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Vivre l'islam en regard du droit français

Deux avocats proposent un guide pratique pour gérer au mieux le quotidien.

Droit et religion musulmane, par Chems-Eddine Hafiz et Gilles Devers, Dalloz, avril 2005.

C'est un ouvrage pratique mais peut-être et surtout politique, que nous livrent Chems-Eddine Hafiz, avocat de la Mosquée de Paris et membre du bureau du Conseil français du culte musulman et Gilles Devers, avocat de la Mosquée de Lyon et professeur à la faculté de droit Lyon-III. Intitulé Droit et religion musulmane, édité par les très sérieuses éditions Dalloz, ce livre met en regard le droit français et les spécificités du culte musulman.

Exemple : les funérailles. Tandis que la tradition musulmane prévoit l'inhumation du défunt à même la terre, le droit français impose l'utilisation d'un cercueil ; et alors que les préceptes de l'islam interdisent l'exhumation des corps, le Code général des collectivités territoriales prévoit que le maire peut, en cas d'abandon de la sépulture, et même si celle-ci fait l'objet d'une concession à perpétuité, la récupérer pour la réaffecter. Tous les aspects de la vie du croyant sont ainsi passés au crible du droit français : des aides publiques pour la construction des mosquées à la réglementation sur le port du voile islamique, en passant par le cadre légal de l'abattage ou les différents régimes des aumôneries dans les casernes, les prisons ou les établissements de santé. Mais là où l'ouvrage de Chems-Eddine Hafiz et Gilles Devers est politique, c'est qu'il conclut systématiquement à la compatibilité des deux systèmes. De la part de l'avocat de la Mosquée de Paris, qui prône un islam du «juste milieu», voire «voltairien» et une interprétation pas trop rigoriste de la laïcité, cette posture n'est pas surprenante. Bien sûr, Chems-Eddine Hafiz ne nie pas la difficulté d'harmoniser certaines règles. En témoigne l'exemple des funérailles. Mais pour que les choses s'arrangent il suffit souvent que chacun y mette un peu du sien. En ce sens, cet ouvrage est une sorte de manifeste du vivre-ensemble. Certaines musulmanes souhaitent être examinées par un médecin de même sexe ? Les auteurs recommandent que les services hospitaliers fassent «un effort pour assurer une présence médicale féminine». En retour, les femmes voilées devront se plier aux règles d'hygiène en vigueur dans tel ou tel hôpital : «Ainsi, pourra être prohibé le port d'un foulard ou d'une tenue ample dans la mesure où doivent être exigées des tenues ajustées, répondant souvent à une réglementation intérieure.»

Reste que les fondamentalistes musulmans risquent de trouver cet ouvrage un peu trop conciliant avec le droit français. Sur l'épineuse question du voile islamique par exemple, tandis que beaucoup de théologiens affirment qu'il s'agit d'une «prescription» du Coran, l'avocat de la Mosquée de Paris parle d'une «préconisation» et ajoute : «Il ne s'agit pas d'un des piliers de l'islam et le caractère obligatoire de cet attribut vestimentaire fait l'objet d'appréciations discordantes.»

Source: Libération

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