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Grand Angle  

Histoire : Lady Evelyn Murray, la plus musulmane des Britanniques

Cette Ecossaise est considérée comme la première Britannique à avoir effectué le pèlerinage à La Mecque. Grande voyageuse, elle découvrit l’islam et la culture musulmane en Afrique du Nord, en l’occurrence en Algérie.

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Lady Evelyn Murray est considérée comme la première Britannique à avoir effectué le pèlerinage à La Mecque. / Ph. Archives
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Elle disait d’elle-même qu’elle était «une musulmane de cœur». C’est certainement durant ses séjours hivernaux en Algérie ou en Egypte que Lady Evelyn Murray s’intéressa peu à peu à l’islam et à la culture musulmane, elle qui fut, à l’âge de 66 ans, en 1933, la première femme britannique à effectuer le pèlerinage à La Mecque.

Issue d’une famille aristocratique, Lady Evelyn Murray est née en 1867 à Edimbourg, en Ecosse, indique la BBC dans un article récemment publié, consacré à ces «Britanniques de l’ère victorienne qui se convertirent à l’islam». Elle est la fille du 7ème compte de Dunmore, fréquemment absent de par ses voyages en Chine et au Canada. Sa mère, elle aussi passionnée de voyages, fut dame d’honneur de la reine Victoria.

Lady Evelyn Murray a quant à elle passé une grande partie de son enfance à alterner les voyages entre l’Ecosse et l’Afrique du Nord, en l’occurrence l’Algérie. «Là-bas, j’ai appris à parler arabe. J’étais ravie de fuir ma gouvernante dès que je le pouvais et de visiter les mosquées avec mes amis algériens. Inconsciemment, j’étais déjà un peu musulmane de cœur», écrira-t-elle plus tard. Adolescente, puis jeune femme, le goût du voyage ne la quitte pas. C’est au Caire, en 1891, qu’elle rencontre celui qui deviendra son mari, l’homme d’affaires John Cobbold. Ils auront ensemble un fils, tué pendant la Seconde Guerre mondiale, et deux filles.

Croyante mais peu pratiquante ?

Toujours est-il qu’on ne sait pas précisément quand Lady Evelyn Murray, qui devint plus tard propriétaire d’un domaine dans les Highlands écossais, s’est convertie à l’islam. Si son attrait pour cette religion prit sans doute forme durant ses voyages d’enfance en Afrique du Nord, sa foi fut apparemment définitivement ancrée après des vacances à Rome, où elle rencontra le pape. «Lorsque Sa Sainteté s’est soudainement adressée à moi en me demandant si j’étais catholique, j’ai été prise au dépourvu pendant un instant, puis j’ai répondu que j’étais musulmane», raconte-t-elle également. Elle fut alors rebaptisée Zaynab.

Mais quel genre de musulmane était Lady Evelyn Murray, s’interroge de son côté The Guardian. «Même si elle aurait certainement prétendu être sunnite, il reste difficile de la cerner plus précisément. Bien qu’elle soit clairement ferme dans sa foi, il n’y a aucune trace de son accomplissement des cinq prières quotidiennes ou du jeûne pendant le Ramadan dans sa vie quotidienne à la maison. En fait, aller au hajj semble avoir été l’unique pilier de l’islam sur lequel elle se soit appuyée», rapporte le journal britannique.

Lady Evelyn Murray, «très européenne dans sa foi musulmane»

«Bien que les expériences historiques et sociales de la religion varient évidemment, on considère souvent que l’islam implique un engagement envers un certain type d’État, de société et d’institutions publiques, en particulier en matière de droit et d’éducation, ainsi que des prescriptions concernant la vie familiale et quotidienne. (…) Les musulmans considèrent généralement que leur religion fournit non seulement une foi personnelle, mais également un système social complet intimement lié à une vision du monde et à des normes d’identité spécifiques», écrit The Guardian.

Et d’ajouter : «Il y a cependant bien peu de signes qui laissent entendre que Lady Evelyn était bien consciente des implications publiques de sa foi. On pourrait soutenir que, dans ce sens, elle et d’autres ont oublié l’un des aspects essentiels de la religion musulmane. En considérant l’islam uniquement comme une affaire de conviction privée et en y adhérant entièrement selon ses propres termes, elle a suivi un modèle très européen de foi religieuse. Néanmoins, il ne fait aucun doute que sa croyance était profondément sincère.»

Preuve en est du pèlerinage à La Mecque qu’elle effectua donc en 1933, pour lequel elle sollicita l’ambassadeur d’Arabie saoudite à Londres, Hafiz Wahba, qui écrivit au roi Abdelaziz Al Saoud, à Riyad, pour lui demander une autorisation formelle. A son retour, elle fit les choux gras des tabloïds britanniques, qui s’intéressèrent également au livre qu’elle publia en 1934 sur cette expérience, «Pilgrimage to Mecca». Le 9 juillet 1934, le Manchester Guardian écrivit ainsi :

«Comme un récit de telles expériences religieuses individuelles, influencé par une connaissance intime de deux grandes religions, le livre de Lady Evelyn Cobbold a un attrait rare en soi. Si on peut penser qu’elle a quelques idées préconçues sur sa foi, nous avons en fait été habitués à entendre tant de choses qui reposent sur la pure ignorance et l’antipathie, qu’un peu d’éloge, s’il en est, est un soulagement bienvenu.»

A la suite de son décès en janvier 1963, The Islamic Rewiew, dans son numéro d’avril-juin 1963, publia des extraits de la nécrologie de Lady Evelyn Cobbold parue dans le Daily Telegraph du 28 janvier 1963. «Madame Evelyn Cobbold, décédée à l’âge de 95 ans, fut la première Anglaise à faire le pèlerinage à la Mecque. (…) Après avoir traversé le désert en voiture depuis Jeddah, elle a participé à des cérémonies religieuses musulmanes, marchant sept fois de suite avec d’autres femmes musulmanes autour de la Sainte Kaaba», écrit-on. On y apprend aussi qu’elle se passionna pour le Kenya, à propos duquel elle écrivit en 1935 le livre «Kenya, le pays de l’illusion».

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