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France : Ouverture d’un procès pour exploitation d’ouvriers marocains

Le procès d’une dizaine d’agriculteurs de la Gironde s’est ouvert le lundi au tribunal correctionnel de Bordeaux. Ils sont accusés d’avoir exploité et logé dans une étable, des travailleurs sans papiers venant pour la plupart du Maroc. L’information a été relayée par le quotidien français Libération.

Les agriculteurs, en majorité des viticulteurs, comparaissaient pour plusieurs chef d’accusation dont « marchandage de main d'œuvre, dissimulation de travail, emploi de travailleurs étrangers sans titre de séjour ». Le principal mis en cause dans cette affaire, un Belge du nom d’Emile Van Lierde n’était pas présent à l’audience. L’homme vivant dans une zone à cheval entre l’Espagne et la France, est accusé d’avoir monté une société de droit espagnol, nommée Agriganda. Son objectif : engager des ouvriers en Espagne, région de Huelva, par le biais d’annonces en leur promettant l’eldorado, pour les faire travailler en France à moindre coût.

Une fois sur place, la réalité était toute autre pour ces travailleurs. « Dès le premier jour, j’ai été frappé par le logement » a raconté Abdelatif Azirar à la barre, cité par Libération. « Mais je n’avais pas assez d’argent pour retourner en Espagne, alors je suis resté travailler », a-t-il ajouté. Il était logé avec d’autres employés dans une dépendance de la maison d’Emile Van Lierde. Selon le président du tribunal, c’était « une ancienne étable à bovins, équipée d'une gazinière alimentée par une bouteille de propane, ce qui est interdit dans une habitation, leurs vêtements accrochés à une corde fixée au mur et pas de chauffage ». Pour l’un des salariés, « c'était plutôt une porcherie ». Ils devaient en sus payer un loyer de 80 euros par mois pour ce « logement ».

Contactée par nos soins, l’Association des Travailleurs Maghrébins de France (ATMF) nous apprend qu’elle ne s’est pas saisie de cette affaire vu qu’elle n’a pas été alertée. Sur la base de ses expériences dans des affaires similaires, l’ATMF nous informe également qu’étant donné que l’entreprise en cause siège en Espagne, le juge français a contacté son collègue espagnol qui a entendu le donneur d’ordre de l’autre côté de la frontière.

Pour revenir aux travailleurs, il faut rappeler qu’ils vivaient dans une condition doublement contraignante. Une situation illégale avec un emploi sous-payé. D’après des informations du portail du développement durable Vedura, le fondateur d’Agriganda percevait 8,74 euros de l'heure par personne de la part des viticulteurs. Mais il reversait officiellement aux employés (de façon bien aléatoire) 5,49 euros de l'heure. « Van Lierde nous donnait seulement des acomptes de 50 euros pour qu'on s'achète à manger » explique un des travailleurs, cité par la même source.

En l’absence d’Emile Van Lierde, le président a entendu les viticulteurs clients d’Agriganda. L’un deux, Jean-Paul Bougès, a fait travailler 11 personnes par le biais de l’entreprise Agriganda. Tous pensaient faire « une bonne affaire » en recrutant de la main d'œuvre pas chère pour leurs vendanges. Mais ils répondront de leurs actes devant la justice.

Le jugement a été mis en délibéré au 12 octobre. En attendant, le procureur a requis trois ans de prison, dont deux avec sursis contre Van Lierde. Les autres risquent trois à six mois de prison avec sursis assortis d’une amende de 1000 euros par salarié exploité.


Ibrahima Koné
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