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Le scrutin « islamique » belge, par Mouedden Mohsin

Le scrutin « islamique » belge entre acceptation, compromis, boycott et indifférence !

Je ne reviendrai pas sur les tenants et aboutissants de ce scrutin, tellement les spécialistes et citoyens plus doués ont amené avec pertinence leurs fines analyses (voir www.suffrage-universel.be). Je mettrai en avant plutôt mon avis, celui d’un acteur associatif belgo musulman, amoureux de la culture amérindienne, légèrement provocateur, sans carte politique mais au passé écologiste (rassurez vous pas plus de 3 mois et sans carte de membre), qui voit en ce scrutin, une grande fitna impulsée par « des esprits Shaytanesque » (rires)

Voici la communauté musulmane devant le fait accompli !

Les élections auront bien lieu au mois de mars 2005 (à moins d’une surprise de dernière minute). Cette décision a été prise en catimini pendant les grandes vacances par la ministre (socialiste) de la justice (et des cultes) Madame Onkelinx lassée dit-on par « les querelles internes ».

Je constate par rapport à cette ingérence et scrutin, quatre visions chez les musulmans de Belgique.

La première est l’acceptation, minoritaire puisque impulsée par certains citoyens musulmans politisés (voir laïcs musulmans), déçus par l’EMB et désireux dans un moment de grande perturbation, censés jouer les « rassembleurs » et « démocrates ». Ils font fi de l’ingérence, du non respect de la neutralité de l’état envers le culte, du screening, d’un flou juridique qui perdure, des modifications imposées de fait et non respectueuses des accords précédents (changement partiel à total des membres de l’A.G). de l’ethnicisation etc…
Ces positivistes, pour des raisons personnelles, idéologiques et certaines mauvaises langues diront «pécuniaires » désirent ardemment la tenue de ces élections…

La seconde vision est celle du compromis «à la belge »… à savoir la mort dans l’âme participer, car dans cette opposition du « pot de terre contre le pot de fer » le combat, pense-t’il, est perdu d’avance. Malgré un recours déposé au Conseil d’Etat contre ces pratiques (les ingérences et non le scrutin), des voix se font entendre pour accepter « sous conditions » ces élections…

La troisième s’inscrit dans un refus catégorique. Il est dommage de n’entendre que le parti d’inspiration islamique prendre position contre ce scrutin, cela peut laisser supposer ou penser que c’est avant tout un
règlement de compte typiquement politicien… cette voix déforce (qu’on le veuille ou non) le camp du boycott ou du refus !

Pour ce qui est de la dernière position, pratiquement majoritaire, c’est l’indifférence, (devant des Khobzistes, des arrivistes, des musulmans politisés à l’extrême et quelques citoyens sincères…) elle est la vision le plus largement répandue… Force est de reconnaître que le vox populi n’à que faire de ces bisbilles et scrutin !

Sans porter de jugement lapidaire sur les trois premières visions, j’aimerai néanmoins apporter quelques éléments afin de clarifier ce dossier d’une ambiguïté et d’un flou "kafkaïen"…
Il me paraît indécent qu’un représentant politique puisse pratiquer des ingérences qu’on n’oserait pas, à juste titre, avec d’autres cultes… Il me semble totalement aberrant de « boycotter » les acteurs de l’EMB actuel, dans un déni et un mépris total. Je trouve aussi cette idée « d’ethnie » dangereuse et machiavélique. On peut penser que cette façon d’agir n’est qu’une vision sur le court terme qui/ou permettra à chaque communauté, une « représentativité » objective, cependant cette pratique qui me semble discriminatoire perturbe le petit sot, idiot et démocrate que je suis !

Voilà une bien drôle démocratie, faite uniquement sur mesure pour les « indigènes » musulmans… diront certain(e)s. Ces derniers (les indigènes) semblent accepter cet état de fait, habitués à ce qu’on pense pour eux depuis la nuit des temps…
Décidemment du colonialisme, certains sont passés à l’acceptation du néo-colonialisme pour quelques malheureux dirhams… le pouvoir de l’argent sur certains a un effet anesthésiant… écrasés ou oubliés pour un temps, les valeurs démocratiques et islamiques… l’argent, le pouvoir et un peu de reconnaissance sont les nerfs de la « guerre »… une guerre clanique entre « frères » (« les sœurs » sont plutôt exemptées de ces « carabistouilles »…) qui fait la risée des belges non musulmans.

