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Le fléau de la corruption au Maroc

Encore une stratégie de lutte anti-corruption. L’on se gardera de la cautionner pour l’heure eu égard aux échecs des tentatives précédentes. Ce qui est sûr en revanche, c’est que le Premier ministre a décidé d’abandonner l’idée d’une grande loi.

Selon nos informations, un nouveau plan d’action a été examiné vendredi dernier par une commission interministérielle présidée par Jettou en personne. Ce plan comporte 23 mesures transversales et 41 autres sectorielles. La démarche est qualifiée d’«opérationnelle» et, en clair, l’idée est d’organiser la résistance des citoyens en augmentant leur immunité face à ce mal. A l’issue de la réunion, le Premier ministre a demandé à chaque ministre de préparer des mesures concrètes pour contrecarrer la corruption dans son secteur.

Parmi les dispositions prévues, l’idée est de créer une agence présentée comme observatoire de la corruption. Cette instance centrale de la prévention de la corruption sera placée auprès du Premier ministre et aura un avis consultatif sur les règlements et les textes sous le prisme de la lutte contre la corruption. Elle sera habilitée à recueillir toutes informations ou autres rapports si elle les juge indispensables à sa mission. Jettou veut aller loin au point de conférer à cette structure la possibilité de saisir la justice si des faits de corruption s’avèrent réels. Pour une source proche du dossier, cet observatoire aura à mesurer la corruption au lieu de se limiter à la perception de ce fléau comme c’est le cas aujourd’hui.

Autre levier important, la déclaration du patrimoine. Sur ce chapitre, les efforts seront concentrés sur le ciblage de certains corps de métiers exposés à la tentation de corruption. Cela va des ministres aux élus en passant par les douaniers et les inspecteurs des impôts. Et d’autres professions en contact avec l’argent seront concernées. La déclaration sera périodique: au début et à la fin du mandat. Le contrôle se fera par la Cour des comptes et les Cours régionales des comptes. Sa forme sera standardisée. Sur ce registre, l’opinion publique a toujours en tête la dernière sortie de Mhamed Lkhalifa. «Ce sera nettement plus détaillé avec ce que nous préparons. Si on déclare un terrain, il faudra donner sa superficie».

La simplification des procédures et la disparition d’autres sont également considérées comme leviers contre la corruption. Sur ce chapitre, il s’agit de supprimer le contact entre les deux personnes (le corrupteur et le corrompu) notamment en mettant davantage l’accent sur la e-administration. Là aussi beaucoup de travail reste à faire. Il suffit de visiter certains sites de ministères ou d’établissements publics pour réaliser qu’on est loin du compte.

Autres actions à l’étude, la généralisation de l’appel à candidature pour les nominations aux postes de responsabilité et la mise en œuvre des dispositions relatives à la mobilité des responsables. Pour une source proche du dossier, il est impératif de changer d’approche et de style. Tout ce qui a été conçu jusque-là se basait sur la loi ou la communication. Le dispositif juridique coercitif avec une batterie de contrôles ne suffisent pas à endiguer la corruption. Or, dans ce domaine, la prolifération des textes peut être un blocage. Des personnes arrivent toujours à détourner l’interprétation de la loi. Au Maroc, il y a une multiplicité d’organes de contrôles comme l’IGF, la Cour des comptes, l’IGAT (ministère de l’Intérieur), les inspections générales des ministères… Cela n’a pas empêché les détournements et les pots-de-vin liés aux marchés publics. La communication seule ne suffit pas. Elle banalise la corruption et décrédibilise toute action.

Actions dans le pipe
D’autres actions seront programmées au cours de cette année. Il s’agit notamment de la ratification de la convention des Nations unies pour la lutte contre la corruption et l’adoption du projet de loi relatif au blanchiment d’argent. Ce dernier texte devra être approuvé par le Conseil des ministres. Quant au projet de modification de la loi sur la déclaration du patrimoine, il est actuellement au secrétariat général du gouvernement. A cela s’ajoute la mise en place de la carte d’identité biométrique qui permettra la substitution à certains documents administratifs. La réforme du décret de passation des marchés publics, source de la grande corruption, n’est pas en reste. Un texte sur les marchés publics des collectivités locales est actuellement à l’étude au SGG. D’ailleurs, un portail informationnel sur ces marchés sera mis en place prochainement.

Mohamed Chaoui
Source: L'Economiste

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