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Les cathos intégristes crucifient l'islam et la laïcité

Réunis hier, ils réclamaient la reconnaissance officielle de la prééminence du catholicisme.

«P our nous, catholiques français, l'implantation sur notre terre de l'islam peut être une chance.» L'apostrophe est évidemment ironique. Encore que... Pour certains catholiques intégristes, comme Daniel Hamiche, rédacteur en chef du journal Légitimiste, l'émergence de l'islam comme deuxième religion de France pourrait être une occasion paradoxale de remettre le catholicisme au premier plan.

Civilisation. C'est la thèse qu'a défendue cet orateur hier à la tribune du congrès organisé à Paris par les Cercles de tradition, émanation de la Fraternité Saint-Pie X, à l'occasion du centenaire de la loi de 1905. «Laïcisme et islam étant tous deux fondamentalistes, l'un exclut l'autre, a-t-il expliqué. Mais le laïcisme ne survivra pas au choc de l'islam. L'affrontement a commencé et va aller en se développant. Nous avons peut-être là une chance historique d'arbitrer ce conflit et de proposer une autre vision de la laïcité.» Dans le public, on suit le raisonnement avec difficulté. «L'islam n'est pas une chance, c'est une catastrophe, proteste une participante. Ils vont nous piller, ils vont démolir notre civilisation, ils se comportent déjà en pays conquis. J'ai cinq petits-enfants et je leur dis qu'il faut qu'ils s'attendent au martyre.»

Pour le millier de sympathisants intégristes présents hier, comme pour les orateurs, l'islam est l'ennemi, mais le «laïcisme», dont l'un des dogmes serait selon eux «l'égalité de toutes les religions», l'est tout autant. En cette année de célébration du centenaire de la loi de 1905 ­ au mois de décembre ­, les Cercles de tradition ont décidé de faire entendre leur voix. «Il faut que le législateur réfléchisse à la manière de faire reconnaître que la France est chrétienne de façon matricielle et que les cultures nouvelles ne s'y intégreront bien qu'en reconnaissant une sorte de prépondérance historique à la culture chrétienne», expliquait ainsi avant la rencontre Guillaume de Tanouarn, prêtre à l'église intégriste Saint-Nicolas-du-Chardonnet.

Salle hilare. Or ce n'est pas la voie que prennent les hommes politiques : «Les uns, comme Jacques Chirac, jouent le conservatisme laïque : "Cette loi de 1905 est une colonne du Temple et mieux vaut ne pas la bricoler." Les autres [Nicolas Sarkozy, ndlr] voudraient qu'il y ait une plus grande reconnaissance de l'identité religieuse, mais surtout de l'identité religieuse musulmane.» «Pour un politique qui, par définition, est à la pêche aux voix, ironisait hier Guillaume de Tanouarn devant une salle hilare, ne pas pouvoir subventionner l'islam (1) pour lui permettre de rattraper son retard sur notre sol, c'est assez frustrant.»

A l'applaudimètre, les attaques contre l'islam ­ et contre l'entrée de la Turquie dans l'Europe ­ l'emportent devant la déploration de la baisse des valeurs morales. Homosexualité et avortement en tête. L'Amérique du très ostensiblement croyant George Bush est désormais un modèle. Daniel Hamiche se félicite ainsi «que les grands débats de la campagne présidentielle américaine aient porté sur le socle des valeurs chrétiennes». Et salue la décision de l'archevêque de Saint Louis (Missouri) de refuser la communion au candidat démocrate catholique John Kerry, au motif que «son obstination à demeurer pro-choix [pour la liberté d'avorter, ndlr] en fait un hérétique».

(1) La loi de 1905 interdit tout financement public des cultes.

Par Catherine COROLLER
Source: Libération

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