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Rassemblement contre le terrorisme au Maroc et récupération politique

Finalement, ils n’auront été que quelques centaines de personnes (moins de 1.000 selon la police) à avoir participé au rassemblement organisé jeudi dernier à Casablanca pour dénoncer le terrorisme.

Prévue à partir de 18h30 à la Place Mohammed V, la manifestation, à laquelle avait appelé le Collectif Démocratie et Modernité, n’aura pas duré plus d’une soixantaine de minutes. Un flop, en somme, dont il faut chercher les raisons du côté du manque d’organisation et de l’absence d’une campagne de sensibilisation préalable.

Pourtant, les services de sécurité avaient pris toutes les dispositions pour parer à tout risque éventuel. Une présence, certes discrète, mais tous les alentours de la place ont été habilement quadrillés. Bizarrement, l’avenue Hassan II qui traverse la Place Mohammed V a été maintenue ouverte à la circulation. De même que les rues adjacentes. La Protection civile n’était pas en reste: pas moins de cinq ambulances étaient stationnées tout alentour. On craignait, dit-on, qu’il n’y ait foule et donc risques de malaises ou d’évanouissements. Cependant, on devine aisément que les craintes concernaient plutôt l’éventualité de la présence de kamikazes parmi les manifestants. Surtout qu’ils sont, selon les services de sécurité, encore au moins dix à circuler dans la nature.

Slogans et couleurs nationales
Drapeaux aux couleurs nationales, t-shirts frappés du slogan «Touche pas à mon pays», pancartes et banderoles affirmaient avec force la «détermination et la mobilisation face à ceux qui tentent de semer la terreur». «Ensemble contre le terrorisme, la haine et la violence», «Non au terrorisme, non à la violence», «Non à la haine, tous contre l’obscurantisme», «L’Islam est une religion de tolérance et non de haine» ou encore «Tous contre la barbarie», «Pas de quartier(s) pour les terroristes»… Autant d’actes de foi pour réitérer le rejet des idéologies obscurantistes.

Côté court, un amer constat: les membres du gouvernement, dont deux sont présidents de Conseils d’arrondissement à Casablanca, ont brillé par leur absence. Karim Ghellab, ministre de l’Equipement et du Transport est, en effet, président du Conseil de Sbata. Alors que Yasmina Badou, secrétaire d’Etat chargée de la Famille, de la Solidarité et de l’Action sociale est en charge de celui d’Anfa.

Récupération
Tous deux sont membres du Parti de l’Istiqlal dont aucun militant n’était sur place, contrairement à ceux de l’Union socialiste des forces populaires (USFP) et du Parti du progrès et du socialisme (PPS) qui distribuaient communiqués et tracts dénonçant le terrorisme. Les leaders politiques n’ont pas été, non plus, de la partie. Une présence toutefois, celle de Saâd Eddine Othmani, secrétaire général du Parti de la justice et du développement (PJD) flanqué de Mustapha Ramid, autre figure du parti islamiste et parlementaire de Derb Soltane. Un quartier limitrophe de Hay El Farah où trois kamikazes s’étaient faits exploser il y a moins de deux semaines. L’un et l’autre entouraient le frère islamiste de l’officier décédé à Hay El Farah. Histoire de dire que les barbus ne sont pas tous des terroristes? Histoire aussi de faire de la récupération politique. Décidément, toutes les occasions sont bonnes à saisir à quatre mois des élections législatives!
Autre présence remarquée, celle d’Abderrahim Lahjouji, patron de Forces Citoyennes. Il était tout le temps collé aux baskets de Saâd Eddine Othmani. Il est vrai que les deux formations politiques avaient pactisé pendant un certain temps. Avant de mettre fin dernièrement à leur «accord de partenariat» signé le 17 novembre 2005.
Mohamed Sajid, président du Conseil de la ville de Casablanca a, pour sa part, déserté son bureau, situé à quelques mètres, pour faire une brève apparition sur le lieu du rassemblement.

Vers 19h15, les responsables des services de police ont commencé à demander aux participants de se disperser. «Vous gênez la circulation, il faut libérer la chaussée», dira un officier à un groupe de jeunes élèves d’une école de la place. Petit à petit, les voix se sont tues. Les participants évacuaient la place par petits groupes avec le sentiment du devoir accompli. Peut-être, dans la mesure où ils ont eu le courage de prendre part à cette manifestation contre le terrorisme. Sans peur ni crainte.

Jamal Eddine Herradi
Source: L'Economiste

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