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Grand Angle

#BoycottFrance : La contre-campagne s’organise en Arabie saoudite, aux Emirats et en Egypte

Quelques jours après son lancement, la campagne de boycott des produits français fait face à une contre-campagne en Arabie saoudite, aux Emirats arabes unis et en Egypte.

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Photo d'illustration / Ph. Ahmed Yosri - Reuters
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La campagne de boycott des produits français en réaction à la détermination d’Emmanuel Macron de continuer à publier les caricatures du prophète Mohammed ne devrait pas connaître l’adhésion de tous les Etats de l’Organisation de la coopération islamique (OCI). Des voix proches des cercles de pouvoir dans certains pays de l’OCI se sont montrés opposés à la campagne #BoycottFrance. Des prises de position destinées à épargner aux régimes en place de se heurter frontalement aux sentiments de leurs populations.

Pour Mohammed Al Issa, secrétaire général de Ligue islamique mondiale et ancien ministre de la Justice en Arabie saoudite, les «caricatures sont justes des bulles, sans valeur». «La place de la religion ne sera pas affectée par la folie et les guerres menées contre elle par la satire ignorante», a-t-il précisé ce lundi, dans des déclarations à la chaîne saoudienne Al Arabiya, reprises par le média égyptien Masr Alyoum.

Un avis qui s’inscrit en droite ligne avec le communiqué publié le même jour par le Conseil supérieur des oulémas au royaume wahhabite. «Diffamer les prophètes et les messagers ne leur fera jamais de mal, mais ne servirait que les extrémistes qui veulent répandre des appels à la haine parmi les communautés humanitaires.»

Profitant d’une marge de manœuvre plus large que le Conseil, Al Issa estime que les ripostes contre ces dessins «étaient irréfléchies». Une manière, pour le religieux très proche du prince héritier Mohamed Ben Salman, de se démarquer des appels visant les exportations françaises.

La contre-campagne a commencé                         

Les propos d’Al Issa sont inscrit également dans sa défense du discours du président français, du 2 octobre, sur le «séparatisme islamiste». «Des musulmans — ou ceux qui prétendent l’être — qui ont donné une mauvaise image de notre religion par leur extrémisme, leur fanatisme ou la violence du terrorisme. Ils ne sont en rien des représentants de l’islam et si nous leur trouvions des excuses, nous serions comme eux», a-t-il confié à un média saoudien comme le rapporte le quotidien L’Opinion.

Par le passé, Al Issa avait déjà couvert d’éloges le discours de Macron, du 25 avril 2019, sur l’«islamisme politique». «Tous les musulmans d’Europe doivent respecter les constitutions, les lois et les cultures des pays dans lesquels ils vivent. Ils ne doivent pas accepter l’importation de fatwas et d’idées étrangères», avait-t-il martelé lors de sa participation à un congrès, organisé en septembre 2019 à Paris, consacré au même thème.

En Egypte, Al Azhar a condamné la publication des caricatures controversées. Néanmoins, l’institution officielle ne s’est pas encore prononcée sur le boycott. Une brèche que certains prédicateurs essaient de combler. En témoigne l’intervention de Khaled Al Joundi qui anime plusieurs émissions sur une chaîne privée proche d’Al Sissi. Le religieux a choisi la langue des chiffres pour convaincre les Egyptiens de prendre leurs distances vis à vis du boycott, rappelant qu’«il y a 165 sociétés françaises» dans son pays qui assurent de l’emploi à plusieurs «salariés égyptiens». «Les investissements français s’élèvent à 5 milliards de dollars et 2,8 MM $ la valeur des échanges commerciaux entre l’Egypte et la France», a-t-il plaidé.

Même constat aux Emirats arabes unis. La mission visant à dénoncer le mouvement a été confiée à des personnalités proches de l’homme fort d’Abou Dahbi, Mohamed Ben Zayed. C’est le cas de son conseiller, Abdelkhalek Abdellah, qui n’a pas hésité à accuser les Frères musulmans et la Turquie d’être derrière la campagne contre l’économie française. Ironie du sort, depuis quelques mois, l’Arabie saoudite et les Emirats connaissent des appels au boycott des marchandises turques.

Les positions exprimées dans ces pays tranchent avec l’adhésion de ces mêmes Etats, en automne 2006, en faveur de la campagne contre les produits danois, en réaction à la publication par le journal Jyllands-Posten de caricatures du prophète. Certes, Copenhague n’a pas le même poids que Paris sur la scène régionale, mais à ce facteur s’ajoute la proximité de Riyad et d’Abou Dhabi avec la France, sur des dossiers de politique étrangère, comme la Libye et la gestion des problématiques liées au terrorisme.

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