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Les résultats de la conférence de Rabat sur les flux migratoires.

Après deux jours marathon, le plan d’action euro-africain et la déclaration de Rabat sur la migration et le développement ont été adoptés hier. Il s’agit des deux principaux résultats de la Conférence de Rabat (10-11 juillet).

Leur approbation a fait dire à Taieb Fassi Fihri, ministre délégué aux Affaires étrangères, que cette rencontre a été un succès. «Désormais, nous avons tous pris acte que la gestion de l’immigration clandestine ne peut être résolue par des mesures unilatérales ni unidimensionnelles», a-t-il déclaré lors d’une conférence de presse. Et pour cause, le plan d’action comprend trois principaux volets distincts, à prendre en charge par tous les pays concernés. Le premier concerne la promotion du développement en Afrique. Cet arsenal porte essentiellement sur l’amélioration de la coopération économique entre les pays d’origine, de transit et de destination des migrants. Celle-ci passe notamment par l’intégration régionale et l’investissement dans des secteurs générateurs d’emploi (agriculture, tourisme…), mais aussi et surtout par un appui technique et fiscal aux migrants souhaitant investir dans leurs pays d’origine. Ces propositions sont notamment appuyées par la France. Le ministre d’Etat à l’Intérieur, Nicolas Sarkozy, a fait le déplacement à Rabat, muni de tout un livret de solutions dont il fait la promotion, avec un brio certain. Côté financement, le plan d’action se limite à la mise en place de structures collectives de financements avec la participation des immigrés et de fonds d’intervention dans les régions touchées par l’exode rural. Pour Catherine Colonna, ministre française déléguée aux Affaires européennes, l’Europe «est celle qui fait déjà le plus en faveur de l’Afrique». Elle apporte plus de 60% de l’aide publique au développement reçue par le continent et elle est ainsi son premier donateur mondial. Le ministre sénégalais de l’Intérieur, Ousmane Ngom, est allé plus loin. «La Conférence de Rabat n’est pas une rencontre entre des pays d’Afrique et les bailleurs de fonds européens. Partant des dysfonctionnements actuels en matière d’immigration comme dans le développement de l’Afrique, une vision nouvelle s’imposait», a dit le ministre. Celle-ci s’articule également autour du développement des compétences africaines qui passe par l’aide au retour des étudiants africains ayant fait leurs études en Europe, la lutte contre la fuite des cerveaux et la création de pôles régionaux d’excellence universitaire au Sud. La facilitation de la mobilité des étudiants africains est également soulignée à travers l’activation de programmes européens tels que Nyerere ou Erasmus Mundus.

Deuxième volet de ce plan d’action, la gestion de la migration légale. Un effort de communication est à mener au niveau des canaux disponibles pour la migration légale. Ceci, au même titre que des formations pour les émigrants dans les pays d’accueil pour faciliter leur intégration (langue, culture…). Une réflexion sur l’exportabilité des droits à la retraite des migrants est entamée au même titre que la régulation de l’offre et de la demande en emploi, avec la mise en place de procédures claires et de voies légales. L’information sur la nature des profils et qualifications recherchés, la simplification des procédures pour certaines catégories (étudiants, hommes d’affaires, commerçants…) sont également approuvées. Le tout avec un accent sur la migration temporaire et saisonnière.

Troisième et plus important volet de cette conférence, la lutte contre l’immigration clandestine. Le point fort des mesures adoptées reste l’engagement de tous les pays à conclure des accords de réadmission. Mais la ratification de ces accords, et le calendrier de leur entrée en vigueur, seront fixés de manière bilatérale avec chacun des pays d’Afrique concernés. Un appui technique européen sera apporté pour l’identification de la nationalité des immigrants en situation irrégulière. Préalable à tout cela, la formation des services compétents et l’installation d’équipements, d’un système d’alerte précoce des mouvements migratoires et d’une coopération policière opérationnelle. La priorité sera accordée à la lutte contre la traite d’êtres humains. Commissaire européen chargé de la Justice, Franco Frattini a insisté sur cet aspect. «La lutte contre les réseaux de traite des êtres humains est la clef de la résorption de la problématique de l’immigration clandestine et des malheurs qu’elle entraîne. Elle devrait donc être à la tête de nos préoccupations à tous», a-t-il expliqué. Côté financement, et là encore, il est uniquement question d’optimiser les mécanismes déjà en place. Des formules spécifiques seront étudiées. Cela a été le cas pour la Mauritanie, qui vient de bénéficier d’une aide financière européenne de 2,4 millions d’euros pour lutter contre les flux d’immigration clandestine à destination des îles Canaries. Cela est également le cas pour l’engagement espagnol, par la voix de son ministre des Affaires étrangères, Miguel Angel Moratinos, portant sur une aide au développement de l’Afrique, d’une enveloppe de 30 millions d’euros. Un tiers de ce montant sera mobilisé dans le cadre d’un fonds régional de microcrédit que l’Espagne a proposé de créer.

Comité de suivi
D’après les termes de la déclaration de Rabat, tous les pays participants s’engagent à mettre en place un partenariat dans un esprit de responsabilité partagée pour gérer les flux migratoires entre les pays d’origine, de transit et de destination. Outre les points figurant dans le plan d’action, la déclaration porte sur la mise en place d’un comité de suivi, composé de hauts fonctionnaires des Etats concernés, pour établir des états des lieux réguliers quant à l’avancement du plan d’action. Ce comité devra également fixer une date pour la tenue d’une deuxième conférence ministérielle, au plus tard dans deux ans.

L’approfondissement d’un dialogue politique de portée continentale et la tenue d’une conférence ministérielle Afrique-Europe dédiée à la Migration y figurent également. L’offre de la Libye d’accueillir cette conférence à Tripoli avant la fin 2006 a été saluée.

Tarik Qattab
Source: L'Economiste

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