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Si les Ch’tis ont le vent en poupe, les «beurs» continuent à avoir le mal de mer

« Pédophiles, chômeurs, consanguins : bienvenu chez les Ch’tis ». Une banderole qui flotte sur le stade de France, un soir de finale de coupe de France de football, et c’est toute une nation qui s’emballe, une opinion publique qui s’enflamme et un Chef de l’Etat qui s’agite. Drôle de situation ! Comment un «vulgaire» match de football entre deux équipes (par ailleurs mal classées en championnat de ligue 1) peut prendre une dimension nationale ?

Si chacun s’accorde à reconnaître que les inscriptions de cette teneur sur une banderole sont inadmissibles, il n’en reste pas moins que les discours et autres positions pris par des acteurs politiques (de Nicolas Sarkozy au maire de Lens), méritent un arrêt sur image.

Que le Président de la République et le premier magistrat de la ville de Lens dénoncent des propos calomnieux et injurieux, jusque là rien d’anormal. Que les instances du football soient saisies, cela s’inscrit dans une logique établie. Mais que les dirigeants du club nordiste soient reçus à l’Elysée, que les médias s’emparent avec autant de générosité de cette désormais «affaire Ch’tie», que des voix s’élèvent pour demander l’annulation du match, que l’encadrement du club parisien tente de se faire entendre et craint une sanction sportive,…peut laisser pensif. Tout ce tapage et brouhaha sont-ils à la hauteur de l’incident ? La France est-elle aussi «fragile» pour marquer le pas devant un acte produit par une poignée de supporters désaxés ? Ce fait de société, est-il la traduction d’un certain malaise social ou l’expression d’une minorité ?

L’affaire du capitaine de Valenciennes, Abdeslam Ouaddou, et les propos insultants à caractères racistes, contraires aux valeurs universelles et républicaines, n’ont pas suscité autant d’entrain et de débauches d’énergie des acteurs du jour. En outre, et contrairement à ce qui a été dit, les cris de singe à l’encontre de Ouaddou ne sont pas une première sur les pelouses de France et de Navarre. Des antécédents sont à déplorés... malheureusement !

Pour autant, ce «cas» a été quelque peu minimisé (peut- être de peur de voir des tensions dans les quartiers sensibles) et une sanction «de principe» (un point en moins pour la formation de Metz et un match à huit clos) ont été prononcé par la fédération de football. Que dire sur le carton jaune infligé à Ouaddou et qui a été maintenu ? Et que penser de la position de Carlo Molinari, président du club lorrain, qui a trouvé la condamnation injuste et celle du président de la ligue, Frédéric Thiriez, pas très à l’aise sur les plateaux de TV pour «défendre» la décision exprimée par l’instance nationale.

Du côté de l’exécutif dirigé par François Fillon et sous l’autorité de Nicolas Sarkozy, on s’est contenté de mettre sur pied une rencontre amicale entre Ouaddou et Bernard Laporte, le Secrétaire d’Etat aux sports, avec comme moment fort, un geste amical (une petite tape sur l’épaule) de l’ancien sélectionneur de l’équipe nationale de rugby, à un Ouaddou désabusé et désorienté. Même la montée au créneau du capitaine de la sélection nationale de football, Lilian Thuram, membre du Haut Conseil d’Etat à l’Intégration, s’est avérée insuffisante pour porter la voix du respect des différences.

En tout état de cause, il semblerait que les Ch’tis, fort du succès du film de Dany Boon, ont le vent en poupe. Quant aux «beurs», le temps passe... et rien ne se passe.

Rachid Hallaouy
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