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Comment aider les enfants marocains déscolarisés

L’expérience de la fondation Zakoura dans la nouvelle politique du développement humain, voulue par le Maroc, a pris date. En lançant en 1997 Zakoura Education pour l’éducation non formelle, son président Noureddine Ayouche ne s’attendait pas à un tel succès. Près de 3.000 écoles, soit 6.000 classes, ont été créées grâce au soutien de nombreux partenaires et bailleurs de fonds nationaux et internationaux.

A ce jour, 17.000 élèves, dont 62% de filles, ont suivi le cursus scolaire de la fondation Zakoura Education, qui tire l’essentiel de son effectif de la perdition scolaire dans les écoles de l’Education nationale (6,7% en 2005). Preuve! «Plus du 1/3 seulement des enfants intégrés dans les écoles de la fondation en 2005 n’avaient jamais fréquenté une école auparavant», avance, non sans un brin de fierté, Mounia Benchekroun, directrice générale de Zakoura Education. Et les enfants «repêchés» semblent sortir d’un cauchemar. Ils racontent tous les comportements indécents de certains instituteurs, la cruauté d’autres qui n’hésitent pas à les frapper pour les punir. On ne sait pas si ces enseignants ont été sanctionnés.

Le programme d’éducation non formelle concocté par la fondation cible les enfants déscolarisés ou non scolarisés âgés de 8 à 16 ans. Le challenge -pédagogique- c’est de leur donner, en trois ans (durée du cursus des écoles Zakoura) un niveau équivalent à celui des élèves de la dernière année de l’école primaire publique (6e année), en plus des modules parascolaires (théâtre, peinture, musique…), visant à favoriser leur épanouissement. A la différence de l’école publique, l’éducation non formelle joue la carte de proximité. D’ailleurs, une des modalités de fonctionnement de ces écoles, pas comme les autres, c’est sans conteste la flexibilité des différents emplois du temps des enfants, définis en concertation avec leurs parents. Pourtant, 2 heures 30 à 3 heures de cours par jour, 6 jours par semaine et 11 mois par an, pendant 3 ans, suffisent pour réinsérer les enfants, que l’on croyait irrécupérables à jamais, dans le cursus scolaire traditionnel. Les derniers résultats enregistrés en 2005 en attestent: 319 élèves sur les 386, soit 83%, ont réussi à l’examen d’entrée au collège. Selon l’âge, les élèves peuvent intégrer l’enseignement scolaire public, suivre une formation professionnelle ou s’engager dans la vie active. Sur un total de 738 enfants qui ont poursuivi jusqu’à terme le cursus de trois ans débuté en 2003, 68% ont émis le souhait d’intégrer l’école publique, soit 502 enfants. La formation professionnelle en a attiré 27%, et les 5% restants ont tenté de rentrer dans la vie active. La fondation elle, qui souhaite encourager l’intégration de tous ses élèves au sein du cursus scolaire public, les inscrit d’office aux différents examens et tests en vigueur.

Pour fédérer tout le monde autour du projet de développement humain de la fondation Zakoura, un programme d’initiation professionnelle est mis en place, dans le cadre du Développement intégré du douar (DID), dans la plupart des douars accueillant ces écoles. Le programme d’initiation professionnelle contenant plusieurs métiers (coupe et couture, menuiserie, ferronnerie, plomberie, électricité) cible les jeunes filles et garçons âgés entre 16 et 25 ans. D’une durée de 2 à 3 mois, selon le métier choisi, l’objectif visé par ce programme, c’est de faciliter la recherche d’emploi pour les jeunes en leur donnant une formation de base. Démarré en octobre 2002, ce programme a permis la formation de 5.052 jeunes dont 26% de filles. Elles étaient plus nombreuses à suivre la filière coupe et couture (92%) contre 7% en électricité et 1% en plomberie. L’intégration dans la vie active des «apprenants» du programme d’initiation professionnelle se révèle être un succès. Entre 2002 et 2005, ce sont 1.263 bénéficiaires qui ont intégré la vie active.

Le programme de Développement intégré du douar, rendu possible grâce au concours de la fondation Mohammed V pour la solidarité, est le programme le plus complet mis en place par la fondation Zakoura Education, pour un investissement de près de 21 millions de DH. Etalé sur 39 mois, son volet éducatif est axé sur la sensibilisation et l’éducation, la qualification des jeunes par l’initiation professionnelle, l’implication et la responsabilité de la communauté du douar dans une institution représentative (la maison du douar). Le volet économique finance des activités génératrices de revenus par l’octroi de microcrédits. Objectif: rendre autonome la communauté du douar, en lui donnant les moyens de prendre en charge son développement. Depuis sa mise en place en 2001, le programme DID, achevé en juin 2005, qui a profité à 60 douars à travers 10 régions du pays, a fait carton plein. L’objectif en nombre de bénéficiaires est largement dépassé par quatre des cinq modules contenus dans le programme. L’éducation non formelle a touché 3.282 jeunes au lieu de 3.000, soit un taux de réalisation de 109%. L’initiation professionnelle a atteint un taux de 166%, passant de 3.000 à 4.975 bénéficiaires. L’éducation sanitaire et le microcrédit ont atteint respectivement des taux de réalisation de 130% et 127%. Seule l’alphabétisation a failli, avec un taux tout de même de 96% pour un objectif de 5.400 bénéficiaires ciblés. Il fallait bien trouver une faille dans le système.

Bachir Thiam
Source: L'Economiste

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