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Au PS, les minorités visibles peinent à se faire voir

Pour les législatives 2007, seules 42 circonscriptions leur sont allouées.

Des listes «aux couleurs de la société». Hier, les militants socialistes ont investi leurs candidats pour les législatives de 2007. Des principes intangibles devaient régir la désignation de ces postulants. Comme l'obligation de respect de la parité ou celui de la diversité, pour présenter des candidats «aux couleurs de la société.» Seulement, si la question de la présence des femmes dans des circonscriptions qui peuvent être gagnées par la gauche est à peu près tranchée et la règle respectée, la question des «minorités visibles» vire à la crise de nerfs. «Pour la parité, le PS a été capable d'édicter des règles claires, proteste le fabiusien Fayçal Douhane, membre du Conseil national. Pour le respect de la diversité, rien n'a été fait dans ce sens.» En dépit de demandes répétées.


Crispation. La direction du parti a préféré opter pour une solution radicale : 42 circonscriptions sont gelées pour ces candidatures estampillées minorités. Dans une vingtaine d'entre elles, il sera fait une place aux alliés de la gauche, Verts et radicaux de gauche. Restent donc 20 circonscriptions en lice. Là intervient une seconde raison de crispation pour ceux qui espéraient prétendre aux postes. Le parachutage de candidats labellisés minorités visibles, sans légitimité locale. Comme pour l'arrivée de Safia Otokoré à Trappes (Yvelines). Une «bonne» circonscription que la gauche peut enlever. Mais un élu d'origine algérienne, Djamal Yalaoui, a décidé lui aussi de se lancer dans la bataille, investi par le PS ou non. Contre la logique du parachutage. A Trappes, il y a un passif. Autrefois Harlem Désir et Catherine Tasca avaient été dépêchés sur place. Djamal Yalaoui, maire adjoint de la ville, dénonce ce «mépris» du travail des élus de terrain. Ailleurs, l'arrivée probable de Malek Boutih dans la circonscription d'Angoulême-Nord (Charente) fait aussi rigoler, pour d'autres raisons : «On l'attendait en banlieue, dit un socialiste. Au contact de ceux qui souffrent. Le voilà dans une circonscription quatre étoiles, au coeur du Poitou...»

Gadget. Ce «mépris du travail de terrain», se retrouve aussi dans l'Isère. «Ici, la fédération est à l'âge de glace en ce qui concerne la parité, le renouvellement des générations et la diversité», dit Ali Kismoune. Délégué national chargé des solidarités urbaines au PS, il a décidé d'entrer en dissidence. «Pas pour un poste, jure-t-il. Juste pour attirer l'attention de nos militants qu'en dépit des affichages des uns et des autres, le compte n'y est pas.» Car les «minorités visibles», au-delà de leur propre représentation, mettent d'autres débats sur la table. Comme la question du mandat unique. «Si on arrêtait le cumul, explique Ali Kismoune, la question du nombre de postes qui peuvent être distribués n'en serait plus une.»

Deux autres militants locaux, Hassan Boutemine et Farid Derbal, briguent la candidature dans deux autres circonscriptions de l'Isère. «Nous n'avons aucune chance, dit Kismoune. Mais nos positions sur le non-cumul ont été entendues par les militants, c'est l'essentiel.» Autre chance de la «diversité» selon les frondeurs, elle permettrait de changer la face du parti. Ces candidats ont en général moins de 40 ans et viennent de milieux sociaux sous-représentés dans la hiérarchie du PS, comme à l'Assemblée nationale. «Se battre pour la diversité ce n'est pas qu'une question de minorités, dit l'un d'eux. C'est aussi le moyen de faire monter des enfants d'ouvriers, des gens qui habitent vraiment en banlieue, qui savent ce qu'est la précarité, mais aussi l'envie de se battre.»

Du coup, la contestation des parachutages n'est pas qu'une querelle d'egos ou de déception. «C'est aussi pour ne pas réduire à néant cette idée de diversité, d'en faire un gadget», note un député. La déception est telle chez les beurs du PS que la dernière blague qui traîne n'arrive même plus à les faire rire. «Au PS, il y a deux types d'immigrés, comme avec Sarkozy : les choisis et les subis.»


Source: Libération

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