra être lancé dès que les essais cliniques et les résultats des laboratoires ayant développé le vaccin confirmeront son innocuité, son efficacité et sa capacité à produire une immunité durable chez la population générale.
Directeur de la population au sein du ministère de la Santé et membre ès du Comité national technique et scientifique consultatif de vaccination, Dr Abdelhakim Yahyane a déclaré ce mardi à Yabiladi que les essais en cours au Maroc suivent l'agenda fixé par les instructions royales. Il a rappelé que «le Maroc s’est inscrit dans la troisième phase des recherches sur le vaccin, avec des essais qui ont concerné un peu moins de 600 personnes éligibles (sur la base d’examens) de toute la population marocaine, y compris des étrangers vivant dans le pays et ayant accepté d’y participer».
Les tests au Maroc pourraient être finalisés dans une semaine
Dr Yahyane souligne que ces essais «ne sont pas encore terminés aujourd’hui», mais qu’«ils sont en phase terminale». Ils sont aussi suivis par «un comité scientifique et technique, constitué de chercheurs indépendants, des sommités nationales et internationales reconnues à grande échelle par leurs publications scientifiques, désignés par le ministère de la Santé».
Abdelhakim Yahyane a indiqué à Yabiladi que jeudi dernier, la deuxième présentation de ces essais a permis d’analyser le déroulement de ce processus, qui connaît «satisfaction» et dont les résultats seront annoncés à la fin. «Nous notons d’ores et déjà qu’il n’y a pas eu d’effets indésirables majeurs et ceux qui ont été observés sont très minimes, tout à fait normaux, comme on en remarque pour tous les autres vaccins», a-t-il déclaré.
La troisième phase des tests permet justement de mieux connaître les effets secondaires du vaccin et qui n’auraient pas été identifiés au cours des deux premières étapes des essais. En septembre dernier, le gouvernement chinois et Sinopharm n’ont pas rapporté d’effets indésirables. Pour l’heure, aucune des personnes ayant été vaccinées n’aurait contracté la covid-19.
«Nous attendons avec impatience le terme de ce process, probablement la semaine prochaine, pour ensuite recevoir les résultats du laboratoire chinois. Le protocole exige en effet que c’est ce dernier qui devra finaliser les analyses et définir un protocole, avec des méthodes scientifiques, avant qu’elles ne soient approuvées par le Maroc», a ajouté Dr Abdelhakim Yahyane.
Le personnel médical et les personnes à risque prioritairement concernés
En août dernier, le Maroc a signé deux accords de partenariat avec le laboratoire chinois Sinopharm CNBG (China National Biotec Group Company Limited), faisant de lui le pays parmi les premiers qui pourront recevoir des lots de vaccins contre le nouveau coronavirus. Dans ce cadre, le ministre de la Santé, Khalid Ait Taleb, a annoncé que le royaume «sera à même, probablement très prochainement, de produire un vaccin dans le cadre d’échange d’expertise entre Rabat et Pékin».
En attendant, Sinopharm s’est engagé à fournir 10 millions de doses, au cours du mois de décembre, ce qui permettra de vacciner 5 millions de citoyens dans un premier temps. Comme nombre de vaccins conventionnels, le «Coronavac» est composé de deux prises espacées de 21 jours.
Les autorités chinoises ont également autorisé l’utilisation urgente de trois vaccins expérimentaux, en troisième phase des essais, dont deux développés par la China National Biotec Groupe Co., filiale de Sinopharm, en plus d’un par la société biopharmaceutique Sinovac. Depuis, 90% des employés et de leurs proches ont été vaccinés, en plus du personnel médical, celui des douanes, des diplomates et le personnel de l’industrie et des services.
Ville de la province du Zhejiang, Jiaxing (sud-ouest de Shanghaï) a connu aussi une opération similaire. Le processus a privilégié des travailleurs du secteur de la médecine et de la santé, en plus des personnes les plus vulnérables au SARS-CoV-2, selon une récente annonce du Centre de contrôle et de prévention des maladies de Jiaxing.
C’est aussi le cas des Emirats arabes unis, où les autorités sanitaires ont approuvé l’utilisation urgente du vaccin en troisième phase de tests, pour les professionnels de santé et particulièrement ceux qui traitent les personnes atteintes de nouveau coronavirus. Dans ce sens, le ministre émirati de tutelle, Abdul Rahman Mohammed Al Owais, a déclaré que cette décision était «compatible avec les réglementations et les lois qui permettent un examen plus rapide des procédures d’autorisation».
Des essais à parachever malgré l’utilisation du vaccin
Actuellement, la Chine développe «quatre des onze vaccins ayant atteint la troisième et dernière phase des essais cliniques», a rappelé la Radio et télévision suisse (RTS), qui a recueilli des témoignages à Jiaxing. Citant les responsables chinois, elle confirme également qu’«aucun effet indésirable grave n’a été constaté».
En plus du Maroc et des Emirats arabes unis, les expérimentations se déroulent en Indonésie, au Pakistan, en Turquie, en Egypte ou encore au Brésil. Les autorités de Brasília ont d’ailleurs exprimé leur intention d’inclure le vaccin chinois dans leurs programmes nationaux de vaccination. Gouverneur de São Paulo, João Doria a annoncé une acquisition de 46 millions de doses du Coronavac, approuvée par le gouvernement. Selon lui, une campagne élargie pourrait démarrer en janvier 2021.
Cependant, l’Agence de vigilance sanitaire (ANVISA) a annoncé plus tard la suspension des expérimentations en évoquant un «incident grave» parmi les volontaires. Pour leur part, les partenaires chinois ont soutenu être «convaincus de la sécurité» de leur vaccin et que les faits ne seraient pas liés à la prise du vaccin. La suspension concerne celui de Sinovac et non celui de Sinopharm testé au Maroc.
L’Institut Butantan, organisme public qui coordonne les essais au Brésil, s’est dit «surpris» par la décision de l’Agence de vigilance sanitaire, le jour de l’annonce par le laboratoire américain Pfizer de la mise au point d’un vaccin qui serait fiable à 90%. L'agence a promis de tenir une conférence de presse ce mardi, pour évoquer ce coup d’arrêt.
De son côté, une récente étude publiée par la revue médicale The Lancet a montré que le vaccin chinois, qui utilise une technique anciennement connue pour désactiver le virus dans l’organisme humain, s’est avéré sûr pour l’utilisation et a prouvé la création d’une réponse immunitaire.