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Facebook. Le récit de la libération de Fouad Mourtada

Condamné à 3 ans ferme, le premier prisonnier mondial de Facebook a quitté Oukacha mardi à la faveur d'une grâce royale.

Mardi, 21 heures au quartier Aïn Sebaâ à Casablanca. Une silhouette frêle sort par la petite porte de la prison de Oukacha. Le jeune homme regarde autour de lui. Personne en vue. Normal, personne n'a été avertie de sa libération. Fouad Mourtada a été libéré à l'improviste... une peu comme il avait été arrêté, un certain matin du mardi 5 février. Une grâce royale lui a été accordé , à l'occasion de l'Aid al Mawlid. Comme son téléphone ne lui a toujours pas été restitué, Fouad Mourtada a dû appelé, à partir d'une téléboutique, des membres de sa famille et quelques proches amis, en compagnie desquels il a passé la nuit avant de se rendre, le lendemain, à Rabat puis à Oujda, où il a enfin retrouvé les siens. «Nous regrettons seulement que personne n'ait été là pour l'accueillir à sa sortie. Autrement c'est une véritable ambiance de fête qui règne au sein de toute la famille. Fouad est libre et c'est le principal», déclare l'un de ses oncles. Une libération qui signifie la fin d'un calvaire qui a duré plus de deux mois. Depuis l'enlèvement de l'ingénieur d'Etat, lauréat de l'Ecole Mohammedia des ingénieurs, jusqu'à sa libération surprise, en passant par un procès pour le moins ubuesque. Résultat des course: trois ans de prison ferme et une amende de 10.000 DH.

En tout, Fouad Mourtada a passé 43 jours à la prison de Oukacha, au milieu de détenus de droit commun, alors que, d'après Amnesty International, il était un prisonnier d'opinion. Sans oublier les séances de passage à tabac auxquelles il a eu droit de la part des enquêteurs et les harcèlements divers dont sa famille a fait l'objet au moment de lui rendre visite en prison.

La grâce royale dont a bénéficié Fouad Mourtada sonne donc comme la réparation d'une grande injustice. D'autant qu'aucune demande dans ce sens n'a été faite. «A aucun moment nous n'avons demandé la grâce royale», confirme maître Ali Amar, avocat de Fouad. Idem pour la famille Mourtada.

Soulagement
«Cette libération met fin à une procédure qui n'aurait jamais dû être lancée. La justice aurait pu éviter ce véritable drame tant personnel que familial et épargner cette tache noire sur l'image de tout un pays. Je ne doute d'ailleurs pas que le mouvement de solidarité international en faveur de Mourtada ait été pour quelque chose dans la libération», commente maître Amar. Même son de cloche auprès de l'Association marocaine des droits de l'homme (AMDH), l'une des rares à avoir pris fait et cause pour le premier prisonnier de Facebook au monde. «Nous estimons qu'il s'agit ni plus ni moins que d'une réhabilitation de Mourtada pour un grand tort commis à son égard, puisque nous n'avons cessé de dénoncer le caractère aussi bien arbitraire de son arrestation qu'inéquitable de son procés», déclare Abdelhamid Amine, vice président de l'AMDH. Le même soulagement est exprimé côté UNIM (Union nationale des ingénieurs du Maroc). Dans un communiqué publié à l'occasion, l'association de félicite de la décision et ne manque pas de mettre en relief l'élan de solidarité dont a bénéficié Fouad Mourtada, au Maroc, notamment par la communauté des ingénieurs, et à l'étranger.

Interview. «Les premiers jours en prison étaient un enfer»

La voix est tremblante, l'esprit toujours sonné, mais la joie d'être libre est bien là. Fouad Mourtada n'est pas du genre loquace; mais c'est au «Soir échos» qu'il accorde sa toute première interview.

Comment vous a-t-on annoncé votre libération
Je m'apprêtais à aller me coucher quand des gardiens sont venus me voir. Après avoir vérifié mon identité et la raison pour laquelle j'étais incarcéré, on m'a annoncé que j'étais libre. Tout simplement.

Comment avez-vous vécu votre séjour en prison ?
Cela m'a été très difficile les premiers jours. Jamais je n'avais imaginé me retrouver un jour en prison, encore moins parmi des détenus de droit commun, de «vrais détenus». Mais depuis les deux dernières semaines, et après mon transfert à une autre aile, la situation est devenue un peu plus vivable.

Qu'est-ce qui était le plus difficile pour vous
Que ma famille soit mêlée à cette histoire et souffre de cette affaire m'a été insupportable. D'ailleurs, les pires moments que j'ai connus étaient ceux où je devais les regarder en face. C'est aussi toute la dimension qu'a prise cette affaire, et que j'étais loin de soupçonner un jour. N'était-ce le formidable élan de solidarité dont j'avais régulièrement écho en prison et l'appui que ma famille et mes proches m'ont témoigné, je ne crois pas que j'aurai pu faire face à cette épreuve.

Quels sont vos projets ?
Le plus important pour moi est de retrouver une vie normale et retourner à mon travail. Que la vie continuer et que tout cette histoire soit vite oubliée.

Tarik Qattab
Source: Le Soir Echos

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