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Les aberrations de l’hôpital Avicenne

Les indicateurs du Centre hospitalier Ibn Sina (CHIS) pour le premier semestre de cette année font rêver: 233.640 consultations, 382.570 journées d’hospitalisation et 18.020 interventions chirurgicales. Ces chiffres, tirés d’un bulletin d’information de la direction qui regroupe une dizaine d’hôpitaux de Rabat, cachent mal le malaise de l’hôpital Avicenne qui fut le fleuron de la santé au Maroc.

Aujourd’hui, l’établissement accueille les indigents et les pauvres. Les malades solvables vont vers Cheikh Zayed et l’hôpital militaire, qui a ouvert ses portes également pour les civils.
Depuis des années, l’hôpital se débat dans des aberrations qui n’en finissent pas. Le personnel médical ne semble pas exercer ses fonctions avec zèle.

Les salles où sont hospitalisés les malades dégagent une odeur nauséabonde. La vétusté est partout. Dans ces lieux, l’hygiène n’est pas du tout la priorité. La rouille a gagné les tables de nuit sur lesquelles les malades entreposent leurs médicaments ou d’autres nourritures. Des tables en aggloméré, dont souvent une partie est cassée, sont placées de façon désordonnée dans des salles à cinq ou six lits. Certains malades «privilégiés» sont installés dans une chambre à deux lits. Ils ont pu amener un téléviseur et autres matériels de camping. L’un d’entre eux dispose d’un réchaud à résistance qui fonctionne à l’électricité et de quelques ustensiles de cuisine. Est-ce autorisé ou le personnel médical regarde ailleurs contre du bakchich? En tout cas, Yasmina Baddou a mis en garde les délégués provinciaux de la santé sur la corruption qui règne dans les hôpitaux. Pour un médecin, la ministre de la Santé devrait entreprendre des visites surprises pour voir de plus près le fonctionnement de ces établissements. Elle est consciente des insuffisances et autres dysfonctionnements comme l’accueil ou encore l’état déplorable des maternités. Elle est déterminée à y mettre fin en mettant en œuvre des plans d’actions spécifiques.

D’autres aberrations dans la gestion du Centre hospitalier universitaire de la capitale peuvent être relevées. Les services de chirurgie en sont des exemples. Outre l’absentéisme de certains professeurs, opérant en douce dans le secteur privé plus rémunérateur, ces services font face à un problème de déficit en infrastructures. En effet, il n’existe qu’une seule salle d’opération par service. Et chaque service dispose de 4 à 5 professeurs. Celui de la Chirurgie B compte 8 professeurs. Mais tous ces praticiens ne peuvent opérer tous les jours par manque de salle. Même celui qui voit son tour arriver après parfois une attente d’une semaine ne peut le faire que pendant les cinq jours ouvrables.

De l’avis d’un chirurgien, cette situation peut être réglée en aménageant des salles vides dans les étages. «Pour une salle d’opération, il faut une table d’opération, un scialytique (lumière), une source d’oxygène, un appareil de respiration artificielle et des lavabos», précise-t-il. Un autre rappelle le réaménagement en cours (depuis déjà un an) du bloc central avec les huit salles d’opération. Pour lui, ce bâtiment en rénovation ne va pas résoudre le problème puisqu’on supprimera les salles d’opération des services. Alors que pour couvrir les besoins, il est impératif d’avoir deux salles d’opération par service en plus du bloc central, souligne le même chirurgien.

A cause d’un crochet
La coelio-chirurgie ou la chirurgie mini-invasive est une «voie d’abord» de plus en plus utilisée. Dans certains services d’Avicenne, ce matériel est en panne depuis plus d’une année à cause d’un crochet qui coûte 5.000 DH. En attendant, les praticiens sont revenus à la bonne méthode traditionnelle, avec opération classique de grandes cicatrices.

Tarifs
La majorité des malades optent pour la chambre commune à 6 lits. Il faut s’acquitter de 1.500 DH d’avance et payer 100 DH la nuit. Pour la chambre à 2 lits, l’avance est à 2.250 DH et 150 DH la nuit. Quant à la chambre à un lit, l’avance est de 3.000 DH et la nuit est à 350 DH, mais le malade peut avoir un accompagnant. La consultation est à 60 DH, même avec un certificat d’indigence. Certificat d’indigence ou pas, pour une opération chirurgicale, il faut débourser un minimum de 1.500 DH.

Mohamed Chaoui
Source: L'Economiste

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