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TelQuel victime d'une mascarade judiciaire

Dans une affaire en justice les opposant à Hlima Assali, deputée du Mouvement Populaire, Ahmed R. Benchemsi et Karim Boukhari, respectivement directeur de la publication et chef des actualités du magazine TelQuel, ont été solidairement condamnés à un million de dirhams de dommages et intérêts ainsi qu’à 25.000 dirhams d’amende et deux mois de prison avec sursis chacun.

Cette lourde condamnation fait suite à un billet d’humour signé de Karim Boukhari et publié dans le numero 184 de TelQuel daté du 9 juillet 2005, sous le titre "Secret d’une brune". L’objet de ce billet, qui ne citait pas Hlima Assali nommément, était de mettre en relief, de manière humoristique, l’ascension d’une ancienne cheikha (artiste populaire maocaine) devenue députée. Hlima Assali s’est néanmoins reconnue et s’est sentie diffamée. Elle a donc intenté une action en justice, ce qui est de son droit.

Le procès qui s’est ensuivi a néanmoins bafoué tous les droits de la défense, ainsi que les règles les plus élémentaires de l’équité et de la justice.

Premièrement, le procès s’est tenu en l’absence de l’accusé principal, A. R. Benchemsi, en voyage professionnel aux Etats Unis pendant tout le mois d’août 2005 – une absence notifiée et justifiée par écrit à Me Jaber, président par intérim du tribunal de première instance de Casablanca. A deux reprises, les avocats de TelQuel ont demandé le report du procès, qui ne revêtait aucun caractère d’urgence, au mois de septembre, permettant ainsi à A. R. Benchemsi, revenu de voyage, de préparer sa défense avec ses avocats ainsi que de s’expliquer personnellement devant la Cour. En réponse à la première demande, déposée à l’audience du 8 août 2005, le président du tribunal a accordé un délai d’une semaine, sachant pertinemment qu’A. R. Benchemsi ne serait pas de retour une semaine plus tard. Quant à la seconde demande de report, formulée à l’audience du 15 août par Me Mohammed Karam, et qui a obtenu l’accord des avocats de l’accusation eux-mêmes, elle a été rejetée par le président du tribunal sans commentaires ni explications. A aucun moment, le président du tribunal n’aura donc permis au principal accusé de se défendre. Premier déni de justice flagrant.

Deuxièmement, à l’audience du 15 août 2005, le président du tribunal a levé l’audience vers midi, notifiant à Karim Boukhari et à Me Karam que le procès reprendrait à 14h30. A 14h15, en l’absence de K. Boukhari et de Me Karam, le président du tribunal a instruit le dossier en quelques secondes, puis s’est retiré pour délibérer. Il est revenu dans la salle d’audience une heure plus tard pour annoncer le verdict et la sentence. Cette attitude démontre de manière évidente la partialité du président du tribunal et sa volonté d’empêcher la défense de parler. Deuxième déni de justice flagrant.

Troisièmement, le jugement a été rendu sans qu’il n'y ait aucune plaidoirie, ni des avocats de la défense, ni de ceux de l’accusation. A aucun moment, de l’ouverture du procès jusqu'à sa fin, le fond n’aura ete examiné. Le verdict a donc été prononcé par le président du tribunal en totale ignorance de cause, n'ayant auditionné ni la plaignante ni les défendeurs. Troisième déni de justice flagrant.

Quatrièmement, et sans considérer les peines de prison et d’amende, déjà totalement injustifiées au vu des conditions iniques de ce procès, la somme d’un million de dirhams défie toute mesure. Ni Ahmed R. Benchemsi ni Karim Boukhari ne sont évidemment en mesure de la payer. Quant à TelQuel, le containdre à payer un million de dirhams consiste tout simplement à le condamner a la faillite. Si on se réfère aux annales judiciaires marocaines, cette somme est plus de dix fois supérieure aux sommes accordées à des plaignants pour des motifs similaires, et à l’égard desquels la diffamation ou l’insulte avait été prouvée de manière autrement plus sérieuse. Quatrième déni de justice flagrant.

En conséquence de tout ce qui précède,

* TelQuel proteste vigoureusement contre ce jugement inique et scandaleusement orienté, et affirme qu’il ne vise qu’à intimider deux journalistes et à attenter à la liberté d’_expression au Maroc ;
* TelQuel considère que ce procès n’était qu’un prétexte mis à profit par des instances supérieures indéterminées pour affaiblir dangereusement, voire signer l'arrêt de mort d'un magazine considéré comme indépendant et crédible ;
* TelQuel informe de son intention d’interjeter appel de ce jugement ;
* TelQuel infome qu’une plainte a été adressée au ministre de la justice et que des copies de cette plainte, ainsi que du présent communiqué, on été envoyées a la presse marocaine et internationale, ainsi qu’aux ONG suivantes : Syndicat National de la Presse Marocaine ; Federation Marocaine des Editeurs de Journaux, Reporters Sans Frontières, Committee to Protect Journalists, International Freedom of Expresion Exchange, Association des Editeurs Marocains, Association Marocaine des Droits de l’Homme, Organisation Marocaine des Droits de l’Homme, Comité Consultatif des Droits de l’Homme, Amnesty International, Human Rights Watch, Fédération Internationale des Droits de l’Homme, Article 19, Association Marocaine des Avocats, Union Internationale des Avocats, American Bar Association, Ordre des Avocats de Casablanca, Jam’iat Al Adala, ainsi que d’autres organisations dont les noms seront communiqués ultérieurement.
* TelQuel assure qu’il tiendra ses lecteurs informés des péripéties du procès en première instance, ainsi que de celles du procès en appel. TelQuel publiera, en outre, toutes les informations susceptibles d’intéresser l’opinion publique sur les acteurs et les circonstances de ce rocambolesque feuilleton judiciaire.
* Malgré le dérapage manifeste du président du tribunal de première instance de Casablanca, TelQuel déclare faire confiance à la justice marocaine et espère que le procès en appel offrira toutes les garanties du droit et de la justice.

Fait à Casablanca et à Los Angeles (Etats-Unis), le 16 août 2005

Source : Communiqué de presse

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