On constate souvent, dès qu’on émet une critique quant à la tenue de ces élections, des voix étonnement redevenues « citoyennes » s’empressent de jeter le discrédit en traitant les « boycotteurs », « d’intégristes », de « fondamentalistes » ou de « rétrogrades »…. D’un débat d’idée, nous glissons très rapidement vers l’anathème et l’insulte, dévoilant ainsi l’argumentaire microscopique, lénifiant et lapidaire des acharnés du « scrutin ».
Encore une fois, la communauté musulmane est leurrée… de l’islam citoyen (que ne désire nullement une partie du monde politique) nous perpétuons l’islam « des ambassades », des « consulats » et des « clans » qui loin d’être citoyen (privilégiant des intérêts propres), ne fait qu’assimiler cette population ombrageuse à un fantasme et des craintes parfois justifiées (une cinquième colonne…).

Là où le politique nous dit en théorie « intégrez vous »… (Terme répugnant pour ma part) il nous prouve par sa pratique que son désir n’est nullement une participation citoyenne… (Arrimer ces musulmans à la Belgique, à l’Europe définitivement) mais un « renvoi » symbolique et lourd de sens vers son pays d’origine… (Je peux tout à fait comprendre certains de la 1er génération ou les nouveaux arrivants qui sont dans une autre logique).

Il me paraît aussi ubuesque d’accepter le screening… qui non seulement est anti-constitutionnel mais plus encore perpétue l’amalgame et la suspicion sur une communauté (il y a des conditions à respecter pour les potentiels candidats !!!) Le et les musulman(s) se doivent d’être cohérent(s) non seulement avec l’islam, la citoyenneté mais aussi la démocratie, nouvelle donne pour certain(e)s comme la citoyenneté d’ailleurs. Cette dernière comme les deux précédentes sont bafoués malencontreusement par (certains) des politiques et des musulmans.

Le compromis et le pragmatisme ne doivent à mon sens prendre le dessus sur l’éthique, la citoyenneté et le respect de la parole (et de l’écrit) donnée !
Le compromis et le pragmatisme sont deux notions « positivistes » qui peuvent faire avancer maints dossiers et projets sociétales, cependant ne faisons pas de ces deux concepts, la finalité de nos projets. La nuance ici, a toute son importance …
Il est sain au sein de notre démocratie qu’un Exécutif puisse voir le jour, fonctionner rapidement et positivement sans ingérence politicienne et «amateurisme» de certains musulmans qui ont parfois des intérêts sournois (dotation, salaire…)

L’Exécutif n’est pas une « antenne politique » insidieusement instrumentalisé et sommé de se justifier lors des conflits au Proche-Orient, des actes de délinquance ou du terrorisme commis ici et là par des extrémistes.
L’Exécutif ne doit devenir un défouloir d’une classe politique avide de sensation…
L’Exécutif ne doit pas tout avaliser et devenir un exécutant… mais participer en tant que partenaire légitime et non se cantonner dans une position pleutre…
L’Exécutif est un bien précieux, que nous devons respecter s’il va dans la bonne direction, l’aider afin qu’il règle les dossiers liés uniquement au culte pour faire des musulmans de ce pays, des citoyens banals, banalement respectés et considérés.
Les musulmans ont un devoir, celui de s’impliquer dans l’élaboration d’un organe sans ingérence politicienne, représentant les aspirations pacifiques des musulmans de ce pays.
C’est pour ces raisons que les musulmans confiants avaient accueillis plutôt favorablement ce projet en 1998…

Pour ces raisons, je n’appellerai pas au boycott mais ne participerai pas au scrutin de mars 2005 devant tant d’incohérences et de violations, ni en tant que candidat, ni en tant qu’électeur, malgré les demandes insistantes de certains amis afin que je m’y présente… je le fais par amour de l’islam, de la démocratie et de mon combat citoyen contre les injustices…

En tant que sot, idiot et naïf, je refuse cette compromission.

Mouedden Mohsin, acteur associatif belge
[email protected]

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