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Le Maroc n’échappe pas au boom de la chirurgie esthétique

Le Maroc n’échappe pas au boom de la chirurgie de l’apparence. Comme partout dans le monde, que ce soit aux Etats-Unis ou en Europe, les Marocains ont envie d’être plus “beaux”.

Et même si d’emblée les chirurgiens-plasticiens, psychologues et autres spécialistes s’accordent à affirmer que “la notion de beauté est relative”, les médias ont plutôt tendance à l’uniformiser.

Télévisions, magazines féminins et presse spécialisée ont largement contribué à créer un stéréotype, relayés en force par une industrie du prêt-à-porter davantage soucieuse d’augmenter ses profits que de “respecter les genres et les goûts des uns et des autres”.

Du coup, les cabinets de chirurgiens accueillent une clientèle de plus en plus nombreuse. “La majorité des cabinets ont vu le nombre de leurs patients augmenter de 100, voire 200%, durant les deux ou trois dernières années”, affirme un chirurgien de la place. Le boom ne date pourtant pas de ce début du XXIe siècle. Dans les années 90, la chirurgie esthétique connaît un succès fulgurant, surtout à l’étranger. “Notre pays vit à la cadence du monde occidental et la médiatisation par l’audiovisuel a fait que les pratiques courantes en Europe ou aux Etats-Unis s’incrustent dans tous les foyers marocains”, explique Docteur Aadil Rachid, spécialiste en chirurgie esthétique et réparatrice. La chirurgie esthétique est donc devenue, au fil des ans, une pratique courante au Maroc aussi. Et loin de se limiter à la classique frange des seules stars et femmes mondaines.

Que ce soit dans les milieux aisés, où l’apparence revêt généralement une importance particulière, ou dans ceux moins nantis, le culte du corps fait des ravages. “L’industrie du prêt-porter n’est pas étrangère au phénomène, ajoute-t-il, à partir du moment où la mode a créé un stéréotype auquel la majorité des femmes ne veulent pas déroger”. Les tendances plutôt “très serré, près du corps” rendent l’apparence “taille de guêpe” encore plus “importante”, voire “nécessaire”, au grand bonheur des cabinets de chirurgiens.

· La dictature de l’image

“De nombreuses patientes nous consultent pour de simples diminutions de taille”, affirment les médecins. Il ne s’agit donc plus de demandes d’intervention sur des cas “pathologiques” mais purement esthétiques. “De jeunes femmes souhaitent juste affiner leur taille pour passer du 38 large au 38 serré”, affirme Aadil.

Les patientes sont aussi de plus en plus jeunes. “60 à 70% des personnes qui nous consultent n’ont pas encore atteint la quarantaine”. Nous sommes loin de la moyenne des années précédentes qui était de soixante ans. Là encore, c’est le phénomène “mode” qui en est à l’origine. Qu’elles aient trente, quarante ou soixante ans, les femmes d’aujourd’hui veulent être “fashion”. Les hommes aussi. Même si, il est vrai, ils restent nettement moins nombreux que les femmes à consulter les cabinets de chirurgie esthétique. Actuellement, ils ne représenteraient que 10%, voire 15% de la clientèle totale. Eux aussi ne sont donc pas épargnés par le phénomène de mode. Leur demande porte toutefois essentiellement sur les implants de cheveux ou sur une liposuccion du ventre, dans l’écrasante majorité des cas. Pour les femmes également, la liposuccion constitue le gros des interventions chirurgicales. Les opérations du “sein” viennent bien après.

Les tendances ont donc subi des changements depuis le début de la décennie. “On recherche avant tout la finesse”, explique Aadil. La conclusion est en effet logique: plus de la moitié des soins opérés dans les cabinets de chirurgie concernent la liposuccion. En plus d’avoir peur de vieillir, la population du baby boom a peur de grossir.

Dans ce domaine aussi, les médias y sont pour beaucoup: publicité abondante, “corps sveltes”, produits Diet autour desquels une véritable industrie se développe… C’est une réelle dictature exercée sur le téléspectateur. “Même s’il n’y prête pas attention au départ, le consommateur finit par être influencé par ces nouvelles images et techniques que la télévision ne cesse de passer”.

En ayant “pénétré dans tous les foyers marocains”, la chirurgie esthétique est devenue l’affaire de tous. “Autrefois réservée à une élite, la chirurgie de l’apparence est devenue accessible à un plus grand nombre, toutes couches sociales confondues”, rétorque Aadil. Un avis que partagent plusieurs de ses confrères.

· Du simple au double, c’est selon

Les prix n’obéissent à aucune règle générale. Ils varieront d’une intervention à une autre, voire d’une personne à l’autre. L’aspect marketing intervient à ce niveau pour une large part. Une même intervention sera facturée 10.000 dirhams à une patiente et 20.000 dirhams à une autre. Plusieurs facteurs sont pris en considération, à savoir la renommée du praticien et le nombre d’heures de l’intervention chirurgicale. Une liposuccion du ventre coûtera ainsi de 10.000 à 40.000 dirhams, une prothèse mammaire de 20.000 à 30.000 dirhams. Les prix du lifting commencent à partir de 30.000 dirhams.

Les compagnies d’assurance ne remboursent pas encore ce type d’interventions, considérées comme non “pathologiques”. “La chirurgie esthétique est encore facultative”, précise-t-on. Elle reste beaucoup moins chère au Maroc qu’en France.

De nombreux Européens préfèrent ainsi avoir recours aux soins des médecins marocains, disposant de la même expertise en la matière que leurs confrères étrangers. “On assiste à une recrudescence des demandes émanant de clientes françaises à cause du coût moins élevé de soins similaires”. Les prix sont inférieurs d’au moins 30% à ceux pratiqués en France.

En Tunisie, une des destinations concurrentes du Maroc, les autorités veulent développer le “tourisme de santé”. Des packages comprenant le séjour en clinique et l’intervention chirurgicale sont confectionnés “sur mesure” pour les patients intéressés. Le Maroc est encore loin de développer ce type d’industrie mais l’idée germe déjà dans les esprits.


Ah, psycho!

Le facteur psychologique est déterminant. Le déclenchement du désir de modifier son apparence provient d’un choc du reflet qu’une personne a d’elle-même. Le client potentiel est réceptif aux modifications de son environnement et de l’impact qu’elles ont sur cette image. “La demande est souvent brutale”, explique Adiil. Le recours à la chirurgie est l’expression d’un souhait de reconstruction du reflet de son image.

Amale DAOUD
Source : L'Economiste

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