Menu

IER - Auditions publiques : Les années de plomb au Maroc

Un évênement au Maroc où Mohamed VI a décidé d'ouvrir le dossier des années de plomb. Une première dans un pays arabo-musulman, avec plus de 200 personnes qui témoignent au public les souffrances dont elles ont été victimes entre 1956 à 1999, période de répression ploitique violente. Bouleversant !

Jamais un pays arabo-musulman n'est allé aussi loin sur la question des droits de l'homme, avec une originalité de taille : cet exorcisme collectif n'est pas consécutif à un changement de régime comme cela a pu être le cas en Amérique Latine, en Argentine ou au Chili après la chute des dictatures.

C'est Mohammed VI, sans que personne ne lui demande rien, qui a décidé d'ouvrir le dossier des années de plomb, celles où la répression politique a été la plus dure, de 56 à 99, c'est à dire de l'indépendance à son arrivée sur le trône. Rien n'est laissé de côté, la guerre du Rif, les émeutes de la faim à Casablanca ou Marrakech et les répressions qui ont suivi, les attentats contre Hassan II. La commission a déjà reçu 22.000 dossiers en vue d'indemnisations. Parmi eux, 200 témoins ont été sélectionnés pour des auditions publiques à travers tout le royaume. Ces victimes ou familles de victimes racontent leur calvaire, en direct à la télévision, aux heures de grande écoute, parlent ouvertement de détentions arbitraires, tortures, meurtres, disparitions. A travers le petit écran, les Marocains revivent leur histoire récente comme un feuilleton. Certains découvrent des faits qu'ils ne pouvaient même pas imaginer, pour d'autres c'est une véritable thérapie. Cela va durer jusqu'au mois d'avril.

Ensuite, avant de s'auto dissoudre, l'instance fera des recommandations pour des réformes institutionnelles, juridiques, et la formation de la police. Le but de ce travail de mémoire est avant tout de prévenir à l'avenir de tels abus. Quoiqu'en disent ses détracteurs, qui ne veulent y voir qu'une façon de solder le passé à bon compte, on est en train aujourd'hui au Maroc, de reconnaître officiellement des violations des droits de l'homme, et ce n'est pas rien.

Cette commission est de plus en plus critiquée.

A la fois par les ONG et par des politiques, pour des raisons diamétralement opposées. Les proches de l'ancien roi considèrent que ce déballage ne sert à rien et met inutilement la monarchie en danger. Et puis un certain nombre d'organisations des droits de l'homme dénoncent ce processus qui a des limites, c'est vrai, puisque les victimes se sont engagées à ne pas dévoiler publiquement le nom de leurs tortionnaires dont certains hauts gradés sont toujours en fonction. Si on ne les cite pas, ils ne peuvent pas faire acte de contrition, encore moins être jugés et punis. En même temps, le plus important aujourd'hui, n'est pas de dénoncer tel ou tel mais de démonter tout un système qui était à l'oeuvre il n'y a pas si longtemps.

Et rien n'empêche d'ailleurs, parallèlement, les victimes de saisir les tribunaux. Mohamed VI ne pouvait décemment pas pousser plus loin le processus. Cette expérience est là pour consolider la monarchie et la démocratie, pas pour jeter en pâture le nom de son père, ni déstabiliser son régime. On a rarement vu des rois masochistes.

Source : RTL.fr

Emission spécial MRE
2m Radio + Yabiladi.com