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Grand Angle

Maroc : Le fil du feuilleton de l’affaire Mohamed Erraji

Au passage en revue des différentes étapes de «l’affaire Erraji», le bloggeur originaire de Biougra, ville satellite située à une trentaine de kilomètres d’Agadir, on est en droit de se poser un certains nombre de questions. Comment ce jeune est arrivé à côtoyer les détenus de droits communs alors que son seul tort était d'avoir écrit un article. Récit.
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Tout d’abord, il faut savoir que tout a démarré de la collectivité régionale d’Agadir, à savoir la wilaya. En effet, ce sont deux agents de l’institution territoriale, rattachés au service des renseignements généraux (RG), qui ont donné «l’alerte» en convoquant Mohamed Erraji (à deux reprises) après avoir lu un article de celui-ci sur Internet, datant du mois de juin 2007. Dans son écrit, Erraji faisait référence à la taille de Feu Hassan II, à sa posture face à un micro,…Rien qui justifie ce qui va suivre.

Puis c’est au tour du Préfet de police d’être saisi. Il est fort à parier qu’il a dû se sentir «influencé» par les «consignes» des agents (secrets) territoriaux. Il décidait la garde à vue pour le jeune gadiri dans l’attente de la décision du Procureur du Roi. «J’ai été présenté au Roi, dimanche, avant d’être conduit à la prison d’Inezzgane. L’interrogatoire a duré deux voire trois minutes», précise Mohamed Erraji. A la clé, une cellule en prison.

Jeté en prison, au milieu de 52 détenus (dans un 35 m2), Mohamed Erraji, désemparé, largué,...était loin de se douter que la mobilisation médiatique battait son plein. «Quand mon frère me l’a annoncé au parloir, juste avant ma libération provisoire, cela m’a réconforté. Etre pris en tenaille par un système, sans savoir pourquoi ni comment. Sans avoir la possibilité d’agir. Tout en étant obligé de subir et de souffrir en silence. Je ne le souhaite à personne», ajoute-t-il.

Issu d’un milieu particulièrement modeste –il est l’aîné d’une fratrie de 4 garçons et l’unique soutien financier du foyer- Mohamed Erraji est salarié dans un hammam dirigé par son oncle. Un emploi d'ailleurs menacé. «Vu la tournure des évènements, mon oncle aurait pris la décision de me virer. Si tel est le cas, la situation deviendra dramatique» dit-il.

Ceci dans l’hypothèse où la Cour d’appel, qui se réuni ce mardi 16 septembre 2009, décide de confirmer sa mise en liberté. Seul une condamnation à une amende semble lui pendre au nez. «La procédure a été mal mené et géré. Le procureur du Roi n’a pas respecté la procédure. Mohamed Erraji a été jugé et condamné sur la base du statut de journaliste alors que ce jeune homme n’est pas journaliste. Du coup, il a fallu revoir toute la procédure dans des délais très brefs» annonce la présidence de la Cour d’appel d’Agadir.

On peut adhérer à la thèse de réactivité de la justice devant des vices de formes. Néanmoins, et au vu de la pression médiatique qui a considérablement bousculé la donne (Erraji aurait difficilement recouvrer la liberté sans le soutien des médias), on en doute. C’est bien la couverture des médias nationaux et (surtout) internationaux qui a poussé l’Etat à réagir, vite, très vite.

Alors que le porte parole du gouvernement, Khalid Naciri, aurait déclaré que l’outil Internet pose parfois problème, très certainement car on ne peut pas, lui, le museler, on est en droit de s’interroger sur deux choses essentielles. Primo, la fonctionnement de la justice et ses excès de zèle, ses déboires, son manque d’indépendance,… Secundo, la question de la sacralité du Roi. A-t-elle des limites, des frontières ? Peut-t-on en discuter ?

Est-il envisageable de créer des unités spéciales composés d’Hommes avec la tête bien faite qui seraient en capacité d’occuper la zone tampon entre le moment de l’interpellation d’un individu (pour atteinte à la personne du roi) et la rencontre avec le Procureur du Roi. Histoire de jauger la situation avant de la juger.

De prime abord, il semble nécessaire d’initier un débat…contradictoire sur la sacralité du roi. Cela s’impose afin de définir clairement les règles du jeu. Pour ne pas que la (longue) liste des «condamnés innocents » ne s’allonge…

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