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Des tentes berbères au pied des barres de la cité des 4000

Féminisme . Les Caravanières du Sud, militantes des droits des femmes, ont fait escale à La Courneuve pour faire avancer leur cause des deux côtés de la Méditerranée.

Trois tentes berbères plantées au beau milieu de la cité des 4000, à La Courneuve (Seine-Saint-Denis), un spectacle insolite dans ce quartier aux sinistres barres. Ce jeudi-là, des femmes investissent la place publique où elles attendent l’arrivée des Caravanières du Sud, après leurs escales de Lyon, Strasbourg et Paris, et avant de reprendre leur périple vers Montreuil-sous-Bois et Dijon. Elles sont quinze Marocaines (et deux hommes), trois Algériennes (cinq autres n’ont pu obtenir leur visa) et une Tunisienne à sillonner des villes de France à la rencontre des femmes immigrées ou françaises originaires de pays étrangers. À La Courneuve, elles sont reçues par des youyous de bienvenue. Sous les tentes, café, thé et croissants trônent sur des plateaux en cuivre posés sur des tapis aux couleurs chatoyantes. Un accueil qui libère d’emblée la parole et appelle au partage des expériences entre femmes, militantes ou pas, d’ici et de là-bas.

Africa pose les jalons du débat
Le débat, introduit par Africa, l’association hôtesse (1), est marqué par des témoignages et des informations sur les conséquences de l’application de certaines dispositions des conventions bilatérales entre la France et un certains nombre d’États (Algérie, Maroc ou Sénégal). « La plupart des femmes ne découvrent la portée de ces accords que lorsqu’elles sont en situation de conflit avec leur mari », expliquent les militantes. Des exemples d’épouses recevant un jugement de divorce unilatéral, obtenu par le mari auprès du tribunal d’Alger, sont ainsi relatés. « Elles sont, de fait, répudiées et se retrouvent jetées hors du domicile conjugale », racontent-elles.

Mimouna Hadjam, porte-parole d’Africa, n’a pas des heures pour convaincre ses camarades féministes d’interpeller les politiques sur cette question largement méconnue. « Pour que les femmes issues de l’immigration ne soient pas soumises à un statut inégalitaire, les parlementaires nationaux et européens doivent refuser de reconnaître les codes de famille étrangers et les lois relatives au statut personnel qui violent les droits des femmes, ainsi que leur application sur le territoire français. » La proposition de dénoncer les conventions bilatérales est émise devant de nombreux élus communistes et socialistes venus soutenir cette initiative. La députée (PCF) Muguette Jacquaint, qui a assisté à toute la rencontre, a rappelé qu’elle avait déjà saisi l’Assemblée nationale, par l’intermédiaire de la déléguée aux droits des femmes, pour que ce sujet soit pris en considération.

Impressionnées par la présence des élus, des travailleurs sociaux, des féministes de plusieurs associations, les Caravanières du Sud pointent l’importance de ce genre de rencontres pour faire progresser l’émancipation des femmes, ici et ailleurs. Mais elles se disent « surprises » de constater ici une régression des droits des femmes et le retour du conservatisme.

(1) Femmes contre les intégrismes et Femmes solidaires, entre autres, parties prenantes de l’initiative.

Mina Kaci
Source: L'Humanité

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