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Violations contre les femmes : Un rapport de l’IER pour le 8 mars

«Heureusement qu’il n’a pas été enlevé!», a lancé, sur un ton plaisantin, Abdesslam Aboudrar, du Collectif démocratie et modernité, voyant arriver avec un retard de 45 minutes Driss Benzekri, qui devait animer une rencontre, mardi 21 février à 19h, à la faculté de médecine de Casablanca.

Le retard de Benzekri n’était pas le seul désagrément de cette rencontre organisée par le Collectif et dont le thème central était le bilan de l’expérience de l’Instance équité et réconciliation (IER) et ses perspectives. Une dizaine de participants actifs dans les droits de l’Homme ont contesté, non sans grande colère, le fait que les questions de l’assistance (du reste pas très nombreuse, 60 à 70 personnes en tout) devaient être écrites et non posées oralement (à noter que le Collectif a toujours procédé de la sorte pour ses rencontres, du moins celles organisées à la faculté de médecine). Pour eux, c’est un acte «antidémocratique». Devant le refus des modérateurs, Mohamed El Ayadi et Abdesslam Aboudrar, de se plier à leur demande, les mécontents ont fini par quitter la salle, dans un grand brouhaha.

L’incident clos, Benzekri a rappelé que le travail de l’Instance, qui a duré 30 mois, a toujours été la cible de plusieurs critiques, surtout de la part des victimes, de leurs familles et des instances de défense des droits de l’homme. «Nous avons travaillé et nous continuons d’être sous les «feux» de la rampe, dans le vrai sens du terme», a souligné le président de l’IER.

Comme il fallait s’y attendre, le débat a porté sur des questions qui ont souvent été soulevées lors de la grande opération de catharsis menée par l’Instance, et même après. Ainsi, l’assistance a tenu à revenir sur les responsabilités dans les différentes violations des droits de l’homme, la nécessité de présenter des excuses aux victimes et à leur famille et de lutter contre l’impunité des responsables des violations. Le public était aussi particulièrement intéressé par le devenir de l’expérience, l’affaire Ben Barka, la continuation des violations et les indemnités. «Les familles des victimes ne doivent pas être sanctionnées deux fois. Premièrement, au moment de la violation à l’encontre de leur proche et, deuxièmement, en contribuant à l’indemnité, l’argent de l’Etat n’étant que celui du contribuable», a indiqué une personne de l’assistance, dans sa «question» écrite.

Peu de questions en revanche sur la récente tournée de Benzekri à l’étranger. Le président de l’IER n’en a pas touché un mot non plus sauf pour répondre évasivement à l’assistance. Pourtant, l’expérience a été applaudie là où l’a mené son périple.

Outre le premier rapport dont la publication a été ordonnée fin 2005 par le Souverain, un bilan général des violations commises entre 1956 et 1999 sera prochainement rendu public, a annoncé Benzekri. Un autre rapport sur les violations à l’encontre des femmes sortira le 8 mars prochain, à l’occasion de la fête de la femme. «Les violations contre la femme ont souvent été marginalisées», souligne le président de l’IER.


· Responsabilité collective

La recherche de la vérité a été marquée par plusieurs difficultés, la plupart des victimes étant décédées, reconnaît Benzekri. Cependant, l’Instance dispose d’une grande quantité de données qui seront complétées par d’autres recherches. Des rapports plus détaillés seront publiés au fur et à mesure de l’avancée des investigations. L’affaire Ben Barka fait partie de ces dossiers non encore achevés. «Nous avons des preuves que la France cache des éléments de l’affaire», affirme Benzekri.

S’agissant de l’impunité des anciens tortionnaires, le président de l’Instance parle d’une responsabilité collective entre différents services de sécurité. La plupart des témoignages dont dispose l’IER concernent des «sous-fifres». «Nous travaillons sur la reconstitution des faits pour savoir exactement qui a fait quoi», indique le président de l’IER. «Il faut quand même reconnaître qu’à cette époque il était difficile d’imaginer qu’un élément de la sécurité puisse dire non à son supérieur», a précisé Mohammed El Ayadi. «Mais cela n’empêche pas que chacun doit répondre de ses actes».

Et l’«après-IER»? Benzekri a rassuré: Plusieurs recommandations concernant la lutte contre l’impunité par le biais de réformes juridiques ont été formulées. Le patron de l’IER a indiqué qu’il n’était pas exclu d’amender la Constitution «pour l’instauration d’une véritable culture des droits de l’homme au Maroc».

Mohamed AKISRA
Source : L'Economiste

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